Après huit ans de réflexion, les Hot d’Or, soit l’équivalent du Mérite Agricole chez les professionnels de la braguette tendue, remettent sur le métier leur ouvrage. L’occasion de faire un état des lieux du X français.
Péniche River Palace quai de Javel, 20 h veille des Hot. The place to be pour tâter le pouls du X 2009 lors de la soirée presse avant le grand raoût. Plus facile d’approcher les stars d’hier ou d’aujourd’hui et de taper la discute. L’ambiance sans virer à l’orgie (à 23 h tous au dodo) y est aussi moins officielle, plus déconne et au fil des shootings apparaîtront quelques plans topless initiés par l’italienne Carla Nova…En fin de soirée, on verra même un hardeur nominé comme meilleur acteur français se soulager tranquillement direct dans la Seine depuis le bastingage en évoquant son possible absence à la cérémonie. « Tu vas encore te faire une comtesse de 75 ans ? » lui lance son pote. « Moins vieille mais c’est un peu l’idée et ça ramasse bien alors… » Pendant ce temps Coralie Trinh-Thi évoque sa nouvelle carrière d’auteur, son amour pour the Cure et se revendique comme « anti sexiste mais absolument pas féministe » HPG fera un passage express, tandis que John B.Root et son acteur fétiche Titof, les Truffaut et Léaud du X seront là jusqu’au bout. Leur camarade Seb Barrio, gai luron du X aussi. Après 13 ans de carrière et « un peu mal sur les côtés à force de donner des coups de reins » il va partir vers le one man show après déjà une dizaine de rôles habillés. « Il n’y a pas de souci, je peux toujours donner et j’ai tourné jusqu’à dix heures pour une scène avec Marco Salieri ou Pierre Woodman, mais j’ai toujours eu envie d’être acteur. » Tandis que l’exquise Estelle Desanges reconvertie en super ambassadrice de la com drive les filles de V Communiations pour les photographes, sur le pont le vétéran italien Roberto Malone rabroue vertement une caméra qui veut le filmer avec son amie. Sale tronche et membre du parti de la petite fille du Duce, on n’est pas pressés d’aller discuter avec ce gros macho pourtant incontournable du paysage X. John B. Root en revanche on brûle d’aller le questionner. Lui le rénovateur du genre un peu « désabusé de n’avoir jamais rien reçu malgré 16 ans de métier » regrette que la presse parle certes souvent de lui, « mais seulement quand je suis dans la peau du polémiste. Ils m’aiment quand je dis merde à Boutin, Baudis au CSA ou Dorcel. Mais ils ne regardent pas mes films. » Franc-tireur inventif, roi du X réaliste aux scénarios de proximité B.Root est sur la brêche 24/7. C’est ce speed permanent et surtout son site qui l’aident à boucler ses tournages. « Car être interdit de FNAC ou de Virgin ça n’aide pas financièrement. Du coup un Hot me donnerait quand même l’impression d’avoir bouclé la boucle » Demain il sera exaucé et tout ému : « Le porno est si beau quand il est sincère et pas réduit à des gymnastes sans sentiments ! Ca pourrait être le plus beau métier du monde » conclut celui qui fait ce job aussi « pour respecter le plaisir car je déteste me sentir méprisé quand je regarde du porno. »
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Nouvelle vague
Alors que les starlettes Angell Summers et Lou Charmel tout ce qu’il y’a de plus françaises malgré les pseudos s’exhibent gentiment devant les trophées exposées à la poupe, le jeune réal Dist de Kaerth (26 ans) distingue le Porno « scénique et masturbatoire » de la Pornographie « tout ce qu’il y’a autour » et s’enhardit à citer Platon « montrer ce qui n’est pas montrable » en louant les mérites de son prod. Max Noizet qui lui a « confié un budget de près de 30 000€ sur la seule foi de clips et de quelques photos. » Ce fils d’agriculteur dont le gonzo n’est pas la tasse de thé aura ainsi pu réaliser L’Enchanteresse « qui est le symbole du fantastique et de l’ésotérisme par lequel je tâche de faire passer des messages. Dans mon film je montre l’évolution de rapports de couples en mal ou en bien, mais il y’a une vraie psychologie. Je n’ai pas négligé le scénario. » Liza del Sierra, bordelaise piquante aux faux airs de Lily Allen -à airbags- a joué dans l’Enchanteresse. Elle approuve. A l’aise dans les scènes de comédie elle explique tout de go qu’elle « prend aussi des bites dans le cul ! » Pas la langue dans la poche du voisin Liza. « Oui mais je sais ce que je veux et après 4 ans dans ce milieu j’estime n’avoir plus rien à prouver. En plus je sais bien que le X ce n’est pas pour la vie. Dans deux ans je dis ciao bambino et je deviens consultante juridique. Et oui, j’étudie le droit par correspondance, mais moi je l’ai eue ma 2e année ! » Cette fan de Rose et Renan Luce, amie de Da Silva et engagée dans la lutte contre le racisme déplore aussi la frilosité ethnique du X français « où on ne produit pas de hard avec des blacks. Joachim le seul français sur le marché doit aller tourner à l’Est ! » Nominée deux fois, elle repartira bredouille malgré 100 films au compteur. Dans le milieu bien old school du X, quand on est une femme, il n’y’a encore qu’une seule raison de l’ouvrir !
