Une journaliste décrit la situation dans laquelle vivent plusieurs familles dans un immeuble vetuste à Saint-Denis (93). L’occasion pour les différentes personnes qui se mobilisent de remettre la lumière sur ce cas d’urgence et interpeller la préfecture.
« J’ai chialé pendant une heure tellement ce qu’on inflige à ces familles est immonde », écrit Laura Wojcik sur Twitter dimanche 23 juin. Cette journaliste, en reportage à Saint-Denis (93), est interpellée par l’état d’un immeuble. Elle publie une quinzaine de photos montrant des murs dévorés par la moisissure, des installations électriques dangereuses et des trous dans les sols et les plafonds. Privées de courant depuis mars 2018, les familles habitant ce bâtiment vétuste ont alerté la mairie mais la situation n’a toujours pas été réglée. Trois familles ont été relogées, selon la Ville, mais d’autres continuent à vivre dans ces conditions car elles n’ont pas un profil leur permettant de bénéficier du Droit au logement opposable (DALO).
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La petite fille de 1 an que vous apercevez sur cette image vit au milieu de la moisissure, ses parents tentent tant bien que mal de prendre soin d’elle dans cet enfer d’humidité 3/16 pic.twitter.com/KYLjPu8Pig
— Laura Wojcik (@LauraWoj1) June 23, 2019
Tant ce qu’elle a vu lui a paru « abominable », Wojcik alerte directement sur Twitter, avant même d’écrire son article. « Je n’ai jamais vu une telle misère, une telle indignité. On a l’impression d’être dans un film d’horreur », raconte-t-elle aux Inrocks. Alors qu’elle passait régulièrement devant cet immeuble, elle a décidé d’y entrer quand elle s’est aperçue que les habitants entreposaient des aliments sur les rebords des fenêtres.
Ah oui et à l’étage au dessus il n’y a même plus de sol, tout s’est effondré. Du coup les 4 personnes qui habitent là on couché des portes pour remplacer le parquet 8/16 pic.twitter.com/waVZDHIf8O
— Laura Wojcik (@LauraWoj1) June 23, 2019
Le député LFI de Seine-Saint-Denis Eric Coquerel admet être, lui aussi, sorti en pleurant la première fois qu’il a visité les lieux. « On n’imagine pas que des gens puissent vivre dans cette situation-là », nous dit-il. Il s’est rendu trois fois au boulevard Ornano à Saint-Denis pour voir si les conditions de vie avaient évolué. Très rapidement, il est entré en contact avec les autorités locales pour tenter de résoudre le problème. Avec le maire PCF Laurent Russier, Coquerel a envoyé une lettre à la préfecture de Seine-Saint-Denis en février pour demander que l’ensemble des personnes soient relogées afin d’assurer leur sécurité. D’après Mathilde Caroly, élue de la Ville chargée du logement, cette lettre est restée sans réponse malgré plusieurs relances. Elle a indiqué aux Inrocks que le procureur de la République avait également été interpellé.
LOGEMENTS INSALUBRES/ MARCHANDS DE SOMMEIL
10 bd Ornano, Saint-Denis
Des familles avec enfants en bas-âge vivant dans la moitié d’un local sans aération, à 600€/mois, une odeur d’humidité insupportable, les images parlent mieux que les mots.
↪️ https://t.co/ppzarDwXjJ pic.twitter.com/G7FVKRHrtR— Eric Coquerel (@ericcoquerel) February 11, 2019
Des locataires “doublement victimes”
Si la situation est si tendue aujourd’hui, c’est à cause de manœuvres immobilières. La mairie et Eric Coquerel affirment que le nouveau propriétaire – que nous n’avons pas pu contacter – aurait acheté l’immeuble en juillet 2018 « libre de toute occupation », autrement dit, comme si personne n’y habitait. Or, les résidents disent y être depuis plusieurs années, comme le précisait déjà Le Parisien en février. Leur bail n’a pas été renouvelé, ce qui les rend, selon Mathilde Caroly, « doublement victimes : d’un marchand de sommeil et d’expulsion ». En effet, sans aucun contrat qui les lie au propriétaire, ils peuvent se retrouver sans toit du jour au lendemain, surtout qu’ils sont plusieurs à ne pas pouvoir présenter les garanties nécessaires pour obtenir un nouveau logement. L’élue de Saint-Denis précise sa demande à la préfecture : « Nous voulons qu’ils soient pris en charge en hébergement d’urgence avec un réel suivi. »
Avant qu’il y ait des morts il faut agir. Voilà c’est tout. @Prefet93, @Elysee, @saintdenis974 vous avez déjà été sollicités à de nombreuses reprises. Vous avez déjà le dossier entre les mains. Laissez pas les gens crever dans la misère comme ça quoi 16/16
— Laura Wojcik (@LauraWoj1) June 23, 2019
Retweetée plus de 7 000 fois en moins de 24 heures, la journaliste Laura Wojcik interpelle également la préfecture sur Twitter : « Avant qu’il y ait des morts, il faut agir ». Nous avons joint la préfecture pour faire un point sur la situation mais elle n’a pas donné suite à nos sollicitations.
[Thread urgent] Je n’ai pas l’habitude de m’épancher sur mes reportages mais là j’ai vu l’indicible dans un immeuble de Saint-Denis. Ça dépasse tout ce que j’ai vu jusque là en termes de mal logement 1/16
— Laura Wojcik (@LauraWoj1) June 23, 2019
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