La Corée du Nord est de plus en plus friande de crypto-monnaie, un moyen très discret de renflouer les caisses de l’Etat. Etouffée par les sanctions économiques, la dictature n’hésite pas à pirater Bitcoin et autres devises virtuelles pour parvenir à ses fins.
Les crypto-monnaies pourraient être une bouée de sauvetage pour la Corée du Nord ? C’est en tout cas ce que craignent certains spécialistes de ces questions. Cité par Reuters, Mun Chong-hyun, analyste chez ESTsecurity, une société de cybersécurité sud-coréenne, estime que les crypto-monnaies sont le meilleur moyen pour les Nord-Coréens de gagner des devises étrangères. Elles présentent l’avantage de pouvoir être blanchies plusieurs fois et d’être difficiles à tracer.
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Faire rentrer du cash
Plusieurs éléments portent en effet à croire que la Corée du Nord forme ses hackers à détourner des monnaies virtuelles afin de faire rentrer du cash dans les caisses du régime stalinien. Et dans le viseur des pirates informatiques de Kim Jung-Un, il n’y aurait plus seulement le Bitcoin, la crypto-monnaie star, mais aussi une moins connue, le Monero.
Récemment, l’Université de science et de technologie de Pyongyang a invité des experts étrangers. Leur mission : donner des conférences sur des protocoles liés aux crypto-monnaies tels que le « minage » ou le blockchain. Réponse du porte-parole nord-coréen : “C’est pour donner aux futures générations plus de possibilité pour œuvrer au développement du pays.”
La théorie des spécialistes en sécurité informatique est claire : plus les sanctions économiques étouffent la Corée du Nord, plus le pays va se tourner vers les devises virtuelles pour trouver un peu d’air frais. Et pour cela, quoi de plus simple que de se tourner vers son frère-ennemi, la Corée du Sud, où se déroulent 15 % à 25 % des échanges mondiaux de bitcoins.
Cinq millions de dollars
Le bourses Bitcoin sont régulièrement la cible de piratage informatiques. Si la Corée du Nord est tout aussi régulièrement pointée du doigt, les soupçons les plus flagrants remontent à quelques mois. En avril 2017, une des principales plateformes sud-coréenne de Bitcoin, Youbit, a fait l’objet d’une cyberattaque. Le casse virtuel imputé à la Corée du Nord s’élevait à l’équivalent de 5 millions de dollars. Soit 40 % des actifs de Youbit disparus…
En septembre, l’agence américaine de sécurité informatique, FireEye, publiait un rapport estimant à son tour que les activités de piratage de la Corée du Nord croissaient avec l’alourdissement des sanctions économiques. Si les preuves ne sont pas irréfutables, certains indices font peser les soupçons sur la dictature coréenne. Notamment un logiciel utilisé exclusivement par des pirates nord-coréens.
Mineurs de crypto-monnaie
Un mois plus tard, une autre agence, Recorded Future, mettait à jour une nouvelle technique de hacking. Désormais, plutôt que des logiciels malveillants, les Nord-Coréens se seraient spécialisés dans l’installation de « mineurs » cachés sur les machines des utilisateurs.
Le « minage » de crypto-monnaie est l’un des moyens d’en gagner. En clair, c’est un processus qui revient à résoudre une série d’équations mathématiques en échange duquel on se voit attribuer des bitcoins. Mais ce n’est pas à la portée du premier venu car les opérations sont tellement complexes qu’elles nécessitent des ordinateurs surpuissants. D’où l’intérêt d’aller pirater des serveurs.
En décembre 2017, alors que le bitcoin est au plus fort, une série d’attaques met définitivement à mal Youbit, la plateforme sud-coréenne. Contrainte de mettre la clef sous la porte, 17% de ses actifs ayant été volés. Cela entraine une chute du bitcoin. La première depuis plusieurs mois.
Monero, nouvel eldorado
Mais au début de l’année 2018, des spécialistes informatiques ont mis à jour l’appétence des hackers nord-coréens pour une autre monnaie, le monero. Moins connue, un peu moins rentable, mais plus discrète car encore moins traçable que le bitcoin. Monero est classée 14e au classement des crypto-monnaie, selon le site Coinmarkecap. Son taux de change s’élève à 311 dollars (contre plus de 11 000 pour le bitcoin).
Le décollage du cours de Monero il y a un an serait justement dû à l’engouement des hackers pour cette monnaie virtuelle. Cette dernière qui ne valait que 10 dollars en janvier 2017 a attiré l’attention des spéculateurs au fil de sa prise de valeur. Entraînant dans leur sillage une myriade de logiciels malveillants visant à la détourner.
Direction Pyongyang
A l’été 2017 déjà, un groupe de hackers avaient « miné » du monero via des serveurs à l’insu de leur propriétaire. Valeur estimée du casse : 24 000 dollars.
Aujourd’hui, les soupçons d’un minage massif de monero semblent se porter sur la Corée du Nord. Selon un rapport d’Alien Vault, une agence de sécurité informatique, une application aurait été créée fin décembre pour miner du monero via des ordinateurs hôtes.
Jusqu’ici rien de bien nouveau puisque de telles applications sont monnaie courante (c’est le cas de le dire). Mais dans ce cas précis, celle-ci redirigerait directement les fonds vers… l’université Kim Il Sung à Pyongyang. Une preuve de plus de l’appétence du régime nord-coréen pour les crypto-monnaies.
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