Après avoir bloqué les Jeunes pop pendant un an, l’UMP semble enfin s’intéresser à ses jeunes : une direction collégiale entre fillonistes et copéistes devrait voir le jour lundi prochain. Objectif municipales pour mieux reconquérir la France.
« Les gaullistes ont une facilité à se déchirer. Mais quand l’avenir de la France est en jeu, ils chassent en meute. » Si Jérome Lavrilleux, le directeur de cabinet de Jean-François Copé, cite Malraux, c’est qu’il entend bien marquer les esprits des deux cents jeunes réunis au siège de l’UMP, jeudi dernier. Pourtant, la formule ne manque pas d’ironie.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Voilà en effet plus d’un an que les Jeunes populaires n’ont pas été rassemblés. Et la faute incombe entièrement aux ténors de l’UMP. Alors que le deuxième mandat du médiatique Benjamin Lancar prenait fin, dès août 2012, le scrutin pour la présidence des fédérations jeunes avait été repoussé à janvier 2013. Par courtoisie pour les aînés, supposés décider de leur présidence ce lundi.
Mais c’était sans compter sur la guerre Copé/Fillon, les voies perdues de Wallis-et-Futuna, et les Cocoe et Conare, ces commissions bien-nommées. Empêtrée dans sa propre guerre des égos, la direction du parti a alors demandé aux jeunes candidats (quatre fillonistes et deux copéistes) de remiser leurs ambitions au placard, histoire de ne pas étaler davantage les dissensions internes.
“C’est le vide intersidéral”
“C’est tragique, se lamente Mickaël Camilleri, 27 ans, ex-candidat fillonniste et actuel directeur de cabinet de l’ex-député Georges Mothron. C’est le vide intersidéral : l’intégralité de la machine jeune a été détruite. On n’a plus de président depuis le 31 décembre, quand Lancar a démissionné pour intégrer l’Ena”. Ce qui laisse 18 000 jeunes de moins de 30 ans sans direction nationale depuis un an et autant de petites mains, prêtes à tracter sur les marchés pour les municipales.
“Pour ma génération, les 25-35 ans, je suis persuadé qu’on a loupé une fenêtre de tir historique pour les élections de 2014, peste l’ancien responsable de la formation des Jeunes populaires, toujours en colère. On aurait pu faire comme en 1983, quand le RPR est revenu en force après l’échec de la présidentielle, en mettant en avant de nouvelles têtes comme Balkany ou Devedjian. Aujourd’hui c’est le même contexte. Évidemment, il y a de nombreux jeunes candidats qui se sont présentés, mais soyons honnêtes, on les envoie au casse-pipe”.
Désabusé, Mickaël Camilleri lâche : “Il aurait fallu entamer un tour de France de toutes les fédérations dès le mois de mars, on aurait eu 300 nouveaux jeunes formés et prêts. Là, ça s’est fait de manière désordonnée. Cette machine me déprime complètement. Il y a une hypocrisie totale dans le discours, on appelle à une levée des jeunes en masse, mais on coupe la tête de ceux qui ne font pas partie du fan-club de Copé”.
Redéfinir le rôle de l’UMP
Purger les anti-Copé. Une hypothèse qui expliquerait pourquoi, un an après sa dislocation, aucune élection n’a été prévue pour reprendre l’organisation. “Ça ne sert à rien de remettre de l’huile sur le feu, justifie Pierre-Henri Dumont, 26 ans, copéiste et tête de liste à Marck dans le Pas-de-Calais. On a eu du mal à s’entendre mais l’accord fonctionne.”
D’ailleurs, on voit bien quelques fillonnistes à la réunion UMP Campus, une sous-structure des Jeunes pop dédiée aux étudiants. Ils ne sont pas surreprésentés, mais quand même. “Il y a une vraie demande de dynamisme de la part de tous les militants », assure Jonas Haddad, 25 ans, ex-candidat copéiste à la succession de Lancar et personnage omniprésent dès qu’on parle de jeunesse à l’UMP. “C’est important qu’on se retrouve, estime pour sa part Constance, 19 ans, étudiante à Nanterre. Il faut refaire un point sur l’UMP pour mieux focaliser sur 2017”.
>> A lire aussi : Mouvement des jeunes socialistes: l’école du vice
Les équipes locales encore en place
En attendant l’échéance présidentielle, les Jeunes populaires se cherchent une direction. “Le pays va mal, doit-on vraiment souffler sur les braises ?”, interroge un militant pendant la séance de questions-réponses. “Les jeunes veulent surtout savoir quel est le rôle de l’UMP dans l’opposition”, souligne Stéphane Tiki, responsable des nouveaux adhérents. Alors Lavrilleux tente de remonter le moral des troupes : “On est en train de rebâtir le corpus idéologique : on apprend en marchant” ; “le FN n’est pas nationaliste mais extrémiste. Nous n’avons rien en commun avec eux” ; “adhérer à un parti politique n’est pas une action passive”.
Étonnamment, et comme le remarque le bras droit de Copé à la fin de son intervention, les Jeunes pop n’ont pas posé la moindre question sur le fonctionnement interne ou le financement de l’UMP. Il n’y en a que pour la reconquête. Comme s’il leur tardait de remettre le pied à l’étrier. Même Camilleri est obligé de l’admettre : “les Jeunes pop sont en mort clinique au niveau national, mais les responsables départementaux jeunes arrivent encore à gérer leurs équipes. Le local a pris le relais”.
Enfin, ça dépend où. Si Pierre-Henri Dumont tient bien son antenne pas-de-calaisienne, en Haute-Garonne c’est une autre paire de manche, où Guillaume Brouquières, responsable départemental, a démissionné au grand dam de son équipe. Pour éviter d’autres déconvenues de ce type, qui pourraient miner la campagne pour les municipales, l’UMP a décidé de se réintéresser à ses jeunes.
Vers une direction collégiale
Mardi matin trônait ainsi la question des Jeunes pop dans l’ordre du jour du bureau national de l’UMP. À défaut de nommer un président en charge, une direction collégiale de l’organisation jeunesse a été évoquée. “Pour l’instant, il n’y a pas encore eu de calage avec Fillon sur l’ensemble de noms. Il doit encore déterminer ses candidats, explique Jonas Haddad. Lundi prochain, on devrait donc avoir un bureau transitoire paritaire avec autant de copéistes que de fillonistes”. Une solution avant un possible vote en 2015, date à laquelle le mandat du successeur de Lancar aurait dû s’arrêter.
Exit les ambitions personnelles des jeunes poulains UMP ? “Je vais essayer de conserver mon rôle d’impulsion, sourit Haddad. De toute façon, ce sera à celui qui travaillera le plus”. Les Jeunes pop vont peut-être avoir une direction collégiale, mais ils sont encore loin de la jouer collectif.
{"type":"Banniere-Basse"}