Celui qui finira officiellement son bail de sélectionneur national le 31 juillet prochain s’apprête à redevenir formateur. Un scénario que certains membres des instances du football français ne voient pas d’un bon œil: ils préfèreraient licencier Domenech. Mais cela pourrait se révéler coûteux.
Raymond Domenech, persona non grata du football français ? C’est une situation qui pourrait être officialisée vendredi 23 juillet, date à laquelle doit se réunir le conseil fédéral de la Fédération française du football. Les sages de la « 3F » devront ce jour-là statuer sur l’avenir de celui que l’on accuse d’être le principal responsable du fiasco des Bleus en Afrique du Sud. Et autant le dire tout de suite : pour Raymond, ça sent un peu le roussi. Autrement dit, ça pue le licenciement…
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Mardi, le journal espagnol As a publié une information selon laquelle Domenech envisagerait de réclamer deux millions d’euros d’indemnités, reprochant à la FFF d’avoir déjà nommé Laurent Blanc à un poste que lui-même occupe jusqu’au 31 juillet. Contacté par Les Inrocks, son avocat et la FFF ont démenti une telle information. Mais une autre raison pourrait pousser Domenech à réclamer des indemnités, dans le cas où il serait licencié.
La piste du licenciement pour faute grave
Après le 31 juillet, date de la fin de son contrat, le vieux Ray sera déchargé de sa fonction de sélectionneur. Mais il restera salarié de la « 3F », puisqu’il retrouvera le poste de membre de la Direction technique nationale (D.T.N.) qu’il avait quitté en juillet 2006, au moment de prendre les rênes de l’équipe de France. En clair, Domenech quittera son CDD de sélectionneur pour retrouver son CDI au sein de la « Fédé » (Raymond Domenech a intégré les rangs de la DTN en 1993). A ce poste, il devrait prendre en charge la formation des futurs entraîneurs français.
Voir Raymond Domenech retrouver confortablement son corps d’origine, voilà une idée battue en brèche par plusieurs membres du conseil fédéral de la Fédération. Pour ces huiles du football, il est invraisemblable d’offrir une issue de secours à l’homme du Pezula.
Une seule solution alors : son licenciement.
« Il est censé assurer la formation des entraîneurs mais aussi des éducateurs et des joueurs. En un mot, il représentera des personnalités convenables (…) en terme d’exemplarité. L’ex-sélectionneur ne peut prétendre à ce poste (…). Sans hésitation, je prône la rupture de son CDI au sein de la fédération » tonne Guy Chambily, sur le site du Monde.
L’homme est un des membres les plus anciens du conseil fédéral et est un célèbre détracteur de Raymond Domenech (il n’avait pas voté sa reconduction au poste de sélectionneur en 2008 et avait appelé à sa démission en novembre 2009). Plusieurs autres membres du conseil fédéral comme André Rousselot ou Christian Teinturier abondent aujourd’hui dans le sens de Guy Chambily.
Quel pourrait être alors le motif de ce licenciement ? « La piste est de licencier Raymond Domenech pour faute grave et de prendre le risque de porter l’affaire devant les Prud’hommes », répond Guy Chambily. Un licenciement de ce genre arrangerait bien la Fédération, puisque cette procédure ne lui coûterait pas un sou. La « faute grave » pourrait avoir été commise par Raymond Domenech au moment de lire la lettre des Bleus expliquant leur refus de s’entraîner. « Il y a un souci. Raymond Domenech est le premier salarié de la Fédération. Comment peut-on sciemment égratigner son entreprise ? » s’interroge Christian Teinturier, toujours sur le site du Monde. Plus globalement, Guy Chambily reproche à Domenech « sa persistance à donner une mauvaise image de la Fédération (…) M. Domenech a joué à l’autocrate. »
Une procédure que la Fédération pourrait payer cher
Damien Dusquet, avocat et spécialiste du droit du travail prend le contre-pied de la Fédération.
Selon lui, le Tribunal des Prud’hommes pourrait très bien invalider l’idée d’un licenciement de ce genre dans la mesure où la 3F prend ici pour prétexte une faute commise pendant le CDD (pendant que Domenech était sélectionneur national) pour justifier la rupture d’un CDI. Or la logique voudrait que le CDI de Domenech soit rompu pour un écart réalisé sous ce régime. Le problème, c’est que dans le cadre de ce contrat à la DTN, Domenech n’a rien à se reprocher.
Si le Tribunal des Prud’hommes décidait de qualifier l’éventuel licenciement de Raymond Domenech d’ »injustifié », la Fédération serait contrainte de le licencier moyennant finances. Ainsi va le Code du Travail. Domenech pourrait réclamer des dommages et intérêts au titre de rupture de CDI injustifiée. La valeur des ces dommages et intérêts correspond au minimum à six mois de salaire brut pour deux ans d’ancienneté, mais cela peut augmenter en fonction cette dernière.
Un licenciement à 1,7 million d’euros ?
Sachant que Domenech est salariée de la FFF depuis 1993, il serait en droit de demander l’équivalent de deux ans de salaire, soit 1,5 million d’euros (24 mois multiplié par son salaire mensuel des douze derniers mois, 45 000 euros). Domenech serait aussi en situation de réclamer des indemnités de préavis, puisqu’il pourrait être licencié rapidement. Ces indemnités compensatrices fixées à trois mois de salaire lui rapporteraient pas moins de 150 000 euros. Enfin, le sélectionneur pourrait demander des indemnités de licenciement. Le montant de ces dernières est calculé sur la base d’un cinquième d’un mois de salaire multiplié par le nombre d’années d’ancienneté. Raymond Domenech pourrait donc récupérer environ 90 000 euros.
Au total, le licenciement de Raymond Domenech pourrait coûter près d’1,7 million d’euros à la Fédération (à condition donc que l’affaire soit portée devant les Prud’hommes et que la décision de justice leurs soit défavorable). Reste à attendre la décision du conseil fédéral, le 23 juillet.
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