Au Congrès de l’Association des maires de France (AMF), mardi après-midi, François Hollande a reconnu la « liberté de conscience » des élus concernant le mariage des couples de même sexe. Il a rappelé que les maires « auront, si la loi est votée, à la faire appliquer » tout en précisant que les « possibilités de délégation [d’un maire à ses adjoints, ndlr] existent et qu’elles pourront être élargies ». Des déclarations perçues par beaucoup comme une marche-arrière sur le projet de loi concernant le mariage gay. Explications avec Gilles Wullus, rédacteur en chef du magazine Têtu.
Comment avez-vous réagi aux déclarations de François Hollande devant l’Association des maires de France ?
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J’ai été très choqué qu’il leur donne la liberté de conscience. C’est comme si demain on autorisait un maire raciste à refuser de marier un homme noir et une femme blanche. C’est anti-républicain et contraire à ses engagements. C’est, en plus, une des premières prises de parole de Hollande sur la question. Ça annihile presque l’effet positif que cette loi devait apporter à la communauté homosexuelle.
Ces déclarations vous ont-elles surpris ?
Oui, car François Hollande a toujours soutenu cette mesure. En disant cela, il donne des gages aux opposants, ce qui ne s’explique que par opportunisme politique. Pendant des années, le PS n’a jamais faibli sur son soutien à cette mesure. Il y a aujourd’hui une majorité pour voter ce projet de loi. Ces déclarations sont donc un grand aveu de faiblesse.
François Hollande est-il personnellement en faveur de cette loi ?
Il y a une rumeur qui est partie d’un article du Parisien. Le journaliste citait un proche du Président qui affirmait que François Hollande n’était pas « convaincu de tout ça ». Je pense que le proche en question est peut-être Bernard Poignant, maire de Quimper et vieil ami du président, connu pour être un catholique opposé à cette mesure. Je ne crois pas que François Hollande, lui, soit réticent. C’est un politicien. Il pense que cela sera plus facile de faire passer une loi s’il donne des gages à ses adversaires. Mais le propos est davantage destiné aux maires de gauche. Il n’a pas besoin des élus de droite car il y a une majorité au Parlement. On sait que certains maires de gauche peuvent avoir des « problèmes de conscience » qui, selon moi, sont de la simple homophobie. Calmer les élus locaux a toujours été un grand soucis de l’exécutif.
>> Signez la pétition : « égaux, ni moins ni plus »
Y a-t-il un lien, d’après vous, entre cette déclaration et les mobilisations du week-end dernier ?
J’aimerais penser que non. C’est surtout un thème qui agite les maires. Et en soi, les manif n’étaient pas si massives que ça. Quand on voit que les partis de droite et les catholiques mobilisent et qu’ils n’arrivent qu’à 100 000 personnes environ, ce n’est pas énorme.
Cette déclaration peut-elle mettre en péril le projet de loi ?
C’est un coup de feu monstre sur l’avancée du projet. On sait qu’il est dans sa version minimale, si en plus on concède une liberté de conscience, il y a à craindre que la majorité ne soit pas très solide pour le défendre bec et ongles. J’espère que cette déclaration va mobiliser les partisans du mariage ! Depuis un mois et demi, la majorité laisse la parole aux antis qui ont un boulevard devant eux.
Auriez-vous souhaité que la manifestation de dimanche soit interdite ?
Je ne suis pas pour interdire les manifestations. Après tout, ces manifs permettaient à la société de voir qui sont ces gens et quels sont leurs slogans.
Pensez-vous que la loi va être votée ?
Il n’y a pas de raison qu’elle ne le soit pas si le gouvernement tient la ligne qu’il a choisie. Et la majorité est solide.
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