Alors qu’Alexandre Benalla doit se rendre devant la commission sénatoriale, les échanges de plus en plus vifs entre le gouvernement et la présidence du sénat instaurent un climat tendu.
Alexandre Benalla et Vincent Crase doivent être entendus le mercredi 19 septembre par la commission d’enquête du Sénat. Alors que les deux hommes font l’objet d’une enquête judiciaire, les sénateurs devront prendre soin d’éviter d’aborder l’affaire du 1er mai au cours de la séance – sous peine de non-respect de la séparation des pouvoirs. L’Élysée et le gouvernement, depuis la semaine dernière, tirent à boulets rouges sur l’institution parlementaire tandis que celle-ci persévère. Dimanche 16 septembre, le président du groupe La République en Marche (LREM) au Sénat, François Patriat, a confirmé avoir l’intention de boycotter, ainsi que trois autres membres du groupe, la séance d’audition des deux anciens membres du cabinet présidentiel.
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« Mascarade » et « instrumentalisation politique«
Le président du groupe LREM au Sénat dénonçait donc ce dimanche sur franceinfo une « mascarade ». Critiquant la commission parlementaire, il s’en prend à « [ceux qui] veulent affaiblir le président et l’exécutif« . L' »affaire Benalla » n’est selon lui pas « prioritaire » pour le Sénat : « tout a été dit » à ce sujet. En des termes forts, il déplore que l’institution à laquelle il appartient soit « [tombée] bien bas« . La commission n’a pas pour tâche d’enquêter sur « l’affaire Benalla » ; elle n’en a d’ailleurs constitutionnellement pas le droit. La Garde des Sceaux Nicole Beloubet s’empresse de le rappeler dans une tribune parue dans Le Monde le 15 septembre. Le but de cette commission, Alain Richard, ancien ministre de la Défense et l’un des quatre sénateurs à boycotter la commission, le rappelle : « mieux analyser comment fonctionne la hiérarchie de l’Élysée ». Il s’agit, pour le pouvoir législatif, de connaître comment le président Macron procède à la réorganisation de l’état et notamment du dispositif sécuritaire qui entoure la présidence.
Tandis que Nicole Belloubet, déplore dans sa tribune une « instrumentalisation politique« , Christophe Castaner, délégué général de LREM, lors d’une conférence de presse le 14 septembre, a dit voir dans cette commission une tentative du Sénat qui « s’auto-attribuerait […] de contrôler l’exécutif et la présidence de la République« , il poursuit : « Si certains pensent qu’ils peuvent s’arroger un pouvoir de destitution du président de la République, ils sont eux-mêmes des menaces pour la République« . Ces déclarations, très virulentes, cinq jours avant la tenue de la séance, pourrait trahir une véritable agitation au sein de LREM. Autour de Gérard Larcher, président du Sénat, on déclarait à l’AFP jeudi 13 septembre ne pas comprendre « ces propos […] on ne cherche à destituer personne, comme le laissent entendre les propos extravagants de Monsieur Castaner. C’est méconnaître la Constitution« .
Contrôler l’exécutif
Le mardi 11 septembre, Emmanuel Macron avait appelé Gérard Larcher, semble-t-il par souci de maintenir l’équilibre constitutionnel alors que, selon lui, la commission s’en éloignerait. L’entourage du président du Sénat a confirmé cet appel au sujet de la commission d’enquête, sans en dévoiler précisément la teneur. L’Élysée a gardé le silence. À l’AFP, Dominique Rousseau, professeur de droit à l’université Paris-1, a rappelé : « Si des remontrances ont été faites au président du Sénat, elles sont du point de vue constitutionnel totalement inadéquates. Il y a là une atteinte à la séparation des pouvoirs« . Quoiqu’il en soit, les membres de la majorité s’emploient à défendre le président. Mme Belloubet écrivait dans sa tribune au Monde que « le président de la République, distinct constitutionnellement du gouvernement – et tout ce qui touche à la fonction présidentielle – ne saurait faire l’objet d’une commission d’enquête […] car cela reviendrait dans les faits à rendre le chef de l’État […] responsable devant le parlement« . François Patriat ne dit pas autrement lorsqu’il répète : « Le rôle du Sénat, c’est de contrôler le gouvernement, pas l’exécutif » – entendre, dans sa bouche, le président.
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