Sauf tremblement de terre, Martine Aubry devrait remporter les municipales à Lille. Mais si son bilan est globalement positif en matière de logement et de culture, l’emploi et la lutte contre la délinquance restent ses bêtes noires.
1. Martine Aubry donnée gagnante
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Selon les derniers sondages, l’ex-secrétaire du Parti socialiste est créditée de 60 % des intentions de vote. Maire de Lille depuis 2001 et présidente de la communauté urbaine, Aubry jouit d’un solide bilan et d’une bonne image auprès des Lillois.
Son coup de génie ? Un “nouvel art de ville” basé sur les grands chantiers lancés par son prédécesseur, Pierre Mauroy. L’idée : mixer commerces, habitat, et culture dans des quartiers populaires où Bouygues, Décathlon ou IBM se tirent désormais la bourre.
2. La nouvelle image de Lille
L’ex-ville textile est devenue une référence touristique, adoubée “capitale européenne de la culture” en 2004. Depuis, c’est l’effervescence : les expositions du Tripostal (où on a pu voir les collections Saatchi, Pinault, et Perrottin), celles des maisons Folie, ou encore les concerts de la gare Saint-Sauveur, du Grand Sud et de la future Maison du hip-hop drainent des centaines de milliers de personnes. Outre la multiplication des visites scolaires, Lille métropole a aussi mis en place un tout nouveau pass pour donner un accès illimité aux musées.
3. Des logements pour tous
Aubry a largement rempli ses objectifs : entre 2008 et 2014, 13 400 logements ont été construits (contre 12 000 prévus), et 11 000 autres rénovés. La ville compte désormais 27 % de logements sociaux. “Au sein d’un même immeuble, on trouve de l’habitat social, du privé, et de l’accession sociale à la propriété”, s’enorgueillit-elle. Principaux bénéficiaires, les quartiers populaires de Lille-Sud et Moulins ont profité de la moitié des 482 millions d’euros du Grand Projet urbain. Prochains chantiers : la porte de Valenciennes et la rénovation du quartier Euralille.
4. Une lourde dette
Mais ces lourdes transformations ont un prix. Si les taux d’impôts ont stagné, la dette lilloise a doublé entre 2008-2012, passant de 186 millions d’euros à 359 millions d’euros (+93 %). Avec une augmentation de 26 % de son budget en 6 ans, Lille est devenue la deuxième ville la plus endettée de France, après Marseille, ce que dément la mairie. Aubry botte en touche : “La chambre régionale des comptes estime que notre dette est ‘exempte de risques majeurs et conforme aux règles de bonnes pratiques’”.
5. Le boulet du chômage
Le chômage, plus élevé qu’au niveau national, n’a fait qu’augmenter passant de 13 500 chômeurs à 19 000 (+41 %). “Mais c’est moins que la moyenne nationale, à + 68 %”, tacle Aubry. Si les pôles d’excellence Euratechnologies ou Eurasanté ont créé environ 4 700 emplois, ils s’adressent “davantage à des bacs + 10 qu’à des bacs – 2, attaque Jean-René Lecerf, candidat UMP, alors que la moitié des demandeurs d’emplois lillois n’ont pas le bac”.
Suggérant l’installation d’un Amazon comme à Douai, le sénateur gaulliste houspille Aubry : “C’est à la ville de prendre des jeunes en contrat d’apprentissage quand le marché ne fonctionne pas.”
6. Manque de policiers
Jeunes noyés dans la Deûle, violences, cambriolages… Lille a été classée zone de sécurité prioritaire par Manuel Valls. Si Jean-René Lecerf assure que la délinquance explose (il chiffre un taux d’infraction de 105 ‰ en 2013, contre 70 ‰ au niveau national), Martine Aubry se défausse sur les sous-effectifs policiers, arguant que la situation s’améliorera quand la totalité des 197 policiers promis par Valls arriveront. Pour Lecerf, il faut renforcer la vidéosurveillance, doubler et surtout armer la police municipale.
7. Le flou autour des Roms
Jugée trop laxiste au début de son mandat, Martine Aubry a accéléré le démantèlement des camps de Roms, au grand dam de ses alliés politiques et de ses voisins à Tourcoing ou Croix. “J’ai toujours eu la même position : humanité et accueil pour ceux qui respectent les règles et veulent s’insérer, et fermeté pour les autres”, assure t-elle, prônant la circulaire d’août 2012 imposant des solutions d’hébergement aux expulsés. La métropole n’accueille plus que 1 900 Roms (contre 3 200 en 2013).
8. Un FN en hausse
Sur fond de crise de l’emploi et de hausse de l’insécurité, le FN s’installe dans le paysage politique lillois. Crédité de 14 % d’intentions de vote au premier tour, le FN s’était déjà hissé au second tour de trois des quatre cantons renouvelables à Lille en 2011. Eric Dillies, tête de liste de “Lille sort ses griffes”, se voit déjà à la mairie. Reste que ses attaques (et son programme) ne sont ni chiffrés ni justifiés.
9. Des tensions à gauche
Pour la première fois depuis trente ans, les communistes font liste à part. “Nous n’avons jamais pu faire entendre nos revendications au cours de ce mandat”, justifie Hugo Vandamme, tête de liste PC. Réputée autoritaire, ce n’est pas la première fois qu’Aubry essuie des critiques pour sa gestion solitaire. “S’il n’y avait que ses collaborateurs qui votaient à l’élection, je serais assuré de remporter la mairie !”, se marre Lecerf.
10. Et si Martine allait à Matignon?
Si Aubry assure n’avoir que Lille dans viseur, la question obsède les Lillois et fait le lit de ses adversaires qui l’accusent de recruter des colistiers à Paris (ainsi de Charlotte Brun, députée du Val-d’Oise). “Elle aura 70 ans à la fin de ce mandat, commente un proche de la maire. Avec Hollande – qu’elle déteste – et son virage social-démocrate, Aubry ne peut pas intégrer le gouvernement. C’est impossible. Sa carrière nationale est derrière elle.” Le vrai enjeu, ce sera celui de sa succession.
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