X en fête
La salle Wagram est remplie au chausse-pieds pour le dîner et la remise des statuettes dans un contexte de ventes de DVD délicat et de prolifération du gonzo. Ces films, assemblages de vignettes hardcore sans scénario et l’accès gratuit du public aux contenus de type You porn sur le web désespèrent un peu Babylone. Pour Paul Jérôme, journaliste à Hot Video qui a planché sur les nominations à soumettre à ses lecteurs, OK la crise explique en partie que les statuettes -très vilaines, egypto-pompières- des Hot d’Or soient ressorties de la naphtaline mais pas seulement. « Personne n’a pris le relais ailleurs en Europe sur ce type de cérémonie. Et pour éviter la confusion dans l’esprit du public français avec tous les moyens de diffusion du X, on s’est dit qu’un retour des Hot d’Or aiderait à l’aiguillonner vers une sélection de films de qualité ». Après les présélections en deux tours et 25 000 votes sous contrôle d’huissier plus tard ces Césars du X arrivent à nominer jusqu’à 11 filles actrices européennes, 17 sites internets, 19 blogs d’actrices. Quelle profusion, il n’y’a que chez les mâles que le choix tombe à 7 ou 8 noms. Faute de performers à la hauteur, ce sont d’ailleurs à peu près les mêmes que lors des éditions 2000 ou 2001. Alors que les actrices ont été entièrement renouvelées. Et tout ce beau monde pose sur le tapis rouge sous les flashs de la presse, des invités et…du public qui pouvait se mêler pour un soir aux stars du X et assister au dîner pour la coquette somme de 249€ tout de même ! L’ambiance est au smoking décontracté, à la robe de soirée et au glamour mais reste assez pâlichonne et hétéro. On n’est pas trop United Colors aux Hot. Certes l’eurasienne Katsuni glanera deux statuettes, Piotr Satnislas russe séxagénaire et premier bisex affirmé du milieu recevra un Hot d’Or d’honneur mais très peu de blacks et de rebeux alentour. La France du X serait elle en retard sur celle du foot ? Brigitte Lahaie qui comme jadis préside d’un œil attentif est elle en tailleur pantalon. La cérémonie prend du retard d’autant plus qu’il y’a 29 catégories à honorer quasi plus que d’épreuves aux Jeux Olympiques ! Sans compter les Hot d’Or d’honneur ! Mais bon aux AVN awards à Vegas, la référence du genre c’est 70 statuettes qui sont décernées. Et Brigitte d’attaquer en bonne spécialiste de sexo en expliquant ce gap de huit années par le fait « que l’abstinence est un bon moyen de faire revenir le désir » Elle continue sur sa lancée en évoquant « des draps qui s’en souviennent » et le désir de fêter « la mauvaise vie » et on se dit que malgré les affinités UMP de Bri-Bri, c’est plutôt bien parti.
