Loin de l’idée d’intégration, Nicolas Sarkozy et Marin Karmitz proposent un “pôle d’excellence” pour l’art dans les beaux quartiers.
En paraphrasant Victor Hugo à l’occasion de son discours inaugural sur le Grand Paris, “Paris incarnera le vrai, le beau, le grand”, Nicolas Sarkozy a laissé filtrer l’ambiguïté qui préside à ce chantier colossal dont les travaux débuteront avant la fin 2012 et s’étaleront sur plus de dix ans.
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D’un côté, il y a l’idée urgente et un peu future d’un Paris extensif dont l’objectif est de repenser sa relation avec la banlieue ; de l’autre, il y a cette vieille idée monarchique d’un Paris symbole de la grandeur de la France et villemusée. C’est dans cette seconde optique que le Conseil pour la création artistique coprésidé par Nicolas Sarkozy et le producteur Marin Karmitz (qui n’en finit plus de voler la vedette à un ministère de la Culture qui n’a visiblement plus la main), et est visiblement devenu le porte-parole du chef de l’Etat, a lancé le 7 mai dernier l’opération “la colline des musées”, un partenariat inédit entre quatre lieux phares de l’Ouest parisien (la Cité de l’architecture et du patrimoine, le Quai Branly, le palais de Tokyo et le musée d’Art moderne de la Ville de Paris) sur la base d’une mutualisation et d’un arrangement tarifaire.
Pour Marin Karmitz, l’idée est simple : “Nous avons un formidable réseau culturel qui tient dans un mouchoir de poche. Nous sommes partis de l’axe central que constitue la tour Eiffel : à deux pas de là on trouve le Quai Branly, le Théâtre des Champs-Elysées, les trois plus grandes salles de vente de France (Christie’s, Sotheby’s et Artcurial), le Petit et le Grand Palais, le musée d’Art moderne de la Ville de Paris, le palais de Tokyo, le musée Galliera, le Théâtre de Chaillot, le musée Guimet et le musée de l’Homme en cours de rénovation.”
Le projet, donc : “Faire de Paris la capitale mondiale de l’art grâce à une synergie inédite.” Rien que ça. Du coup, Marin Karmitz se verrait bien “rapatrier le Salon du livre dans ce périmètre, au Grand Palais par exemple” et faire du palais de Tokyo (dont la moitié du bâtiment est encore à l’état de friche) “l’un des éléments centraux de ce projet global”. Le cas du palais de Tokyo est complexe : les quelque 12000 m2 de soussols font l’objet depuis plusieurs mois d’une lutte acharnée entre, d’un côté, le Centre Pompidou, affectataire de l’ensemble du bâtiment qui entend y développer son projet de “Centre Pompidou Alma”, et de l’autre l’équipe du Site de création contemporaine, qui occupe actuellement le premier étage du bâtiment et craint pour son autonomie.
Si Marin Karmitz reste toutefois prudent sur l’avenir du palais de Tokyo – “Il appartient maintenant au ministère de la Culture de se prononcer” –, il suggère néanmoins la possibilité d’un “multimusée” permettant de croiser les époques et les pratiques. “La création ne se débite pas en tranches”, a affirmé Marin Karmitz en réponse à la proposition du Centre Pompidou qui consistait, entre autres, à promouvoir les artistes français en milieu de carrière. Et si Marin Karmitz se défend aujourd’hui de cette stratégie de vitrine qui consiste à tout regrouper dans Paris, il reste que le projet actuel se concentre intra-muros et que la banlieue y est pour l’instant secondaire. C’est bien d’une autre vision du Grand Paris qu’il est ici question.
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