En Colombie, le fils du légendaire narcotrafiquant Pablo Escobar fait scandale avec sa marque de vêtements à l’effigie de son père.
En Colombie, le fils du légendaire narcotrafiquant Pablo Escobar fait scandale avec sa marque de vêtements à l’effigie de son père.
L’entrepreneur Sebastián Marroquín défraie régulièrement la chronique en Amérique latine. Si ce nom d’emprunt ne vous dit rien, celui qu’il portait à la naissance – et dont il a tenté de se délester il y a plus de vingt ans – ne vous est pas inconnu. Ce trentenaire, né Juan Pablo Escobar, n’est autre que le fils de l’ancien chef du cartel de Medellín abattu sur les ordres des autorités colombiennes le 2 décembre 1993 : Pablo Escobar.
Le cadet du narcotrafiquant avait changé de nom au moment de son exil en Argentine avec sa mère et sa sœur, en 1994. Il se bat aujourd’hui pour obtenir le droit à l’exploitation commerciale du nom de son père dans son pays natal et espère pourvoir vendre des produits à son effigie sur le marché local. En septembre dernier, Sebastián lançait une procédure pour déposer la marque Pablo Emiliano Escobar Gaviria (le nom complet de son géniteur) en Colombie. Une requête à laquelle la Chambre de Commerce et de l’Industrie n’a pas donné suite, considérant qu’il y avait un risque “d’atteinte à la morale sociale et à l’ordre public”.
Le pays est encore très marqué par les milliers d’assassinats orchestrés par la baron de la drogue dans les décennies 80 et 90. Le fils Escobar estime, lui, que le nom de son papa est fréquemment utilisé à des fins commerciales, sans son consentement ni celui des membres de sa famille. A titre d’exemple, il cite l’immense succès de la telenovela Pablo Escobar, El Patrón del Mal (“Le Patron du Mal”), produite par la chaîne Caracol et diffusée dès l’été 2012 en Colombie et un peu partout dans le sous-continent. Il assure, par ailleurs, que la marque a déjà été enregistrée dans différents pays, et il a annoncé qu’il ferait appel de la décision.
Escobar dans ton placard
A 37 ans, Sebastián Marroquín n’en est pas à son coup d’essai. Le grand public l’a découvert en 2009 dans le documentaire du cinéaste argentin Nicolas Entel Los Pecados de mi Padre (“Les Péchés de mon père”). Il y présentait des excuses, au nom du défunt, aux enfants d’hommes politiques exécutés par les sbires de ce dernier.
Installé à Buenos Aires, architecte et dessinateur industriel, il a créé la marque de vêtements Escobar Henao (les patronymes de ses deux parents) en 2010. Lancée en mai 2012, la ligne de t-shirts et de jeans en hommage – douteux – au criminel heurte une partie de l’opinion. Les t-shirts de la collection Poder Poder sont illustrés par des documents du bandit (ses cartes d’identité, d’étudiant, de crédit, d’élu au Congrès, ainsi que son permis de conduire ou son casier judiciaire vierge datant de 1970) flanqués de commentaires en anglais tels que “Où vas-tu ? Réfléchis-y !”.
La photo d’Escobar père est glissée absolument partout, y compris à l’intérieur des poches de jeans ! Si le “fils de” se targue de vouloir mettre en garde les jeunes générations contre les dangers du trafic et revendique son pacifisme et ses intentions philanthropes à longueur d’interview, le message est ambigu. Il aurait proposé de reverser une partie des bénéfices à des ONG ayant toutes refusé en raison de l’origine obscure des fonds injectés pour la création de l’entreprise. Les quelque 10 000 pièces fabriquées (à Medellín) sont vendues entre 40 et 150 euros sur internet et dans des boutiques aux Etats-Unis, au Mexique, au Guatemala, à Porto Rico, au Chili, en Autriche et en Belgique. A priori, les seules victimes du rejeton ne sont, à ce jour, que des fashion victims.