« Les minorités font la cuisine, les Blancs parlent de politique »: Rokhaya Diallo critique « C à vous « 

« Dans C à vous, il y a effectivement une personne d’origine maghrébine et une personne noire, mais elles font la cuisine pendant que des Blancs parlent de politique ». La phrase est lancée par la journaliste Rokhaya Diallo sur RMC lundi matin.

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Sur le plateau, les réactions fusent : « Comment osez-vous dire ça ? » lui demande l’un des chroniqueurs. La militante anti-racisme, entre les voix qui s’élèvent autour d’elle, parvient à développer un peu son argumentaire : « Je trouve qu’en termes de symboliques, ça dit quand même des choses sur la place qu’on réserve aux minorités en France. » Sur Twitter aussi, les réactions sont immédiates :

Qqn peut-il expliquer à @RokhayaDiallo que la cuisine n’a rien de dégradant. Au contraire, c’est noble. #TweetPrecedent cc @cavousf5 @GG_RMC

— Julien Migaud-Muller (@jul_mm) 2 Novembre 2015

Putain mais c’est pas possible de tenir des propos comme ça. Folie totale. pic.twitter.com/q6CiDhNx56 — Antoine Lvq (@Antoine_Lvq) 2 Novembre 2015

Après la diffusion de l’émission, Rokhaya Diallo ne se démonte pas. Sur son blog, elle poste un billet intitulé « J’assume », et explique plus longuement ce qui justifie ses propos. Elle rappelle en premier lieu qu’elle n’a jamais qualifié de « dégradant » ou « dévalorisant » le fait de faire la cuisine :

« Rien dans mon affirmation ne remettait en cause les compétences, ni le mérite de Babette de Rozières ou d’Abdel Alaoui dont les talents ne sont plus à démontrer. »

Le vrai problème qu’elle souhaitait soulever par cette phrase qui dérange, explique-t-elle, c’est qu’ « en 2015, en France, il est encore possible de composer des plateaux de télévision exclusivement blancs », ce qui est en effet le cas à C à vous…

Une représentation encore faible des minorités

Le baromètre de la diversité de la vague 2014, publié par le Conseil Supérieur Audiovisuel au début de l’année, soulignait d’ailleurs un recul de la part des personnes « non blanches » présentes sur les chaînes de la TNT. De 16% en 2013, elle est passée à 14% l’an dernier. Un taux qui reste encore bien faible, et qui vient soutenir les remarques de Rokhaya Diallo. Celle-ci, en prenant comme exemple les « symboliques » transmises par C à vous, met également en avant non seulement le problème de la part de représentation des personnes non blanches, mais également les « rôles » qu’on leur donne à la télévision, détaille-t-elle sur son blog :

« Je soulignais simplement le fait qu’il existe aujourd’hui en France des domaines dans lesquelles les personnes non blanches étaient autorisées à déployer l’étendue de leurs qualités pour atteindre des sommets, comme dans le sport ou la musique mais que d’autres perçus comme plus ‘sérieux’, ‘intellectuels’ et socialement très valorisés restaient désespérément hermétiques à leur savoir faire ».

Là encore, les chiffres du CSA viennent étayer son discours. Dans certains genres, comme la fiction, le divertissement ou le sport, les personnes non-blanches sont davantage représentées que dans les magazines, les documentaires, ou les informations. Et dans chacun de ses domaines, leur part est restée stable, voire a baissé entre 2013 et 2014.

Le principe de l’émission C à vous, rappelons-le, est d’inviter des personnalités à dîner. Dans cette logique, des cuisiniers officient à côté des chroniqueurs. Rokhaya Diallo, proche des Indivisibles, est une habituée des polémiques, comme cette pétition « pour la défense de la liberté d’expression, contre le soutien à Charlie Hebdo » à la suite de l’incendie des locaux du journal en 2011. Avec Audrey Pulvar et Lilian Thuram, elle était aussi en Une de Respect mag en octobre 2011, sous le titre « 100% Noirs de France ».

Delphine Ernotte elle-même, lors d’un colloque organisé par le CSA le mois dernier, a reconnu que France Télévisions, « n’était pas toujours exemplaire » en terme de diversité. Le Monde rappelait alors que la nouvelle directrice du groupe public avait déclaré : « On a une télévision d’hommes blancs de plus de 50 ans, et ça, il va falloir que cela change ».