Pendant un an, trois journalistes ont mené l’enquête, en France, pour recueillir la parole des “sœurs”, ces femmes de l’ombre du jihad.
“Rester dans cet endroit-là, auprès de Daech, c’était mourir. Ces gens-là représentent la mort.” Ainsi débute le témoignage d’une des jeunes filles rentrées en France, rescapée de Daech. Longtemps dans l’ombre des hommes, les femmes jouent aujourd’hui un rôle-clé au sein de l’organisation de l’Etat islamique et sont au cœur de l’investigation antiterroriste.
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Après un an d’enquête, Marina Ladous, Roméo Langlois et Etienne Huver (les deux derniers prix Albert Londres) sont parvenus à obtenir des témoignages de “sœurs”, ces femmes parties rejoindre Daech et découvertes en France suite à l’affaire des bonbonnes de gaz le 8 septembre 2016. Parmi ces jeunes femmes, on retient le portrait d’Imane, 17 ans, arrêtée alors qu’elle prévoyait un attentat à l’arme à feu dans un quartier juif de Lyon. “Je voulais mourir en martyre”, explique-t-elle face caméra.
"L'islam, ça ne s'apprend pas sur Facebook." #Jihad
Ce soir 20h50 #EnvoyeSpecial pic.twitter.com/zVuPhiDvFR— Envoyé spécial (@EnvoyeSpecial) February 2, 2017
Faux profils Facebook
Pour récolter ces paroles précieuses, les journalistes ont utilisé l’outil de prédilection des jihadistes, à savoir internet. A l’aide de faux profils Facebook, ils se sont mis dans la peau de candidates au jihad fraîchement radicalisées et en rupture sociale. Ils ont ainsi rapidement intégré les réseaux jihadistes et ont pu échanger avec des recruteurs et des cadres de Daech.
Seulement dix-huit jours après la création de leurs profils, ils sont contactés par Rachid Kassim, un cadre français de Daech recherché par tous les services de renseignement occidentaux et soupçonné d’avoir commandité, depuis la Syrie, plusieurs attentats en France.
Un défi posé à la France
L’échange est furtif : “Tes papiers sont prêts ?” –“Oui, pourquoi ?” – “Pour préparer ta hijra” (le départ en zone irako-syrienne). Quelques jours plus tard, via l’application cryptée Telegram, Kassim leur propose un mariage “pour faciliter leur passage”, étape indispensable pour les femmes, dont le rôle premier reste de renouveler les générations de combattants. Encore une fois, le message est direct : “Ce qu’il faudra que t’apprennes à faire, c’est à obéir au doigt et à l’œil.”
A l’aide de témoignages rares mais aussi d’images d’archives inédites, ce documentaire offre un nouveau regard sur le jihadisme. On comprend ici que le sort de ces revenantes est un nouveau défi posé à la France. Malheureusement, sous l’effet des menaces et des traumatismes de l’embrigadement, rares sont les repenties de Daech à oser briser l’omerta.
Manon Michel
Envoyé spécial : Les Sœurs – Les femmes cachées du djihad documentaire de Marina Ladous, Roméo Langlois et Etienne Huver. Jeudi 2, 20 h 55, France 2, puis en version plus courte à 0 h 15 sur France 24
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