Faut-il boycotter les Jeux olympiques d’hiver de 2014 à Sotchi, dans le sud de la Russie ? Des personnalités et des sportifs ont pris position, des pétitions ont été lancées en ce sens pour protester contre l’orientation liberticide et homophobe du pouvoir russe. Fin juin, Vladimir Poutine a promulgué deux lois scandaleuses : la première […]
Faut-il boycotter les Jeux olympiques d’hiver de 2014 à Sotchi, dans le sud de la Russie ? Des personnalités et des sportifs ont pris position, des pétitions ont été lancées en ce sens pour protester contre l’orientation liberticide et homophobe du pouvoir russe. Fin juin, Vladimir Poutine a promulgué deux lois scandaleuses : la première réprime les “offenses aux sentiments religieux” d’une peine pouvant aller jusqu’à trois ans de prison (ce texte a été concocté après la condamnation des Pussy Riot à deux ans de camp), la seconde punit d’une amende tout acte de “propagande pour les relations sexuelles non traditionnelles devant mineur”. Les étrangers risquent en plus une détention de quinze jours et une expulsion. Fin juillet, quatre Néerlandais ont été expulsés. Ils tournaient un film sur le droit des gays dans le nord-ouest du pays.
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Manifester pour l’égalité des droits en Russie est un sport dangereux. Il faut s’attendre à être arrêté ou tabassé – autant par les forces de l’ordre que par des militants d’extrême droite. D’après un sondage publié en juin, 88 % des Russes soutiennent la loi contre la “propagande” homosexuelle et 54 % pensent qu’il faut punir l’homosexualité. Parallèlement, cette loi renforce le sentiment d’impunité d’extrémistes spécialisés dans l’agression et le harcèlement des homosexuels. Sur le net, des vidéos circulent où des jeunes se font tabasser et sont forcés à boire de l’urine. Des cas de meurtres ont été recensés sans que le pouvoir ne s’en émeuve.
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Les organisations des droits de l’homme et certains Etats pressent le CIO – dont la charte s’oppose à toute forme de discrimination – de réclamer des garanties aux autorités russes pour qui les JO sont un formidable outil de propagande. Pour Vladimir Poutine, Sotchi est une opération de prestige nationaliste et personnel. La station balnéaire se trouve juste à côté de la Géorgie, dont la Russie continue d’occuper militairement une partie du territoire (l’Ossétie du Sud et l’Abkhazie). Mais la polémique sur la loi contre la “propagande” homo pourrait voler la vedette.
Les mondiaux d’athlétisme de Moscou, préambules de Sotchi ? L’Américain Nick Symmonds a dédicacé sa médaille d’argent du 800 mètres à ses amis gays. La sauteuse en hauteur suédoise Emma Green Tregaro a peint ses ongles en arc-en-ciel avant d’être rappelée à l’ordre par l’IAAF (fédération internationale d’athlétisme) dont la charte interdit aux athlètes de prendre des positions politiques. Ce qui n’a pas empêché la perchiste russe médaillée d’or Yelena Isinbayeva de justifier ainsi la loi – avant de minimiser ses propos le lendemain : “Nous sommes inquiets pour notre nation car nous nous considérons comme des gens ‘normaux’. Chez nous, une relation, c’est entre un homme et une femme.” Avec Usain Bolt sous la foudre, l’image des mondiaux restera celle des athlètes russes s’embrassant sur la première marche du podium du 4×400 mètres dames – sans que l’on sache avec certitude s’il s’agit d’un acte militant.
Propagande pour “propagande”, des voix appellent aujourd’hui à utiliser la puissance de résonance mondiale des JO de Sotchi. Une campagne internationale demande aux athlètes, spectateurs et coachs de se tenir par la main. Le journaliste russe Anton Krasovsky, limogé en janvier après avoir fait son coming-out en direct à la télé pour protester contre la loi, s’oppose au boycott au nom de la solidarité : “Les homosexuels russes ont besoin du soutien international… Si tu boycottes les JO, tu les boycottes aussi !” Et il suffit parfois d’une image, d’un athlète courageux ou engagé. Il faut repenser au poing levé et ganté des athlètes noirs américains Tommie Smith et John Carlos à Mexico en 1968 ou au drapeau aborigène brandi en 2000 aux JO de Sydney par Cathy Freeman. Après tout, le principal, c’est de participer.
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