Hyper central et ultra-gentrifié, le mythique, festif et très hot quartier de Soho n’en finit pas de se transformer. A tel point qu’il perd toute son énergie et attractivité. A seulement trois minutes de marche de la station de métro Piccadilly Circus se trouve la longue et calme Old Compton Street. Kebabs branchés, bars à smoothies, sushis, pubs et […]
Hyper central et ultra-gentrifié, le mythique, festif et très hot quartier de Soho n’en finit pas de se transformer. A tel point qu’il perd toute son énergie et attractivité.
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A seulement trois minutes de marche de la station de métro Piccadilly Circus se trouve la longue et calme Old Compton Street. Kebabs branchés, bars à smoothies, sushis, pubs et cafés -des grandes chaînes pour la plupart- se suivent tout le long de la rue. Dans l’hyper centre de Londres, pas surprenant qu’un grand nombre de chaînes s’implantent dans les rues de Soho. Au point de « virer » les petits établissements: au mois de décembre, après vingt cinq ans d’existence, le restaurant The Stockpot -considéré comme une institution- a fermé ses portes dans la même rue. Tous les soirs de la semaine, le quartier est rempli de jeunes à la recherche de spots excitants et subversifs, se faisant toujours plus rares.
Fermetures une à une des clubs mythiques
Soho, ce sont surtout des clubs et cabarets qui ont marqué la scène de la nuit ces quarante dernières années, où les Sex Pistols, The Who ou les Libertines venaient régulièrement jouer. En novembre 2014, la fermeture de Madame Jojo’s, à la suite d’un retrait de licence, -qualifiée d’ « excuse » par un ancien promoteur du lieu- provoque des dizaines de réactions. Emblème mythique de Soho, le lieu a vu défiler d’innombrables danseurs burlesques et d’artistes comme Anna Calvi ou même Lorde. Pour le chanteur Britannique Tim Arnold, dont la mère était danseuse de burlesque dans les années 1960 : « Les fermetures des clubs à Soho sont en grande partie dues à une incompréhension de la part des propriétaires, qui ne comprennent pas comment ils peuvent en tirer profit ». Peu après la fermeture de Madame Jojo’s, Tim Arnold demande au maire de Londres, Boris Johnson, de l’aider à soutenir Save Soho, un projet visant à préserver la scène musicale du quartier. Car les fermetures se sont multipliées ces dernières années, de The Astoria au 12 Bar. Pour les remplacer, des établissements comme le très huppé club de membres Soho House, ou la boîte cabaret également présente à New York The Box (anciennement Revue Bar), qui offre des tables à minimum 1000 euros. A une dizaine de mètres de là, fruit de projets d’investisseurs, un hôtel de luxe en pleine construction balaie deux ou trois sex shops et librairies érotiques.
Une photo publiée par Vicente Ben (@mister.ben) le 9 Août 2015 à 15h52 PDT
Gentrification et prix des loyers exorbitants
En hausse depuis longtemps, les loyers de la capitale britannique continuent à augmenter, encore davantage dans le centre de la ville -aujourd’hui, une chambre sur Berwick Street coûte pas moins de 1200 euros mensuels-. Comme à Paris ou New York, la gentrification fouette ce quartier créatif et multiculturel où dans les années 1950, l’artiste Francis Bacon aimait passer du temps-. Selon le journaliste et entrepreneur britannique Alexander Proud: « C’est normal que la gentrification s’étende partout on s’y habitue. Mais à Soho, je trouve qu’elle a quelque chose d’inquiétant ». L’année dernière, il avait affirmé dans The Telegraph qu’« un Soho gentrifié est une terrible nouvelle pour Londres ». Les cabarets et bars cachés sont certes toujours debout, mais se font gentiment bousculer par des boutiques plus lisses, des restaurants de chaînes ou des salons de massage. « On a l’impression que le council de Westminster a décidé que Soho devait être transformé en ce lieu que seuls les touristes Américains cinquantenaires trouvent attrayant », poursuit Alex Proud. Si bien que les cools kids ont depuis longtemps déserté les lieux pour l’est de la ville, plus accessible et underground.
Un quartier qui se cherche
Désormais dépassé par Shoreditch, ancien quartier industriel devenu en quelques années le quartier le plus branché de Londres, préserver Soho apparaît aujourd’hui comme essentiel. Notamment en raison des prix, artistes et créatifs bougent de l’autre côté de la ville, aux environs de Dalston, et même vers Brixton, au sud, qui connaît boom depuis peu de temps. La suite pour Soho? « Imaginez un propriétaire serrer la main à un banquier dans un restaurant étoilé Michelin », ironise Alex Paul. « Si ça continue, tout le quartier ne sera qu’un grand centre de shopping mainstream, ce qui signifierait la perte d’une partie du capital culturel britannique ». Pourtant, malgré les nombreuses fermetures, les rues gardent un côté vibrant, spécial et subversif: « Tout n’est pas mort et certains spots sont tout aussi, voire plus cool qu’à l’est », nuance Alex Proud.
Pour sauver Soho, les « investisseurs » ont tout intérêt à prendre en compte les idées et revendications de ceux qui rendent le quartier bouillant. Au risque d’en faire un deuxième Mayfair et de prendre toute son âme à Soho.
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