Une militante néo-nazie ukrainienne s’est glissée dans les pages du magazine féminin Elle dans le cadre d’un reportage sur des ukrainiennes comme les autres devenues combattantes après la révolution . De quoi susciter une vive polémique
Le magazine féminin Elle est empêtré dans une polémique dont il se serait bien passé. En cause, la publication du portrait d’une néo-nazie ukrainienne dans ses pages.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Une pleine page mettant en avant une combattante néo-nazie
Dans son numéro 3594 sorti en kiosques le 14 novembre, l’hebdomadaire a consacré quelques pages aux combattantes ukrainiennes volontaires engagées aux côtés des troupes de Kiev contre les séparatistes pro-russes. Parmi elles, Sveta, 19 ans. Blonde au sourire en coin. Un peu timide dans son treillis kaki. C’est sur son portrait qu’est apposé le titre suivant : « Ukraine : Une guerre si particulière ». Le magazine la décrit comme une « secrétaire et engagée volontaire », avant de lui laisser la parole : « Si les Russes rentrent dans ma ville, je tire. Si ce n’est pas moi qui va le faire ? ».
En réalité Sveta ne s’appelle pas Sveta. Son vrai nom est Vita Zaverukha. Et à en croire les photos publiées sur le réseau social VKontakte, équivalent russe de Facebook, Vita Zaverukha affiche des convictions politiques radicales. La jeune femme poste régulièrement des clichés d’Adolf Hitler, des reliques du Troisième Reich, et arbore même un top sans manche noir orné d’une croix gammée sur sa page personnelle. Elle ne se prive pas non plus de publier des appels à la haine en tout genre, comme cette petite infographie qui propose tout bonnement de faire exploser le parlement ukrainien avec des cocktails Molotov.
Des allégeances politiques passées inaperçues lors du reportage
Comment le magazine féminin a-t-il pu publier une photo pleine page de cette militante pour illustrer son reportage? Par mégarde, si l’on en croît le communiqué de presse émis par la rédaction juste après le début de la polémique, il y a quelques jours. L’hebdomadaire a reconnu son erreur et affirmé qu’aucun des deux journalistes ayant travaillé sur le dossier n’avait eu connaissance du profil réel de la jeune femme :
« Lors du reportage, la jeune femme incriminée, combattante du Bataillon Aidar, rencontrée le 2 octobre dernier, sur la ligne de front près de la ville de Lougansk, aucun élément, aucun signe extérieur distinctif, aucune parole dans l’interview, ne laissait comprendre ce jour-là que cette jeune femme était néo-nazie. »
Un bataillon qui suscitait pourtant la polémique depuis août 2014
Le magazine justifie aussi son erreur en évoquant la difficulté de déceler les préférences politiques des combattants du bataillon Aidar, formation nationaliste à laquelle Vita Zaverukha appartient. Ce groupuscule de combat fait pourtant l’objet de nombreuses critiques depuis début août. L’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, a dénoncé des exactions graves dans le Nord de la région de Luhansk. L’ONG Amnesty International a même été jusqu’à évoquer des crimes de guerre.
Et pourtant, les combattants engagés dans les rangs de ce groupe ne sont pas tous des criminels de guerre, ou militants néo-nazis ultra-violents. La réalité du terrain est bien plus complexe qu’il n’y paraît sur les zones de guerre. Des groupes d’allégeances très différentes peuvent être amenés à lutter côte à côte contre les pro-russes.
La jeune néo-nazie avait par ailleurs choisi de camoufler son identité derrière un pseudonyme, rendant encore plus complexe le travail de vérification pour les journalistes. Une tâche qui a pourtant été remplie par les internautes, à qui il n’aura pas fallu beaucoup de temps avant de découvrir le visage réel de la combattante.
Au delà de la mauvaise publicité faite à la version française de Elle, la polémique nourrit aussi la propagande du Kremlin. Le gouvernement de Poutine accuse en effet en permanence les militants de Maïdan, et tous ceux qui leur sont affiliés, comme de dangereux militants d’extrême droite. Un service involontaire rendu à Vladimir Poutine que Elle n’a visiblement pas du tout anticipé.
{"type":"Banniere-Basse"}