IBM a présenté un ordinateur doué de la parole et capable de répondre, arguments
à l’appui, à une question compliquée. Verra-t-on un jour des robots philosophes ?
Il suffit de lui poser une question d’une voix haute et claire. Immédiatement, Watson (c’est son nom) digère, calcule, fouille des milliers de pages Wikipédia, des articles de journaux en ligne, mixe toutes ces informations, crée des passerelles entre elles, en extrait les tenants, arrache les aboutissants – tout ça ne lui a demandé que quelques secondes – et finalement lâche sentencieusement sa réponse argumentée.
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Mis au point par IBM, Watson n’est pas nouveau. Une version moins sophistiquée avait remporté haut la main en 2011 le jeu télé américain Jeopardy!. Et il progresse d’année en année. La dernière évolution de l’ordinateur a été présentée récemment, rapporte le site Usbek & Rica. Il est donc maintenant capable de répondre à une question de société complexe sur la violence dans les jeux vidéo ou les engagements militaires américains (les exemples proposés par les concepteurs lors de sa présentation). Il en ressort un rapport technocratique soporifique.
« Qui sommes-nous ? », « d’où venons-nous ? »
Mais le robot apprend vite. Il va s’assouplir, intégrer et manier des concepts plus compliqués encore et nous donnera bientôt son analyse de l’intersubjectivité chez Kant. Le robot philosophe est en marche. Quand il sera au point et aura résolu quelques questions d’importance – « qui sommes-nous ? », « d’où venons-nous ? » – qui tournent en boucle depuis des siècles dans les cerveaux de nos penseurs, on installera sur chaque place de village un modèle bien designé de Watson. Assis, la tête baissée, le poing sur le menton. Sous le soleil, la pluie, la neige, il attendra les citoyens avides de partager avec lui leurs doutes métaphysiques. Il délivrera ses conseils de vie à qui voudra en évacuant parallèlement, de sa main libre, les bêtes affaires courantes et administratives pour gérer la ville. Interrogé sur le sujet, le philosophe humain Michaël Foessel fait preuve d’optimisme et ne craint manifestement pas trop pour son job pour l’instant, parce que, dit-il, il se méfie « moins des machines qui pensent que des hommes qui pensent comme des machines ». Mais il ajoute : « Enfin, j’imagine que l’un ouvre sûrement la voie à l’autre. »
Dans le visionnaire et indispensable Guide du voyageur galactique, Douglas Adams imaginait avant l’heure un superordinateur, baptisé Pensées profondes, chargé de répondre à la Grande Question sur le sens de la vie, de l’univers et du reste. Au bout de plusieurs millions d’années de calcul, lors d’une grande cérémonie mondiale, l’ordinateur livrait cette réponse définitive et sans appel : « 42 ». C’était sa réponse. Seule la question, la bonne, manquait. Il faudra donc reprogrammer encore ce pauvre Watson pour qu’il arrête un peu de répondre aux questions et commence à en poser.
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