Le génial Acte III de Kentucky Route Zero, des RPG japonais pour jouer à la marchande ou au cartographe et le serious game vu par France Télévisions : l’actualité vidéoludique de la semaine par Erwan Higuinen.
Jeu de la semaine : Kentucky Route Zero, Act III
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Et si l’œuvre la plus impressionnante du moment, tous modes d’expression confondus, était un jeu vidéo ? Et même un jeu indé, à tout petit budget, conçu par les Américains Jake Elliott et Tamas Kemenczy. On avait déjà adoré les deux premiers « actes » (ainsi que les deux interludes follement expérimentaux, Limits & Demonstrations et The Entertainment) de Kentucky Route Zero (Cardboard Computer, PC et Mac, 23 € pour la « saison » complète), sorte d’épopée bluegrass lo-fi, très écrite et un rien surréaliste, qui ressemble à ce que le jeune David Lynch aurait pu faire s’il s’était lancé dans le jeu vidéo. Mais son Acte III dépasse en tous points les précédents : par son audace, sa variété, son assurance, son humour… C’est un jeu libre, qui ne craint pas de passer d’une scène de concert semi-interactive (et très émouvante) dans un bar sur le point de fermer à une relecture claustrophobique des jeux d’aventure textuels d’antan pour ensuite nous emmener visiter une distillerie assez spéciale. Tout en abattant tranquillement les frontières du médium, Kentucky Route Zero redéfinit la notion même de joueur. Ce peut-être un lecteur, un spectateur, un acteur (la seule « performance » attendu de nous est de nature quasi-théâtrale), un co-metteur en scène. Le résultat est étonnant, accueillant et fort, radical et beau. Tout le monde devrait jouer à ça.
Japon (1) : Etrian Odyssey Untold : The Millenium Girl
En chaque amateur de jeux de rôle sommeille un cartographe qui enregistre mentalement la configuration des forêts et donjons visités et ne demande qu’à en fouiller les moindres recoins. La série japonaise Etrian Odyssey, qui s’offre avec Untold : The Millenium Girl (Atlus, 3DS, 40 €) un remake de son premier volet, réveille ce cartographe et le propulse au premier plan. Ici, c’est le joueur lui-même qui, aidé de son stylet, doit dessiner tout en les explorant le plan des labyrinthes grouillants de monstres (et néanmoins joliment bucoliques) qu’il parcourt au fil de ses missions. Mieux : c’est la véritable priorité de son aventure. Et ça change à peu près tout dans la manière dont on appréhende l’espace, qu’on devine, qu’on lit, qu’on s’approprie. Plus accessible que les précédents, cet Etrian Odyssey Untold est sans doute le meilleur épisode pour s’y essayer.
Japon (2) : Hometown Story
Dérivé de la saga Harvest Moon qui, mêlant jeu de rôle et simulation type Sim City, nous invite depuis 1996 à jouer les exploitants agricoles en milieu outrageusement kawaii, Hometown Story (Toybox / Rising Star, 3DS, 40 €) en reprend les principes (communauté paisible, alternance entre boulot, quêtes et papotages) pour les transposer à la gestion d’un petit commerce de village. Moins éreintant que son aîné (où les journées à la ferme sont extrêmement chargées), il a l’avantage de nous laisser un peu plus libres de nos mouvements mais il lui manque quelque chose, le charme, la personnalité d’Harvest Moon qui, malgré sa lourdeur occasionnelle, trouve souvent le moyen de se montrer piquant, surprenant. Le travail, quel ennui, semble aujourd’hui nous dire Hometown Story, gentiment subversif malgré lui.
Gratuit : Jeu d’influences
Après Arte, France Télévisions se met au serious game (en ligne, gratuit) avec Jeu d’influences, fiction interactive en six (courts) chapitres dérivée du diptyque documentaire sur la communication de crise diffusé le 6 mai sur France 5. Nous voilà dans la peau d’un industriel confronté au suicide d’un de ses collaborateurs et, bientôt, à des rumeurs de pollutions. Guidé par un expert en com’, il (c’est-à-dire nous) doit faire des choix (« oui » ou « non », surtout), écartelé entre principes éthiques et volonté de détourner les soupçons. Bien qu’un peu limité ludiquement, Jeu d’influences se révèle très pédagogique et renvoie astucieusement à des faits d’actualité réels. Le coup d’essai est à saluer.
En bref :
Nouveau salon organisé à Nîmes les 24 et 25 mai et consacré aux cultures numériques, Pix&Tech réservera une belle place au jeu vidéo avec une sélection de nouveautés, un espace retrogaming, des tournois d’esport, des serious games et un alléchant Festival du jeu indépendant.
Après avoir remporté un succès amplement mérité sur iPhone et iPad, le très beau Monument Valley (Ustwo, 3,59 €) vient de débarquer sur les boutiques en ligne Android et Kindle Fire. L’entretien accordé par ses auteurs au magazine britannique Edge mérite par ailleurs le détour.
On sait peu de choses sur Red Goddess du studio espagnol Yanim, si ce n’est qu’il s’annonce très joli, qu’il séduit sur Kickstarter et que certains de ses créateurs étaient derrière Deadlight. C’est suffisant pour suivre l’affaire de prêt.
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