Après le Pitti florentin en janvier, Officine Générale a tenu sa première présentation lors de la dernière fashion week parisienne. Les yeux sont cernés et les bâillements se propagent dans la foule amassée à l’entrée de l’hôtel particulier niché en face de l’Abbaye de Saint-Germain. 10h, un dimanche matin de fashion week, l’horaire est rude […]
Après le Pitti florentin en janvier, Officine Générale a tenu sa première présentation lors de la dernière fashion week parisienne.
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Les yeux sont cernés et les bâillements se propagent dans la foule amassée à l’entrée de l’hôtel particulier niché en face de l’Abbaye de Saint-Germain. 10h, un dimanche matin de fashion week, l’horaire est rude pour ceux qui sont sortis le samedi soir ou qui ont simplement enchaînés d’une traite Londres, Florence, Milan et Paris. Mais la plupart des médias nationaux et internationaux sont bien là, venus découvrir la première présentation d’Officine Générale, calée juste avant le défilé Lanvin dans le calendrier officiel. Après seulement trois collections (celle présentée est la quatrième), l’étape est un pas de géant pour Pierre Mahéo, le fondateur de la marque.
Croisé sur le Pitti en janvier, ce trentenaire tranquille ne boudait pas son plaisir. « Même si j’ai eu accès assez rapidement à de nombreux journalistes américains, parce que je les ai rencontrés ici, il y a toute une partie de la presse, notamment française, que je connais pas (…) C’est comme un premier rendez-vous », sourit-il. Si l’ascension de la marque peut sembler soudaine, le projet est le fruit d’une mûre réflexion. Pierre a bourlingué, mais a toujours eu dans le sang cet amour des matières. Un grand-père tailleur du côté de sa mère, une lignée d’ostréiculteurs du côté de son père, des univers où la fringue dure une décennie plutôt qu’une saison. « J’ai toujours vu ces hommes-là avec des pantalons et vestes de travail, des vêtements de chantier, et je me souviens encore des énormes rouleaux de tissus anglais qui débarquaient chez mon grand père (…) j’ai toujours été pris entre les deux » raconte-t-il.
« J’étais malheureux, je n’aimais pas ce que je faisais »
L’environnement a modelé son rapport à la mode. Après des débuts chez un tailleur parisien qui l’initie à la science des matières et des formes (« C’est là que j’ai appris ce qu’était une épaule. »), il navigue entre sportswear et jeaners, en tant que directeur de studio ou consultant (« J’ai eu envie de connaitre d’autres choses, de m’enrichir, de savoir comment délaver un jean par exemple. »). Jusqu’au jour où, il y a quelques années, il craque et plante tout. « J’étais malheureux, je n’aimais pas ce que je faisais », glisse-t-il. Il se pose quelques mois pour réfléchir, et se lance dans l’aventure Officine Générale. Seul ou presque – quelques amis l’accompagnent.
En bandoulière, cette envie de respecter et le produit et le client. Et il sait ce qu’il ne veut pas : « Jamais une de mes pièces ne sortira d’Asie, j’y ai vu des choses qui ne m’ont pas plu, des plateaux de 1 500 femmes qui ont l’interdiction de lever les yeux quand tu passes. Et puis, je ne vois pas pourquoi j’enverrais mes plus beaux tissus italiens ou anglais là-bas pour les faire monter, puis revenir, il faut aussi être un peu responsable ».
« La première publicité d’une marque c’est sa qualité »
« La première publicité d’une marque c’est sa qualité », lâche-t-il en joignant le geste à la parole. Il touche les matières, les décrit, enfile ses fringues. « Les gens me disent souvent ‘Mais tu portes que ta marque ?’ Ouais ! Je fais des fringues que j’ai envie de porter » rigole-t-il en zippant un blouson court au col teddy, « taillé pour les gars qui roulent en scoot, comme moi à Paris. »
À l’image d’AMI – sortie de l’imagination d’Alexandre Mattiussi après dix années de bourlingue dans des grandes maisons – qui s’est imposé par sa pertinence à épouser un marché masculin à la recherche de qualité et de simplicité, Officine Générale parle facilement aux mecs. « Le client homme est très loyal, quand il a trouvé une chemise qui lui plait, avec la bonne coupe, qui dure et au prix juste, il revient. » La marque possède déjà une tripotée de fidèles, notamment au Japon ou aux Etats-Unis, ses deux plus gros marchés. Alors que l’on discute sur le stand au Pitti, c’est d’abord Bruce Pask, l’influent monsieur mode du New York Times, puis la bande du GQ ricain qui se pointent pour lui serrer la pince et s’enthousiasmer devant la collection. « J’ai la chance que les gens aient adhéré facilement à ma démarche, ils sentent que c’est un produit intègre (…) Je ne crois pas aux choses hyper compliquées, tu as juste envie de fringues qui te vont bien, qui plaisent à ta nana ou à ton mec et qui ne te coûtent pas non plus un bras ».
Ce dimanche matin, les deux ans à faire le dos rond, les journées de 15 heures à tout gérer du design à la prod’ en passant par les envois, sont loin. Pierre a les traits fatigués de celui qui n’a pas assez dormi. Mais le soulagement d’avoir bouclé – et réussi – cette première présentation l’emporte sur tout le reste. À Florence quelques jours plus tôt il revenait sur le chemin (déjà) parcouru : « C’était dur mais à l’arrivée, tout ce qu’il y a dans cette collection, c’est moi. »
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