Trois semaines. Trois semaines de feuilleton, de polémique dans la polémique, d’invectives, de dénonciations au canon et de récupération partisane. Mais où est passé le débat de fond ? Sur la forme, un acteur, et non des moindres – l’une de nos cinq stars internationales (si, si, comptez, vous verrez) –, gavé d’oseille de la […]
Trois semaines. Trois semaines de feuilleton, de polémique dans la polémique, d’invectives, de dénonciations au canon et de récupération partisane. Mais où est passé le débat de fond ? Sur la forme, un acteur, et non des moindres – l’une de nos cinq stars internationales (si, si, comptez, vous verrez) –, gavé d’oseille de la pointe des pieds jusqu’à la racine des cheveux, qui depuis bien longtemps est passé du côté obscur des forces de l’argent – celles qui oblitèrent tout, les valeurs, le passé, la vérité de l’être, ses convictions anciennes –, décide que plus, c’est toujours mieux, même quand on en a déjà tellement qu’on ne sait plus quoi en faire, s’en va monnayer sa notoriété au plus offrant. Crachant au passage sur un pays qui aura eu le culot de s’émouvoir de son départ, avec abandon de nationalité à la clé. Ces choses-là arrivent. La France perd(-ra) un citoyen qui la fit rêver, pleurer ou rire, un citoyen dont elle était fière (pas toujours) and so what… ? Fuir la France comme si l’on y vivait sous un régime autoritaire (cette blague !) et trouver refuge au sein de la “grande démocratie” russe ? Minable, on dit minable.
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L’attachement à une patrie, n’est-ce qu’une question d’argent, d’impôts trop lourds ? À quoi sert l’impôt ? Ne sommes-nous pas tous, chacun à son échelle, redevables, à vie, à cette patrie dans laquelle nous sommes nés ou que nous avons choisie, de l’accès au savoir qu’elle nous a offert, des hôpitaux dans lesquels elle nous soigne, de la sécurité qu’elle nous promet, de l’assistance – même imparfaite – qu’elle apporte aux moins dotés, de l’aide qu’elle nous fournit, malgré tout, pour affronter les vicissitudes de la vie ? Qui peut ainsi, l’esprit léger, s’affranchir de tout devoir de solidarité à l’égard de l’État démocratique (finalement pas si épouvantable) qui l’a vu naître et grandir ? Un pays auquel, tous les jours, nous pouvons reprocher de ne pas se montrer assez égalitaire ou fraternel, dans lequel les libertés sont parfois bafouées, qui compte près de 9 millions de pauvres et des millions de mal-logés mais où, quand même, on ne regrette pas d’être nés ! La France tu ne la quittes pas, même si parfois tu l’aimes moins. Qu’est-ce qu’un impôt “trop lourd”, voire “confiscatoire” ? Celui qui, aux États-Unis, frappait à hauteur de 90 % les plus hauts revenus jusqu’au milieu des années 60, n’empêchant pourtant pas le pays de prospérer ? Celui de 80 % instauré par le général de Gaulle, pendant les Trente Glorieuses ? Ces pays s’étaient-ils alors effondrés, désertés par leurs très grandes fortunes ? Autre temps, autre réalité nous rétorque-t-on. C’est vrai.
En quarante ans, les choses ont bien changé : les revenus des ménages les plus fortunés ont crevé tous les plafonds. La part des profits engrangés par les actionnaires des plus grandes entreprises et celle des revenus de leurs dirigeants dans la richesse nationale n’a cessé d’augmenter, alors que reculaient les avantages sociaux des salariés et que chutait l’emploi, premier levier à actionner pour faire croître les profits des entreprises, tandis que le chantage à la délocalisation pratiqué par certains obligeait les États, donc les contribuables, à céder toujours plus de subventions et d’abaissement des cotisations sociales patronales. De cela, on ne parle pas pendant qu’on s’esclaffe à propos du costume traditionnel russe enfilé par notre Gégé ex-national ou qu’on se désole devant ses saillies pathétiques. D’ailleurs, on finit par se demander de quoi on parle puisque, finalement, l’impôt de 75 % sur les revenus supérieurs à 1 million d’euros par an n’existera pas. On parie ?
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