En rachetant Flammarion, Gallimard se redéploie pour constituer le troisième groupe du marché français de l’édition.
Sur le marché hexagonal de l’édition, de plus en plus concentré, le rachat, officialisé le 26 juin, de Flammarion par Gallimard, un moment convoité par Albin Michel et Actes Sud, a valeur d’événement. L’ensemble du secteur se voit ainsi reconfiguré, avec la naissance d’un grand groupe de l’édition. Cet alliage permet en effet aux maisons Gallimard et Flammarion de constituer le troisième groupe le plus puissant de France, derrière Hachette Livre (groupe Lagardère) et Editis (groupe Planeta).
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Le groupe italien RCS Media Group, très endetté, détenteur jusque-là de Flammarion, en plus de l’éditeur italien Rizzoli et des quotidiens Corriere della sera, la Gazzetta dello sport et El Mundo, s’est séparé du groupe dirigé par Teresa Cremisi pour un montant de 251 millions d’euros : un prix jugé correct par Antoine Gallimard qui s’est félicité dans un communiqué de ce rapprochement « de deux acteurs historiques du monde de l’édition, dans le respect de leurs cultures respectives ». Tout en restant indépendant, ce mastodonte sera présent dans tous les champs de la littérature – générale, sciences humaines, documents, poche, jeunesse, BD, livres d’art, art de vivre… -, dans la distribution et la diffusion.
Même si la question se pose de savoir si deux systèmes de distribution, propres à chaque maison (Union distribution pour Flammarion, la Sodis pour Gallimard), seront compatibles à terme, les salariés de Flammarion semblent rassurés devant la volonté d’Antoine Gallimard de respecter les territoires éditoriaux de chaque partie. Si l’accord est approuvé par les autorités de la concurrence, Gallimard doublera ainsi son chiffre d’affaires (plus de 500 millions d’euros) et se musclera dans des secteurs comme les livres de poche (grâce à la collection J’ai lu, plus grand public que Folio), ou la BD (grâce à Casterman) ou encore les beaux livres, où Flammarion excelle depuis longtemps.
Pour la maison Gallimard, qui a célébré son centenaire l’année dernière, ce redéploiement ressemble à un changement de statut : la structure familiale se transforme en conglomérat, prêt à défier ses concurrents sur un marché du livre de plus en plus tendu. Pour Flammarion, maison encore plus ancienne, créée en 1876, cette revente l’autorise à croire à sa consolidation. Les effets de mutualisation des ressources et la dynamique de groupe pourraient profiter à tous.
Il reste à voir quelles seront précisément les procédures adoptées dans les manières de travailler ensemble, ou les périmètres d’action de Teresa Cremisi par rapport à Antoine Gallimard. Leur ancienne complicité longtemps mise à l’épreuve – elle fut la directrice éditoriale d’Antoine Gallimard durant seize ans, entre 1989 et 2005 -, l’habileté de l’éditrice, notamment sur les prix littéraires (plusieurs Goncourt à son actif : Ingrid Caven de Jean-Jacques Schuhl, Rouge Brésil de Jean-Christophe Rufin, La Carte et le Territoire de Michel Houellebecq) semble jouer en faveur de la cohérence du rapprochement de deux nouveaux associés.
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