Pour sauver le pacte social né à la Libération, résistants d’hier et d’aujourd’hui s’investissent dans les luttes. Deux livres en témoignent.
Résistance. Symboliquement chargé, le mot revient en force dans le discours et l’action politiques. Les résistants sont de retour en France, répartis dans des maquis de plus en plus nombreux : c’est le constat que dressent simultanément deux essais, Les Jours heureux, et La Désobéissance éthique.
Dans tous les milieux sociaux, des militants organisent la résistance à l’occupant de l’Elysée, accusé de détruire le bien commun, édifié à la Libération par le Conseil national de la Résistance dans un programme intitulé Les Jours heureux. Services publics, retraites, liberté de la presse, droit du travail : les fondations du modèle social furent l’œuvre des Résistants, qui soixante ans plus tard, s’émeuvent des coups répétés qu’il subit.
La politique de Nicolas Sarkozy est contraire au programme du CNR
En dépit de la récupération de l’histoire que fait Sarkozy en se rendant chaque année sur le plateau des Glières, lieu symbolique de la Résistance, la réalité de sa politique illustre la volonté de défaire le programme du CNR.
Comme si l’esprit de leur combat ancien flottait dans la société actuelle, quelques figures historiques de la Résistance, comme Stéphane Hessel ou Raymond Aubrac, ont créé en décembre 2008 avec des militants plus jeunes le mouvement Citoyens résistants d’hier et d’aujourd’hui : en exhumant le programme du CNR – un “acte et un héritage” dans la conquête d’un monde plus juste, selon l’historien Olivier Vallade –, Les Jours heureux invite à reposer la question de la répartition des richesses, à résister à la “démolition sociale entreprise par le capitalisme ultralibéral et ses servants politiques”.
Nombreux sont ceux qui décident de désobéir
Un geste militant déployé par divers mouvements, analyse la journaliste Elisabeth Weissman dans son enquête, La Désobéissance éthique, où elle répertorie les actions subversives qui bousculent le pays endormi et défendent l’intérêt général. Agents des services publics, électriciens, gaziers, conseillers Pôle emploi, postiers, forestiers, enseignants, hospitaliers, magistrats, militants contre les expulsions de sans-papiers, les logements vides… : beaucoup, au nom de valeurs éthiques décident de désobéir et refusent les injonctions à la rentabilité, à la répression, au fichage, à l’évaluation…
Désobéissance, freinage, opposition souterraine, contournement des règles : “L’héritage de la Résistance en France, c’est cela précisément : à savoir que les valeurs légitimes doivent l’emporter sur l’obéissance à la loi, sur la légalité”, estime Stéphane Hessel.
De plus en plus présents sur les terrains des guerres sociales en cours, les insoumis à la Sarkozie sont la face animée (et inversée) d’un corps social anémié. A côté des voix silencieuses des abstentionnistes, ils réactivent un rapport combatif à la politique, l’affaire de tous, des blasés comme des insurgés.
Citoyens résistants d’hier et d’aujourd’hui, Les Jours heureux (…) (La Découverte, 204 pages, 14 euros)
La Désobéissance éthique, enquête sur la résistance dans les services publics, d’Elisabeth Weissman (Stock, 356 pages, parution le 7 avril).