Le Musée d’Art Moderne de Francfort, en Allemagne, accueille « I AM A PROBLEM » : une exposition trans-disciplinaire se focalisant sur l’engouement et l’obsession pour la beauté, aussi bien pour les femmes que pour les hommes.
Un jour, en buvant une coupe de champagne, la célèbre cantatrice grecque Maria Callas a avalé un œuf de ténia. Une fois l’œuf éclos, le ver solitaire ou parasite a grandi dans son corps et a ingéré une partie de ce qu’elle mangeait. La diva a perdu beaucoup de poids, une cinquantaine de kilos, pour arriver à son chiffre de rêve.
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Cet effort intransigeant que Callas s’est infligé pour améliorer son apparence est au cœur de l’exposition « I AM A PROBLEM », présentée au Musée d’Art Moderne de Francfort. « Pour moi, c’est la quintessence d’une intrusion brutale dans son propre corps afin de répondre aux conceptions de beauté de la société », explique Ersan Mondtag, commissaire de l’exposition allemande. « I AM A PROBLEM » s’organise justement autour de l’estomac de Maria Callas : un énorme ténia noir dans lequel les visiteurs peuvent partiellement se promener. Le ver, une sculpture pneumatique développée spécialement pour l’expo, serpente tout le hall du MMK. Une installation sonore semblable aux bruits de l’estomac accompagne les visiteurs. D’une partie d’intestin à une autre, ils deviennent eux-mêmes des parasites dans l’espace.
La poursuite de la perfection
Pour la première fois, le musée collabore avec le réalisateur, metteur en scène et scénographe Ersan Mondtag pour développer une exposition à la frontière entre les arts visuels et le théâtre. Le parcours scénique commence avec la légende de Maria Callas, puis les œuvres de la collection MMK deviennent à leur tour des protagonistes de l’exposition. Mondtag leur donne des voix, leurs discussions tournent autour de questions existentielles : la transformation de sa propre identité, la poursuite de la perfection ou encore le caractère éphémère de la matière organique. Elles parlent de la douleur, de la mort, de l’amour, de la destruction et du sexe.
L’exposition est en deux temps : l’effort, puis la désintégration de son propre corps. Comment expliquer la popularité de la chirurgie esthétique, des régimes alimentaires restrictifs, des salles de sport, du selfie ? Par la mise en scène de l’exposition, on comprend comment les métamorphoses corporelles deviennent des symboles de tendances, tant au niveau individuel que sociétal. Le corps est vu comme une zone à problèmes. L’installation de Mondtag invite à un voyage sauvage à travers l’existence humaine, en mettant en évidence les schémas identitaires contemporains allant des objectifs grotesques d’améliorer son reflet dans le miroir à la destruction physique du corps.
« La société de consommation est conçue pour un type de corps particulier »
Partant du principe que nos corps sont en permanence soumis à un idéal de beauté, Ersan Mondtag réalise un couloir accessible à certaines personnes seulement. Il faut s’y faufiler pour pénétrer dans la pièce suivante : « La société de consommation est conçue pour un type de corps particulier, et seul ce type de corps peut en récolter les fruits. Ce qui est aussi une forme de discrimination. »
Le culte du corps et la quête de la perfection qui poussent parfois à modifier douloureusement le corps humain pour répondre à des critères de beauté, conduisent à l’agression, au fanatisme et à la violence. Tous sont présents dans l’exposition de Mondtag : comme le parasite décompose inlassablement Maria Callas, les occupants des corps sont en guerre avec eux-mêmes et avec leur environnement.
« I AM A PROBLEM » d’Ersan Mondtag, au MMK 2 Musée d’Art Moderne de Francfort, jusqu’au 18 février 2018.
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