Quatre ans après le suicide, à 26 ans, d’Aaron Swartz, un ouvrage rassemble les écrits de ce hacker et activiste. Ses textes, d’une profonde acuité et toujours d’actualité, sont empreints d’un sens aigu de la justice sociale.
“Dès son plus jeune âge, Aaron a éprouvé un sentiment de liberté qui restera à jamais étranger à la plupart d’entre nous : cette liberté toute simple de faire ce que l’on croit être juste.” Ainsi Lawrence Lessig, professeur de droit à Harvard et candidat éphémère à la primaire démocrate de 2016, décrit-il son ami et protégé Aaron Swartz, en introduction à Celui qui pourrait changer le monde (éditions B42).
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Cette liberté dont parle Lessig traverse les écrits de Swartz, posts de blog, extraits de conférences ou pamphlets politiques rédigés dès l’adolescence et rassemblés dans cet ouvrage unique, héritage éclectique du génie précoce de l’informatique.
Invention des licences Creative Commons
On connaît surtout Aaron Swartz, “l’enfant du net”. A 14 ans, le jeune Américain participe à la création des flux RSS. Quelques années plus tôt, il avait inventé, seul dans sa chambre, l’ancêtre de Wikipédia. Plus tard, il jouera un rôle décisif dans l’invention des licences Creative Commons et du site communautaire Reddit.
Fervent défenseur de la “culture libre”, Aaron Swartz signe une série d’articles brillants consacrés à son combat pour l’information et la connaissance, dont le célèbre “Manifeste pour une guérilla en faveur du libre accès”, cause principale des poursuites engagées contre lui par le FBI et qui le conduiront au suicide en 2013 avant la tenue de son procès.
Héritier de Noam Chomsky
Mais on découvre aussi dans cette somme ses puissantes réflexions sur la société contemporaine, qui révèlent toute la force de sa pensée. En 2009, à l’aube des révélations de WikiLeaks et de l’affaire Manning, Swartz s’érigeait déjà contre le mirage de la transparence : “Si les citoyens ne jouissent d’aucun pouvoir de contrôle, les bases de données les plus accessibles du monde ne contribueront aucunement à ce que la situation s’améliore.”
Héritier de Noam Chomsky et d’Ezra Klein, Aaron Swartz était avant tout un intellectuel engagé, doté d’un sens aigu de la justice sociale. Du brûlot contre la scolarisation, écrit à 14 ans, à l’analyse des rouages – fondamentalement antidémocratiques – du Congrès américain, l’ouvrage donne à lire tout le génie précoce d’Aaron Swartz.
Ton vif et acéré
Politique, médias, culture, éducation : son ton vif et acéré n’épargne aucune institution, dont la critique ne sert qu’à défendre l’idéal d’un monde meilleur auquel il aspirait dès son plus jeune âge. D’une remarquable intelligence, ses essais sont aussi efficaces que simples à lire, grâce au style clair et intelligible du jeune geek.
“La vraie question n’est pas de savoir quel effet a eu le travail que l’on a accompli, mais à quoi ressemblerait le monde si on ne l’avait jamais accompli”, peut-on lire dans le texte qui conclut l’ouvrage, intitulé “Héritage” et écrit à seulement 19 ans. Gageons que le sien dépassera le cercle de l’internet libre dont il est déjà – à juste titre – le héros.
Celui qui pourrait changer le monde d’Aaron Swartz (Editions B42), 320 pages, 23 €
{"type":"Banniere-Basse"}