C’est voté ! Les jeux d’argent en ligne sont ouverts à la concurrence. Depuis longtemps dans les starting-blocks, les sites de paris n’ont plus qu’à obtenir une autorisation de l’autorité de régulation des jeux en ligne (Arjel) pour décrocher le jackpot. Quelques clefs pour comprendre le nouveau paysage qui se dessine.
Le web c’est l’anarchie ! La preuve : « L’arrivée d’Internet, son développement extraordinairement rapide, a totalement rebattu les cartes et a fait tomber les barrières qui nous permettaient jusque là de réguler le marché des paris », expliquait François Baroin, ministre du Budget, le 30 mars à l’Assemblée nationale. Bref, « la situation n’est plus tenable ».
D’où l’idée de « canaliser » la manne financière des paris et jeux en ligne, évaluée par le ministre à 2 milliards d’euros. 5% des Français miseraient actuellement « virtuellement », sur des sites hébergés à l’étranger, et donc sans statut légal en France.
La loi votée hier après-midi ébauche un nouveau tableau en rendant légale une offre concurrente aux « historiques » : Française des jeux, PMU et casinos.
Une décision qui fait tiquer l’opposition car la majorité des leaders du secteur appartiennent en partie « aux amis du Fouquet’s », comme l’explique Jean-Marc Ayrault. Parmi les actionnaires de Bwin, BetClic, Eurosport Bet et compagnie on retrouve Arnaud Lagardère, Martin Bouygues, Patrick Le Lay, Vincent Bolloré ou encore Stéphane Courbit. Autant de proches de Nicolas Sarkozy, que le PS accuse de leur faire un (gros) cadeau.
Quels sites web sont attendus ?
Seuls les paris hippiques, sportifs et le poker en ligne sont concernés. Il ne sera donc pas légal de jouer de l’argent sur la composition du prochain gouvernement ou sur l’artiste qui fera faux bond à Rock en Seine cet été.
Il y aurait actuellement, toujours selon le ministère du Budget, 25 000 sites actifs. L’objectif est d’en « labelliser » une cinquantaine. Reste à savoir s’il y a de la place pour autant d’opérateurs. Il y a fort à parier que les géants d’aujourd’hui resteront les acteurs principaux de demain, étouffant les petits au passage.
Comme l’explique Bernal Bordallo, consultant pour le cabinet NPA Conseil, spécialisé dans les médias et services numériques « les acteurs historiques ont pu se muscler avant l’ouverture du marché ».
Multipliant les partenariats, notamment avec les médias (RTL, TF1…), les historiques PMU et Française des Jeux ont profité de leur monopole pour se tailler une part du gâteau avant l’arrivée officielle de nouveaux.
Les deuxièmes à tirer leur épingle du jeu seraient les trois principaux sites de paris en ligne : « Bwin, Unibet et Betclic. Ceux qui ont réussi à se faire connaître du grand public malgré les interdictions. En s’affichant sur les maillots du Real Madrid ou dans les clips de Lady Gaga. » Enfin, « des petits acteurs, du poker notamment, peuvent également prétendre à se faire une place », prédit Bernal Bordallo.
Le marché repose sur de nouvelles formes de consommation : « Les partenariats sites de jeux et médias peuvent conduire à ce qui se pratique déjà en Grande-Bretagne. A savoir de la consommation de paris en direct, de sa télécommande. De la même façon que l’on achète un film en VOD on peut parier sur le résultat d’un match en le regardant ».
Qu’est ce que ça va changer ?
Pour jouer sur les sites autorisés, il faudra montrer patte blanche. Parmi les procédures obligatoires : la vérification d’identité, à la manière de ce qui se pratique dans les casinos en dur.
A l’inscription, le joueur aura un mois pour transmettre au site une photocopie d’une pièce d’identité et un RIB. Procédure fastidieuse, destinée à vérifier l’âge du joueur et sa non-inscription sur la liste noire des casinos. Le site devra également vérifier l’adresse physique de l’internaute en lui transmettant par voie postale ses codes d’accès. A défaut, aucun reversement de gains ne pourra être effectué.
Des formalités qui peuvent créer un frein à la mobilité des joueurs d’un site à l’autre. « Les opérateurs essaieront donc de générer le plus d’inscriptions le plus rapidement possible », analyse Bernal Bordallo. Un course à la récupération des clients qui incitera les sites de jeux à dépenser en publicité : « 200 à 250 millions d’euros brut par an au cours des trois prochaines années. »
Qui contrôle ?
Autoriser certains sites, en refuser certains, voir en bloquer ; c’est l’Arjel qui s’en chargera. La toute jeune Autorité de régulation des jeux en ligne, présidée actuellement par Jean-François Vilotte, (ex-président de la Fédération française de tennis), est destinée à évaluer et autoriser les sites de paris en ligne.
Le cahier des charges est en cours de conception mais le temps presse. Le gouvernement voudrait que tout soit prêt pour la coupe du monde de football, le 11 juin prochain. La fiscalité des sites de jeux sera alignée sur celles des jeux historiques. A savoir 7,5% des mises sur les paris sportifs et hippiques et 2% pour le poker.
Quant aux moyens d’action de l’Arjel, pour le moment peu d’information sur le sujet. Il semblerait qu’elle cherche à interdire d’accès en France les sites non autorisés, comme l’expliquait son secrétaire général, Fréderic Epaulard, à Lille en mars dernier lors du forum international de la cybercriminalité, mais les obstacles techniques restent encore nombreux.
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