Leur pseudos : Abou Jean-René, Abufrancis alisreali ou Abou Dinblanc. Sur Twitter, des utilisateurs ont créé des faux comptes de combattants de l’Etat Islamique pour les tourner en dérision.
Face à la stupeur et à l’incompréhension que suscitent les départs en masse de Français vers la Syrie et les horreurs perpétrées au nom de Daech, certains ont choisi l’humour. Ils s’imaginent djihadistes ou recruteur pour l’équipe de football nationale de l’Etat Islamique, imitent les codes de langage des terroristes, et les ridiculisent à grands renforts de tweets dopés à l’ironie.
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Papa maman tkt la colo se pass bien gros bizoo pic.twitter.com/1VQhVgliEV
— Abou Dinblanc (@Abou_Dinblanc) December 11, 2014
Le rire plutôt que la peur
Des statuts Facebook vantant tous les avantages à rejoindre l’Etat Islamique, photos de combattants cheveux au vent et sourire aux lèvres : la propagande 2.0 menée par les terroristes a pris internet de court.
Clichés des derniers combats à Al Anbarr. pic.twitter.com/bcHCdNeikS
— Crush-Our Enemies (@CrushOurEnemies) December 12, 2014
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Cette guerre virtuelle, qui vise à séduire toujours plus de recrues, est teintée d’un surréalisme tel, qu’il a très vite inspiré les adeptes de l’humour noir partout dans le monde. C’est au Moyen-Orient que les premières publications visant à rire de l’Etat Islamique sont apparues. Dès le mois de juin, une émission palestinienne diffusait une vidéo satirique raillant l’hypocrisie et le ridicule des djihadistes. Au Liban un article ironique publié en août par le site Now prétendait que si les « idiots lèche-bottes des saboteurs islamistes » n’avaient pas encore complètement envahi le pays, c’était à cause d’un « bouchon de malade sur la route » menant à la frontière.
Dans le même temps, le hashtag #ISISmovies est apparu sur Twitter. Des utilisateurs publiaient des titres de films remaniés pour parodier la doctrine terroriste. Une initiative qui suscité des critiques mais qui a été défendue par Hend Amry, écrivaine américano-libyenne : « Parfois, on doit se moquer, rabaisser. Parce que parfois, être rabaissé est la plus grande peur de notre ennemi« .
The Usual Suspects Beheading Other Usual Suspects… #isismovies — Jake Turx (@JakeTurx) October 14, 2014
« 1 Shade of Black » #ISISmovies #AmessageToAmerica #AmessagefromISIStoUS #AMessagetoISIS #Raqqa #ISIS #ISISAttacksKobane — SaudiWomen Luv Stick (@Women_B_Driving) September 30, 2014
sometimes, you have to mock, to belittle. because sometimes, belittlement is your enemy’s greatest fear.
— Hend (@LibyaLiberty) August 16, 2014
Au Québec, Guy Perkins, photocaricaturiste pour le blog du Journal de Montréal publie quant à lui régulièrement des photomontages mordants.
On va l avoir ce Kenny. C est un juif en plus pic.twitter.com/DNix6ps6U2 — abufrancis alisraeli (@mik__rob) December 10, 2014
Tweet comme Abou Otman
En France aussi, on a commencé à rire de l’Etat Islamique. En octobre dernier, Sophia Aram imitait un djihadiste canadien et s’exclamait : « C’est pas parce qu’on fait la guerre sainte qu’on peut pas avoir du fun, du plaisir et de l’agrément! » dans un de ces sketchs sur France Inter.
Suite aux apparitions avérées ou supposées de plusieurs français dans des vidéos diffusées par le mouvement, les blagues semblent s’être multipliées sur Twitter. Comme pour amortir l’impact du choc. Un hashtag a même été créé en « clin d’oeil » à Mickaël Dos Santos, ce jeune homme de 22 ans originaire du Val-de-Marne qui se fait désormais appelé « Abou Uthman ». Particulièrement actif sur le réseau social, il a inspiré le hashtag #TweetCommeAbouOtman, qui consiste à tourner en dérision le ridicule du décalage culturel entre la vie passée de ces Français et leur engagement actuel.
Après l’effort le réconfort hmdl #TweetCommeAbouOtman pic.twitter.com/c0PuRza5oW
— Soldat sans grade ن (@MutotoJones) August 21, 2014
On etait tranquille posey ds le pick up, et la Abou Henry-Levy nous met un cd de Bruel, on a failli finir ds le fossé #TweetCommeAbouOtman
— Mehdi McNulty (@Mehdiamzgh) August 21, 2014
Parasiter le discours
Aujourd’hui, trois comptes de pseudos djihadistes sont particulièrement actifs : Abou Jean-René, Abufrancis alisreali ou Abou Dinblanc. Interrogé par France Info, l’homme qui se cache derrière le compte Abou Jean-René a expliqué n’être ni musulman ni islamophobe :
Les djihadistes, c’est un sujet qui m’intéressait. J’étais assez choqué par le contenu de ce que je voyais sur leur page […] ils font une propagande en expliquant que c’est formidable là bas. C’est assez déroutant. On peut tomber sur une photo d’égorgement dont ils sont très fiers, et cinq minutes après sur une photo d’éclair au chocolat pour montrer combien la vie est paisible là-bas. […] J’ai eu envie de réagir comme ça, tout simplement. Pour moi c’est un jeu, mon objectif est vraiment de les ridiculiser. […] Ils cherchent clairement à provoquer la colère. J’ai vu beaucoup de réactions de gens énervés, insultants, mais c’est ce qu’ils recherchent, ce n’est pas efficace. Le fait de les parodier, ça permet de se défouler autant qu’en se mettant en colère, simplement ça ne leur rend pas service du tout. […] ça parasite leur discours, c’est rigolo.
Ce compte lui a permis de rentrer directement en contact avec ceux qu’il appelle les membres d’une « secte nihiliste« . L’absence de distance que permet Twitter lui a donné l’impression de « mêler fiction et réalité« . « Leur réactions sont clairement hostiles. Ou alors ils sont indifférents.[…] Ils sont assez susceptibles. […] J’ai reçu des menaces d’égorgement. C’est une des raisons qui me poussent à arrêter. Ils sont complètement incontrôlables. »
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