Dans sa nouvelle édition, le dictionnaire propose une définition du terme “frotteur” qui fait polémique. La mention d’agression sexuelle y est omise.
“Frotteur, euse : Personne, souvent homme, qui recherche les contacts érotiques à la faveur de la promiscuité des transports en commun. » Cette nouvelle définition du Robert a créé la polémique sur les réseaux sociaux.
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Une définition surprenante pour un comportement pourtant passible d’une peine de prison et 75 000 euros d’amende, au moment où le dictionnaire a fait entrer dans sa nouvelle édition, les termes “queer”, « trans » ou « écriture inclusive ».
Un frotteur est un agresseur
Sur Twitter, des internautes ont tenu à interpeller Le Robert. La plupart d’entre eux sont scandalisés : la définition ne mentionne pas le non-consentement de la victime.
donc pour le petit robert les mecs qui se frottent pour bander c’est de « l’érotisme », ah ? la lexicographie, cette entreprise d’euphémisation… je propose de créer la notion de lexicography washing si vous voulez bien @DeRien pic.twitter.com/m1N3Lc0tYc
— Marie-Anne Paveau (@mapav8) 14 mai 2018
Par contre @LeRobert_com il y a une faute sur la définition proposée de « frotteur ». Les contacts recherchés n’ont pas de caractère « érotique », il s’agit bien d’une agression sexuelle. Cc @alicecoffin
— Rebecca Amsellem (@R_Amsellem) 14 mai 2018
Un contact érotique suppose un consentement. Sans cela il s’agit de violence sexuelle puisque l’acte est imposé. Quelle qu’en soit la manière. Vous ne faites pas la nuance entre violence sexuelle et sexualité @LeRobert_com ?
— Sans Compromis (@SansCompromisSC) 14 mai 2018
Héloïse Duché, fondatrice du collectif Stop harcèlement de rue, a tenu à s’exprimer sur BFMTV. Pour elle, la définition du célèbre dictionnaire se place du “côté des agresseurs” : « Les frotteurs, qui sont organisés en réseaux sur les forums, considèrent qu’il s’agit d’une pratique sexuelle, dénonce-t-elle. Utiliser leur définition, c’est nier le fait qu’il s’agisse d’une agression sexuelle. C’est même pire: en en faisant une pratique érotique, cela sublime le geste et le valorise. »
“Erotique” et ses définitions
Edouard Trouillez, le lexicographe du Robert, admet que “la définition est en effet trop implicite”. Interrogé par Le Figaro, il juge que le dictionnaire a commis une “imprécision” plutôt qu’une “faute” : “Le mot ‘érotique’ est mal compris. Il est vu comme quelque chose de positif, avec une connotation de plaisir. Ce qui n’est pas notre définition ici”, souligne-t-il.
Pourtant, la définition de l’adjectif “érotique” dans Le Robert a un sens strictement positif : “Qui a rapport à l’amour physique, au plaisir et au désir sexuels distincts de la procréation. Qui provoque le désir sexuel.” Les étymologies latine et grecque vont également dans ce sens puisque qu’elles définissent l’érotique comme “ce qui concerne l’amour.”
Une définition retravaillée dans la nouvelle édition
En réaction aux critiques, le dictionnaire assure que la définition sera retravaillée pour la prochaine édition.
Concernant le mot frotteur, nous sommes conscients que la définition de ce nouveau sens est trop implicite ; nos lexicographes vont la retravailler pour la prochaine édition avec l’ajout des notions importantes de non-consentement et d’agression sexuelle.
4/4— Le Robert (@LeRobert_com) 14 mai 2018
Isabelle Neltner, responsable du service communication des Éditions Le Robert, affirme également à BFMTV qu’« il manque clairement la notion de non-consentement ou d’agression sexuelle. La femme frottée n’est pas évoquée. On va l’ajouter dans la version en ligne rapidement. La version papier sera retravaillée l’année prochaine pour l’édition 2020. »
Même réaction d’Edouard Trouillez sur Le Figaro. Le lexicographe parle de la protestation des internautes comme d’“une bonne nouvelle” : “Cela prouve que les Français s’intéressent à la langue française et que les dictionnaires ont toujours leur importance en France« .
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