Honneur et Patrie
Parmi les Hot d’Or d’honneur on distinguera les trois attribuées à des actrices du cru rangées des porte-jaretelles. La gothique très littéraire Coralie Trihn-Thi, la féministe très straight edge Ovidie et la gracieuse très reconnaissante Estelle Desanges devenue dont le port altier et les bonnes manières ne dépareilleraient pas un mariage BCBG. Ces trois là ont réussi leur reconversion. Et pour Paul Jérôme, effectivement « l’accent a été mis sur leur effort médiatique et l’aide qu’elles ont apporté à faire rentrer le X dans les foyers. On voulait aussi montrer que ce sont des filles normales et sympa comme on en croise tous les jours sur les plateaux. » En revanche pas de montage musical sur « nos chers disparus » comme aux Césars d’anatn et donc nulle mention de Karen Lancaume, suicidée en plein désarroi quelques années après la polémique autour de Baise-Moi dont elle était l’une des deux héroines… Dans la salle on aperçoit Gaspar Noë et une créature, sur scène c’est Caroline Loeb qui remet un Hot d’Or d’honneur à Sophie Bramly du site Second sexe pour son esprit d’ouverture avec ses courts commandés à Lou Doillon, Arielle Dombasle ou Héléna Noguerra. Pendant ce temps, Alban Ceray mythe du X 70’s et sosie de Pierre Arditi passe de table en table, très « réception de l’ambassadeur » et parfait dans son rôle de MC à chevelure d’argent. Christopher Clark niçois exilé à Budapest se sent obligé de faire son discours dans un anglais très haché, titre de meilleur réal européen oblige. Ce vétéran en fait monter deux autres avec qui il a débuté sur la scène de Wagram. Alban donc et le barbu Richard Allan, ou Queue de béton dans les milieux autorisés. Mais comme vétérane de plus de 35 ans on ne voit que Brigitte…A 38 ans, le jovial Sebastian Barrio achève lui sa carrière en apothéose avec le Hot d’Or du meilleur acteur français avant un départ pour le One Man Show. A croiser tous ces hardeurs de feu, toujours magnifiés sous le meilleur angle à l’écran on en oublierait presque que la plupart ont un gabarit de jockey ou d’Alain Giresse. Peut être qu’un centre de gravité bien bas est le meilleur ami du coup de reins réussi, peut être…
Demi-molle
Ensuite c’est un peu la débandade. Philippe Manœuvre venu remettre le Hot d’Or d’honneur à Coralie Trinh-thi sa pigiste à Rock & Folk exhorte « hardos et hardeuses à se réveiller » Mais le feu ne prendra que mollement. Helmut Fritz tente lui aussi à l’entracte d’enflammer la salle avec « Ca m’énerve » mais n’y parvient que moyennement. Bref, ça sent la demi-molle pour cette célébration de l’über-virilité. Manu Ferrara, bûcheron du gonzo empoche deux statuettes mais à l’air moins à l’aise en smoking que sur les rings du sexe. Katsumi deux statuettes aussi tente également de relever l’ambiance. Quant à la jeune tchèque Tarra White, très classy elle dit gentiment merci pour ses deux bronzes point barre. Il est tard, ça traîne en longueur et faute d’un Ariel Wizman ou Laurent Baffie du X pour chauffer la salle, dur de captiver sur la longueur d’autant qu’il fait 25° dedans. Après les photos très sages, toute la grande famille du X se carapate donc régulièrement dehors pour fumer où discuter comme dans une cousinade de province. D’autant que les réactions au micro ne sont pas toujours ultra audibles. Seul John B.Root semble réellement ému de recevoir enfin le Hot d’Or du meilleur réal français après 16 ans à tenter de proposer une autre ésthétique du porno, scénarisé, contemporain et loin des manoirs de Dorcel.
D’ailleurs parlons en du Toucan ! Absent de taille de cette cérémonie. En effet l’écurie Dorcel a refusé de se rendre aux Hot. En off, on nous souffle que « se prenant pour le meilleur du marché, Dorcel pense pouvoir se passer de la cérémonie mais il n’a même plus d’actrice en contrat d’exclusivité. » Mais le fait que le pornocrate adepte des tournages « Relais & Châteaux » ait lancé en 2008 son propre mag n’a pas du aider. De cela les votants n’ont cure puisqu’au final c’est Ritual un film estampillé Dorcel qui repartira avec la statue de meilleur film français. Il est 1h 15 les libations vont se poursuivre au VIP, rue de Rivoli. Les Hot d’Or 2009 ont vécu. Dès juin 2010 retour à Cannes pour une nouvelle édition. Mais finalement à quoi ça sert. « A booster une carrière et à être mieux perçue par la presse tradi comme vous » nous explique doctement Paul Jérôme. « Le Hot d’Or de meilleure starlette française de Clara Morgane en 2001 l’a sûrement bien aidée en ce sens » croit-il savoir. OK, la révélation a été telle que plus personne n’a pris le risque de passer derrière elle. Saint Paul sur le chemin de Damas : l’illumination ! Dénicher la nouvelle Clara, hot & classy à la fois serait donc la nouvelle quête quasi mystique à laquelle se devrait de parvenir les prochains Hot d’Or. D’ici là, et bien on leur en souhaite une longue et heureuse.
{"type":"Banniere-Basse"}