Qu’aurait pensé le pape du pop art de la suppression de la pub sur le service public ? Une exposition à Paris rend compte de la fascination de l’artiste, téléspectateur-producteur, pour ce média.
Les publicités sont comme des remontants, la programmation devient trop dense s’il n’y a pas assez de pubs intercalées. Quand je regarde une émission “sans pause publicitaire”, ça me donne la bougeotte.” Ce commentaire, daté des années 70, est d’Andy Warhol, téléphile incontestable et solitaire avéré, connu pour ses zappings obsessionnels entre La croisière s’amuse (dans laquelle il fait une apparition), les dessins animés et les flash info, mais aussi Star Trek, Dynastie ou Dallas. A la Maison Rouge, à Paris, l’exposition Warhol TV rend compte de la fascination de Warhol, en tant que téléspectateur et producteur, pour ce média.
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“J’explore l’oeuvre de Warhol depuis des années et je me suis rendu compte que cet aspect-là de son travail, parce qu’il ne comportait pas d’enjeux financiers, a été assez mal exploité”, analyse la commissaire de l’exposition, la journaliste Judith Benhamou. “Dès 1964, Warhol produit un film expérimental qu’il intitule Soap Opera et qu’il entrecoupe de véritables publicités. Un ready-made télévisé en somme. Il entame ensuite la production de trois vrais soap operas qui resteront inachevés, avant d’enchaîner, en 1979, avec la production d’émissions diffusées sur le câble et sur MTV.”
Parmi les productions les plus marquantes d’Andy Warhol, il y a Fashion, avec en guest-star Debbie Harry du groupe Blondie décryptant ses codes vestimentaires, et Diana Wreeland, grande prêtresse de la mode newyorkaise, discutant tendance et surf avec le conservateur du Metropolitan de New York. Mais aussi Andy Warhol TV et Andy Warhol Fifteen Minutes, une série d’émissions inspirées par son magazine Interview, dans lesquelles Warhol déniche bon nombre de “nouvelles stars”, à l’image de la photographe Cindy Sherman ou du tout jeune styliste Marc Jacobs, alors âgé de 24 ans.
“La chose la plus fascinante chez Warhol, c’est qu’il n’a jamais d’a priori, décrypte encore Judith Benhamou. Il aurait certainement pêché dans la télé d’aujourd’hui ce qu’il y a de plus défrisant : les émissions de télé-réalité ou toutes ces émissions de conseil comme Super Nanny ou C’est du propre ! qui sont un peu ses bébés.” A la question “Andy Warhol se serait-il opposé à la suppression de la pub sur le service public ?”, la réponse est certainement oui. Même si, comme le rappelle la commissaire de l’exposition, “Warhol, qui cultivait l’art de l’esquive, aurait sans doute répondu “Oh, Really”…
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