“Putain, j’suis chauuuud!”. Place de la Bastille, à Paris, un manifestant des plus enthousiastes se frotte les mains : il y a du monde, il fait – encore – beau, la vie est belle, il est plutôt content. Pour cette première grande mobilisation sociale depuis le début du quinquennat d’Emmanuel Macron, rendez-vous était pris ce mardi […]
Pour la première grande mobilisation sociale depuis l’élection d’Emmanuel Macron, 60 000 personnes ont manifesté de Bastille à place d’Italie, à Paris, selon la CGT (24 000 selon la police). Si dans le cortège peu espéraient voir le chef de l’Etat revenir sur sa décision de légiférer par ordonnances pour réformer le code du travail, tous souhaitaient “maintenir la pression” et “montrer qu’[ils] relèvent la tête”.
“Putain, j’suis chauuuud!”. Place de la Bastille, à Paris, un manifestant des plus enthousiastes se frotte les mains : il y a du monde, il fait – encore – beau, la vie est belle, il est plutôt content. Pour cette première grande mobilisation sociale depuis le début du quinquennat d’Emmanuel Macron, rendez-vous était pris ce mardi 12 septembre pour les pourfendeurs de la “loi travail XXL”. Lancée à l’appel de la CGT, de la FSU, de Solidaires et l’Unef, la manifestation a attiré 60 000 personnes à Paris selon la CGT – 24 000 selon la police – tandis que des milliers d’autres se sont mobilisées ailleurs en France. Dans le cortège parisien, en tout cas, un seul constat régnait, résumé par une pancarte : “La régression sociale est en marche.”
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Autres variantes, par écrit sur des affiches ou scandées avec entrain à l’oral : “Le roi est nul”, “On lâche rien”, un plus prosaïque “Ça sent le sapin” – pas littéralement, dommage, ça sent bon les sapins, ça a d’ailleurs plutôt senti la lacrymo après quelques débordements, ou encore la pluie parce qu’il a fini par pleuvoir. “Macron t’es foutu, les feignants sont dans la rue”, obtient également un certain succès. Car si les manifestants sont présents aujourd’hui pour “montrer leur mécontentement” concernant la décision du président de légiférer le code du travail par ordonnances, cette mobilisation est aussi l’occasion d’exprimer un ras-le-bol plus global. Un ras-le-bol “de sa politique d’austérité” mais aussi de ses saillies récentes jugées tour à tour “méprisantes”, “scandaleuses” voire “lamentables”. En cause, ses propos prononcés en Grèce le 8 septembre, affirmant qu’il ne souhaitait rien céder “ni aux fainéants ni aux cyniques ni aux extrêmes” qui seraient dans l’opposition de ses réformes.
« Redonner confiance aux gens, leur montrer qu’ils ne sont pas seuls »
On croise par exemple Myriam, une jardinière de la ville de Paris de 44 ans. Elle a confectionné de ses mains une affiche des plus évocatrices et ironiques : le dessin de la panthère rose, prélassée et oisive, avec écrit par-dessus “Eloge de la paresse”. Elle ne décolère pas : “Ses propos sur les fainéants m’ont choquée. On ne sait pas vraiment à qui il s’adressait, il fait exprès d’être dans le flou. En fait, Macron, c’est un peu un troll !” Pour cette jeune femme tout de rose vêtue – histoire sans doute d’être raccord avec sa pancarte -, il était “important d’être présent aujourd’hui, pour montrer qu’on est nombreux, redonner confiance aux gens, leur montrer qu’ils ne sont pas seuls”. Et ce, à défaut de faire plier Macron, ce qu’elle n’estime pas plausible. Même discours chez Françoise, retraitée de 62 ans venue tracter pour le Mouvement du 1er juillet, lancé par Benoît Hamon – dont les partisans se sont d’ailleurs déplacés en nombre. “Il a dit qu’il ne reviendrait pas sur cette histoire d’ordonnances. Mais je suis là pour montrer que les gens peuvent se bouger. Aujourd’hui, c’est le commencement de quelque chose.”
Autres mouvements ou partis politiques représentés dans le cortège : Lutte Ouvrière, le PCF et la France insoumise – sans Mélenchon, qui manifestait à Marseille. S’ils ont appelé à une autre manif le 23 septembre prochain, les soutiens du LFI ont tenu à être présents, à l’image de Maya, que l’on croise en train de distribuer des stickers et flyers. Elle conteste les ordonnances de Macron à la fois pour le principe et pour leur contenu. “On a des députés payés par le contribuable pour discuter des lois, et alors que Macron a la majorité à l’Assemblée avec La République en marche!, il court-circuite ça. Sans parler des ordonnances en tant que telles, par exemple concernant les accords de branche qui risquent de passer à la trappe.” La primauté donnée aux accords d’entreprise plutôt qu’aux accords de branche est en effet l’une des 36 mesures contenues dans les ordonnances, outre par exemple la baisse des indemnités prud’homales en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse ou encore la primauté donnée au périmètre hexagonal pour appréhender les difficultés économiques des multinationales licenciant en France.
« On ne pouvait pas ne pas venir à cette manif »
“Maintenant, on peut me virer quand on veut”, abonde Claude-Philippe, 62 ans et soutien de LFI qualifiant de “forfaiture” les réformes mises en branle par le chef de l’Etat. On peine à l’entendre, les militants entamant un “El pueblo unido jamás será vencido” – “Le peuple uni ne sera jamais vaincu” -, cri de ralliement du parti Podemos en Espagne. On entend également de-ci de-là « l’Internationale », Noir Dez, « Bella Ciao », notamment du côté de la bannière de la CGT.
Le syndicat est venu massivement manifester, tout comme SUD ou encore la FSU. L’un des membres de sa branche commerce estime “qu’avec ces ordonnances, Macron ne va que dans un seul sens : celui des patrons”. Il se félicite de la mobilisation du jour, même s’il regrette que l’ensemble des forces syndicales ne soient pas présentes : les dirigeants de FO et de la CFDT n’ont pas souhaité répondre à l’appel lancé par leurs pairs. “Si on ne se met pas tous d’accord, on ne pourra pas lutter contre Macron et le patronat. Mais le haut de la cocotte minute n’est pas forcément en phase avec la base.” C’est vrai : dans le cortège, on croise quelques membres de la CFDT ou de FO, venus malgré la désolidarisation de leurs instances dirigeantes. C’est par exemple le cas de Serge, 60 ans, administrateur pour les aéroports de Paris. Clope au bec et casquette FO sur la tête, il explique ne “pas comprendre pourquoi Jean-Claude Mailly a pris cette décision” mais que, à son sens, “on ne pouvait pas ne pas venir à cette manif”. Sur un mur non loin de là, quelqu’un a écrit “Askip on ve pas bosser =D”. Askip, la CGT rappelle à manifester le 21 septembre.
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