L’appli mobile Facewatch permet aux habitants de Londres d’identifier et de dénoncer ceux qui échappent toujours à la justice britannique depuis les émeutes de l’été dernier.
Connaissez-vous le crowdsourcing ? Ce terme anglo-saxon désigne une méthode de recueil de l’information qui consiste à faire appel à la « foule » des internautes. Une technique qui peut être utilisée par des journalistes, des scientifiques, des sociologues, etc. Depuis quelques années, c’est la justice qui a compris tout l’intérêt de cette méthode pouvant se révéler bien utile dans le cadre d’enquêtes policières.
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Le site Facewatch s’inspire ainsi directement du crowdsourcing. Le concept nait en 2010, lorsque Simon Gordon, propriétaire d’un bar à vin à Londres qui fait régulièrement face à des actes de vandalisme dans son établissement, propose son aide à la Metropolitan Police. C’est ainsi que naît Facewatch, un site web lancé à la fin de l’année 2010, disponible sur smartphone depuis le mois d’avril dernier.
Grâce à cette nouvelle appli, la Metropolitan Police espère identifier les milliers de personnes impliquées dans les émeutes de l’été dernier, et toujours recherchées par la justice britannique.
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Facewatch fonctionne avec un logiciel de reconnaissance faciale. Elle contiendra très bientôt, vient d’annoncer la police, 2 880 photos prises par les caméras de surveillance CCTV, qui pourront être consultées à partir d’un téléphone mobile. Si un Londonien reconnaît l’une des personnes en photo sur son smartphone, l’application lui permet envoyer le nom et l’adresse du suspect directement à la police. Commissaire adjoint de la Metropolitan Police, Mark Rowley se réjouit de cette innovation dans The Independant :
« C’est une immense opportunité pour le public qui va pouvoir nous aider à combattre le crime et ramener les criminels impunis à la justice. J’espère que les deux tiers des Londoniens qui possèdent un smartphone téléchargeront cette application, et nous aideront ainsi à identifier les personnes que nous aimerions interroger.
L’idéal serait que les habitants de Londres naviguent sur cette application au moins une fois par semaine, puisque de nouvelles photos seront mises en ligne régulièrement. C’est une manière fantastique pour les Londoniens de nous aider à lutter contre le crime. »
La capitale britannique, déjà connue pour être l’une des villes du monde le plus équipées en caméras de surveillance, s’est donc dotée d’un nouvel outil redoutable pour lutter contre la criminalité.
Dominique Turcq, président de la Boostzone Institute et spécialiste du crowdsourcing, a rédigé de nombreux articles sur la question afin de définir cette notion. Selon lui, l’application Facewatch est bien une déclinaison de cette méthode:
« On est complètement dans du crowdsourcing. La police va chercher des gens qu’elle ne connaît pas – et qu’elle ne connaîtra jamais – pour obtenir une information structurée qui va servir dans un but précis, ici diminuer la criminalité et lutter contre le crime. »
Une méthode déjà utilisée par la police américaine
Faire appel à des internautes pour venir en aide aux services de sécurité : le concept n’est pas nouveau. Depuis 2008, le Texas Virtual Border Watch Program propose ainsi à des citoyens de surveiller la frontière américano-mexicaine afin de participer à la lutte contre l’immigration illégale et le trafic de drogue.
En s’inscrivant sur le site Blueservo.net, n’importe quel citoyen américain peut ainsi choisir de se poster, via l’écran de son ordinateur, derrière l’une des douze caméras installées le long de la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique, et de signaler tout mouvement suspect aux autorités.
Autre exemple de crowdsourcing mis au service de la justice avec le compte Twitter de la police de Seattle, qui appelle depuis décembre 2010 ses followers à l’aide pour retrouver des voitures volées. Ce compte officiel twitte ainsi régulièrement l’immatriculation des véhicules disparus, et invite ses abonnés à avertir la police si jamais ces derniers repèrent le véhicule en question. L’initiative aurait permis de faire diminuer le nombre de vols de voitures dans la ville.
Dénoncer à la police mais aussi dénoncer la police
Le crowdsourcing peut évidemment paraître contestable, et même dangereux selon Dominique Turcq : « On a tous envie qu’il y ait moins de criminalité. Mais le risque, c’est de tomber dans une sorte de violation collective où chacun dénoncerait tout le monde. Ce serait épouvantable. » Mais le concept présente l’avantage de ne pas fonctionner que dans un sens : la méthode peut en effet également être utilisée par des citoyens victimes d’abus policiers.
C’est ce qui s’est passé à Montréal, lors des récentes émeutes étudiantes : de nombreux manifestants se sont servis du compte Twitter de la police locale pour dénoncer les officiers coupables d’actes de violence. La direction de la police de Montréal a promis de sanctionner les fautifs.
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