Le livre de cuisine est devenu la nouvelle vitrine du food business. Entre objet pop ovniesque et bible du lifestyle, décryptage d’un phénomène d’édition. Le point commun entre Eva Longoria, Les Soprano, Pierre Perret, Coolio ou Gwyneth Paltrow ? Ils ont tous signé un ouvrage culinaire. Une passion qui rapporte : ce secteur de l’édition […]
Le livre de cuisine est devenu la nouvelle vitrine du food business. Entre objet pop ovniesque et bible du lifestyle, décryptage d’un phénomène d’édition.
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Le point commun entre Eva Longoria, Les Soprano, Pierre Perret, Coolio ou Gwyneth Paltrow ? Ils ont tous signé un ouvrage culinaire. Une passion qui rapporte : ce secteur de l’édition est l’un des seuls à cartonner. En France, il a plus que doublé son chiffre d’affaires entre 2005 et 2010, passant de 43,1 à 90 millions d’euros (source : Syndicat national de l’édition). Dans la guerre contre la malbouffe, ces bouquins sont devenus l’outil indispensable de l’engouement actuel pour la cuisine. « De plus, il est toujours de bon goût, ou aujourd’hui branché, d’en posséder dans son salon », dit l’universitaire Nathalie Peyrebonne. « C’est un marqueur social, la preuve d’un certain raffinement. »
La food est tendance et certains de ses promoteurs sont devenus des stars. Cyril Lignac a vendu un million de livres dont 250 000 exemplaires du seul Oui chef !. Côté livres de cuisine popu, seuls ceux de Pierre Perret ou ceux à tendance régressive (Nutella, mug cake…) parviennent à concurrencer Paul Bocuse, Jean-François Piège ou Julie Andrieu ailleurs que dans les rayons de supermarché. Aux Etats-Unis, où la gastronomie est moins sacrée, l’entertainment en a fait un produit dérivé. Desperate Housewives, Mad Men, Hunger Games, Harry Potter, Bob l’éponge ont leur livre de recettes, objets popculture ovniesques. Michele Scicolone, l’auteur de The Sopranos Family Cookbook, estime en avoir vendu dix fois plus que ses livres de cuisine lambda.
Le cookbook est surtout un moyen pour certaines stars de faire fructifier leur image ou leur business. Sur un credo populaire, on trouve la confort food latino d’Eva Longoria, les recettes sudistes de la chanteuse country Dolly Parton ou la cuisine économe du rappeur Coolio.
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Le livre de cuisine est aussi la vitrine du juteux secteur du lifestyle, mélange de bien-être, de représentation et de distinction sociale. Gwyneth Paltrow, actrice oscarisée, a fondé en 2008 la compagnie en ligne goop.com, avant de publier en 2011 It’s All Good. Jessica Alba et Cameron Diaz sont aussi sur le créneau. A environ 40 ans, les trois actrices vendent des têtes saines dans des corps parfaits. Leurs recettes ? Elles sont dans leurs livres. On a jugé cinq cookbook juste pour le plaisir.
Boy George
Alors qu’il purgeait une peine de prison – pour harcèlement et séquestration d’escort boy – le chanteur s’est découvert une passion pour la cuisine macrobiotique et en a fait un livre à la couverture terrifiante.
Le livre : Karma Cookbook : Great tasting dishes to nourish your body and feed your soul, éd. Caroll & Brown, 2004.
Le style : Veggie/zonzon.
Pour qui : Ceux prêts à tout pour ne pas choper le scorbut grâce à une cuisine saine, même à faire des yoyos avec les draps de leur geôle pour se sustenter en boulgour et légumes frais.
La recette type : La soupe Chickpea Corruption.
Crédibilité culinaire : 5/10. On salue l’idée de la cuisine saine mais Boy George est surtout connu pour n’avoir jamais fait le même poids.
Liberace
Après avoir passé des décennies à jouer dans les casinos et salles les moins sobres de Palm Springs Las Vegas, le flamboyant pianiste a réuni ses recettes préférées. Souvent too much, elles prouvent que l’indigestion peut arriver avant même la mastication.
Le livre : Joy of Liberace, Retro Recipes from America’s Kitschiest Kitchen, éd. Angel City, 2007.
Le style : Cuisine/paillettes.
Pour qui : Ceux qui n’ont pas peur de mettre du kitsch dans leurs petits plats et de mitonner leurs recettes étouffe-chrétien les yeux ourlés de khôl.
La recette type : Chicken à la King of Bling ! ou encore la bien trouvée Salamiami Bouquet.
Crédibilité culinaire : 3/10. Liberace est probablement plus doué pour l’ambiance et le dressage qui fait mal aux yeux que pour la cuisine.
Pierre Perret
Petit, le chansonnier du tourne-disques Fisher Price nous faisait ânonner Ouvrez ouvrez la cage aux oiseaux ou Le Zizi en gloussant. Pierre Perret a tout du papy sympa qu’on aimerait avoir. Avec plusieurs ouvrages à son actif, sa reconversion culinaire n’a rien de bidon et on adhère à sa devise “Laissez l’insipide aux médiocres !”.
Le livre : Tous Toqués, éd. Le Cherche Midi, 2010
Le style : Terroir twisté/retour du marché.
C’est pour qui : Les poètes de la blanquette, les ayatollahs de la bonne franquette qui trouvent Masterchef trop bling.
La recette type : Le cassoulet, recuit sept fois pendant deux jours ou le maki de poule au pot.
Crédibilité culinaire : 10/10. L’ami Pierrot a même une appli de ses recettes !
Les Scorcese
Maman Catherine Scorcese fait régulièrement de petits caméos dans les films de son fiston Martin. Mais, disons le franchement, nous sommes plus intéressés par son expertise de consultante culinaire. Pas radine, elle transmet ses recettes de famille depuis trois générations, de la Sicile jusqu’à Little Italy.
Le Livre : Italianamerican : The Scorcese Family Cookbook, éd. Random House, 1996.
Le style : Cuisine de la mama.
C’est pour qui : Ceux qui ne se sont jamais remis de la scène de la sauce tomate dans Les Affranchis – la seule recette à avoir été créditée au générique d’un film ; qui coupent la pizza au ciseau ; les mafieux à la petite semaine.
La recette type : Lasagne, veau Spiedini et la sauce tomate à la viande.
Crédibilité Culinaire : 10/10. Pour sa cuisine “à l’oeil” sans aucune mesure et son mantra badass “si c’est bon, c’est bon, sinon, dommage.”
Gwyneth Paltrow
Ne vous y méprenez pas : sous ses airs d’actrice lisse, Gwyneth Paltrow – à la fois élue “personnalité la plus énervante” en 2011 et “plus belle femme du monde” en 2013 – n’est pas la dernière à passer derrière les fourneaux. En quelques années, plusieurs livres et son site goop.com, elle s’est imposée comme la gourou de la bouffe saine.
Le livre : It’s all good, éd. Grand Central, 2013.
Le style : “Quinoa is sexy”.
Pour qui : Ceux qui ont mangé une frite une fois en 2003, les toqués du smoothie, les flippés de l’huile de palme, les “anti” (gluten/viande/soja/OGM/caféine).
La recette type : Poulet grillé au houmous, citron et romarin.
Crédibilité Culinaire : 9/10. En matière de cuisine, elle a de la suite dans les idées et réussit le tour de force de rendre appétissantes toutes ses recettes super saines. Les jaloux vont maigrir.
Sandie Dubois et Anne Laffeter
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