Officiellement, pas de retour de Nicolas Sarkozy à la vie politique. L’ex-Président n’était à l’UMP ce lundi que pour donner un coup de main à sa famille politique après le rejet par le Conseil constitutionnel de ses comptes de campagne. L’homme a pourtant peu parlé de finances et de gros sous. Mais plutôt de politique, de crise des idées, et d’Europe. Pour beaucoup, la question de son retour n’est plus « si » mais « quand ».
C’était l’affluence des jours de campagne à l’UMP ce mardi 8 juillet pour la première venue de Nicolas Sarkozy depuis 2007. Cadres du parti et élus en nombre, journalistes en pagailles, militants et badauds attentifs, on se serait cru un peu avant le premier tour d’une présidentielle. Avec des tee-shirts distribués aux militants, des jeunes chantant des chansons comme « Hollande en Corrèze, Sarkozy à l’Elysée », qu’on avait entendu en mai 2012, ou la variante 2013 : « Hollande t’es foutu, Sarkozy est revenu ». Et chacun s’était armé de patience pour approcher Nicolas Sarkozy.
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Les chaînes d’infos avaient déployé deux à trois caméras et enchaîné les duplex depuis 8 heures le matin. Les photographes avaient sorti, pour l’occasion, plusieurs heures avant l’arrivée de celui que tout le monde attendait, le matériel du Festival de Cannes et du conseil des ministres : escabeau et tabouret. Tandis que les badauds, de plus en plus nombreux, s’agglutinaient là où ils pouvaient : sur le trottoir, aux fenêtres ou sur les terrasses. Les bus ralentissaient pour regarder, certaines voitures klaxonnaient.
Mais la pression est à son comble quand à 17h03, Nicolas Sarkozy arrive, tout sourire, pour aller saluer les militants. Jusqu’à ce qu’un fan trop excité essaye de le remercier d’un peu trop près et se fasse extirper par le service d’ordre. Seul grain de sable dans une communication parfaite où son arrivée est retransmise en directe sur les chaînes d’infos, chacun essayant d’avoir un mot, une photo de l’ex-Président. Nicolas Sarkozy, très souriant, se contente de « merci, merci beaucoup ».
« Ne m’en veuillez pas, ce n’est pas le moment d’une présidentielle »
Étrange impression d’un film non interrompu depuis la présidentielle ; la voiture qui arrive, suivie par des journalistes sur des motos. Nicolas Sarkozy en sort, la meute de caméras est sur lui, le suit, jusqu’au bain de foule… Flashback. Seule la barbe de trois jours a changé. Comme pour signifier qu’il n’est pas dans le retour. Mais le staff est le même, le costume sombre semble être le même également. Et dans la voiture du retour, à la place de la fille de Cécilia Sarkozy, en 2007, c’est son fils Louis qui se trouve assis à ses côtés. Nicolas Sarkozy, lui, a les mêmes gestes pour dire au revoir, la vitre baissée. Revival. Mais « ce n’est pas un retour politique », explique Nicolas Sarkozy, en introduction de son allocution au bureau politique.
« Sachez que vous pouvez compter sur moi chaque fois qu’il y en aura besoin. Mais ne m’en veuillez pas, ce n’est pas le moment d’une présidentielle. Parce qu’il y a quelque chose d’indécent à parler de ce rendez-vous alors que les Français souffrent tant », glisse-t-il en visant notamment François Fillon, Xavier Bertrand et Bruno Le Maire qui sont déjà candidats pour la primaire de 2016.
« Ne m’en veuillez pas. Ce n’est pas le moment de ma rentrée politique. Parce que le jour où je voudrai, je vous préviendrai ». Et de marteler plus tard : « je ne veux pas m’engager dans la vie politique, ce n’est pas mon souhait ». L’heure ne serait donc qu’à aider sa famille politique et à retourner, au soir de cette folle journée, à son silence auquel il s’est astreint au lendemain de sa défaite présidentielle.
« Je continuerai mon chemin avec le souci du recul, de la réflexion, de l’écoute, de la paix dont j’ai besoin après tant d’années d’exposition. »
On comprend alors que l’heure n’est pas venue. Car l’ex-candidat n’utilise pas un conditionnel. Juste un futur de l’indicatif. Pour lui et son équipe, l’atterrissage politique devait se faire au plus tôt à l’automne 2014. Pas question de se précipiter. Et en aucune manière de sortir de cette façon. « Le jour où je reprendrai la parole ce sera pour parler aux Français de la France », explique-t-il à la tribune.
« Quand on veut être un homme d’État, il faut oublier les petites mesquineries »
Le discours, qu’il tient à huis clos pendant une demi-heure, est des plus politiques. C’est le tabou de son retour dans l’arène et la vie politique qui a sauté aujourd’hui ce mardi 8 juillet La question n’est plus de savoir s’il reviendra mais quand il reviendra. Live-tweeté sur son compte @NicolasSarkozy, réactivé pour l’occasion, l’ancien Président développe plusieurs fils rouges : la nécessité de préserver le pluralisme, mis à mal à ses yeux par la décision du Conseil constitutionnel, l’unité de l’UMP à sauvegarder contre les ambitions des uns et des autres, la nécessité du leadership franco-allemand pour la bonne marche de l’euro, son inquiétude sur la crise des idées politiques.
Enfin, le retour à un discours déjà entendu pendant la présidentielle de 2007, celui d’une ouverture des frontières idéologiques, « je ne veux pas être réductible simplement à la droite parce que je ne suis pas conservateur, parce que je pense que l’immobilisme et la conservation sont un poison mortel pour notre pays », ou encore « quand on veut être un homme d’État, faut oublier les petites mesquineries. (…) Il faut voir grand, faut pas voir étroit, il faut voir large, il ne faut pas voir petit ». Sans savoir précisément à qui il fait allusion. Des mauvaises finances du parti, il est très peu question…
Plus tôt dans la journée, Nicolas Sarkozy avait cependant rencontré quelques banquiers en compagnie de Jean-François Copé, à ses bureaux de la rue de Miromesnil, pour faire le point sur la situation de parti. « Ça s’est bien passé », rapporte un proche du Président de l’UMP. Ce week-end, 2,3 millions d’euros ont déjà été collectés uniquement sur Internet. Les dons des militants envoyés par chèques n’ayant pas encore été comptabilisés. Nicolas Sarkozy a, lui, donné 7 500 euros, soit le plafond autorisé par la loi.
L’ex-candidat avait démarré son allocution devant les élus en disant. « Je ne sais pas si je sais encore faire un discours. » Une vidéo amateur tournée à l’intérieur de ce huis clos a montré que les élus et cadres de l’UMP ont ri plusieurs fois et l’ont écouté religieusement. Ses intonations n’ont pas changé. Manifestement, son plaisir à être de la partie non plus.
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