A la pointe des techniques internationales, l’unique école de police de Cisjordanie veut améliorer l’image des forces de sécurité palestiniennes.
Dans la torpeur matinale, une trentaine de policiers en uniforme bleu camouflage s’entraînent au maniement du bâton, au rythme des ordres criés par leur supérieur. L’école de police de Jéricho forme environ 500 recrues par an, affectées dans tous les districts de Cisjordanie. Créé à la suite des accords d’Oslo (1993), le centre compte une dizaine de bâtiments modernes, dont une maison palestinienne pour s’initier à l’art de la fouille à domicile et un faux bureau de police pour permettre aux élèves de s’entraîner à recevoir les plaintes.
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“Les premiers cours ont eu lieu le 1er novembre 1994. Sous les arbres ou contre un mur, les élèves soulevaient des poteaux électriques en guise d’entraînement physique. Le défi était de construire un appareil de police efficace, alors qu’on partait de rien”, se souvient Zaher Sabbah, directeur de l’école de police et lieutenant-colonel à la mine affable.
Comme un symbole de l’influence des pays donateurs et notamment de l’Union européenne dans le développement de la Palestine, le président de la Commission européenne José Manuel Barroso a inauguré l’école en compagnie du Premier ministre palestinien Salam Fayyad dimanche dernier. En 2008, un effort financier de 15,3 millions d’euros consenti par plusieurs pays a permis de développer logistique et spécialisations. Un investissement destiné à rendre la police palestinienne plus acceptable aux yeux de la communauté internationale, condition nécessaire au maintien des subventions.
Dans une salle de travail, un major tient une liasse de billets dans chaque main : une fausse, une authentique. Un groupe de policiers apprend à déceler à l’oeil nu les faux : certificats de naissance, passeports et billets. Un autre groupe s’initie au réseau intranet de la police et se concentre sur les cours en ligne – toute dernière nouveauté – consacrés aux droits de l’homme ou à la lutte antidrogue.
“Notre projet est de devenir une police informatisée et numérique”, annonce le major Samir, en charge du cours.
La plupart des gradés du centre ont étudié les sciences et techniques de la sécurité dans des pays voisins, voire en Afrique ou en Occident. Des experts étrangers viennent former les troupes : les Allemands aux investigations et les Français aux stratégies anti-émeutes, par exemple. Mais, en Cisjordanie, l’autonomie sécuritaire est un but, et un rêve : “Si nous sommes indépendants ce soir, notre police doit être opérationnelle demain matin”, explique le directeur de l’école. “Nos cours sont très complets et les jeunes n’ont plus besoin d’aller à l’étranger. Mais nos officiers vont continuer à voyager pour prendre exemple sur les meilleures techniques mondiales.”
Le métier de policier est plutôt prisé. Sur 5 000 candidats, seuls 100 sont sélectionnés, sur des critères physiques, les résultats au concours et le parcours judiciaire. “La seule chose qu’on laisse passer, ce sont les infractions au code de la route, parce que tout le monde en fait ici ! Même moi !”, s’esclaffe le lieutenant-colonel, qui jure qu’Israël n’a pas son mot à dire dans la sélection des heureux élus. V
ingt femmes sont sorties de la dernière promotion, aux côtés de 250 homologues masculins. Ahlam, 18 ans, voile noir autour du visage et montre rose au poignet, est l’une d’elles. Sortie première de sa promo, elle suit d’un oeil attentif le cours d’autodéfense, sa matière préférée, donné par Ahmad, diplômé des forces spéciales turques : “Avant, les policiers tapaient et tiraient tout de suite, expose le gaillard dans un grand sourire. Maintenant, on leur apprend à maîtriser les différents degrés de violence et à neutraliser un suspect sans lui faire mal.”
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