Précurseur du sportswear, Michèle Rosier créait dans les années 60 des vêtements esthétiques et fonctionnels pensés pour des femmes actives. Elle est décédée ce 2 avril à l’âge de 86 ans.
La mode vient de perdre une de ses grandes stylistes : Michèle Rosier, femme qui dès les années 60 avait investi le champ du sportswear et avait travaillé à inventer des vêtements amples, glamours et fonctionnels, autorisant aux femmes une grande liberté d’action et de mouvement. Elle est morte le 2 avril à 86 ans. Elle a donné son corps à la faculté, amusée, rapporte son entourage, par l’idée d’être disséquée par de jeunes apprentis médecins. Elle s’est choisi un épitaphe virtuel, qui rend compte de son caractère, plein d’humour : « Riez pour elle« .
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Michèle Rosier a d’abord été journaliste. Sans doute est ce sa mère, Hélène Lazareff, fondatrice du magazine ELLE, qui lui donna le goût de l’écriture. Mais le goût de la mode la rattrape. Dans les années 60, alors qu’elle a une trentaine d’années, elle lance sa marque de vêtements, V de V (vêtements de vacances), une ligne de pièces sportswear. Lydia Kamitsis, historienne de la mode, directrice de recherche à la Sorbonne, auteure et commissaire d’expositions, a publié l’an passé l’ouvrage Michèle Rosier aux Editions du Regard, qui revient sur la carrière de cette femme talentueuse et en phase avec son époque. Elle explique :
« Michèle Rosier imagine des collections de prêt-à-porter, c’est une autre perspective de la mode. Elle a participé à la démocratisation du vêtement. Ce n’est pas de la couture, ce n’est pas un vêtement de représentation. C’est un vêtement qui fonctionne. Elle a été attentive aux attentes des femmes de cette époque, qui sont de la génération du mouvement, de la liberté. Sa pensée englobe tout un mode de vie ».
Néanmoins, l’esthétique du vêtement occupe une place fondamentale dans son travail. C’est elle qui retravaille le vêtement de ski, afin qu’il ne « transforme plus les femmes en paquet de coton« . Elle l’imagine en argent, couleur qui était jusqu’alors réservée aux robes de soirée ou à l’électroménager. La créatrice affectionne les matières plastiques, si bien que la presse internationale la surnomme « Vinyl girl ». « Elle aime le fait que le vinyle brille au soleil mais qu’il soit aussi beau sous la pluie, quand les gouttes d’eau se posent dessus. Sa vision est très poétique. Mais c’est également parce que cela se nettoie d’un simple coup d’éponge. Elle marie à merveille esthétique et praticité« .
Le vêtement de ski selon Michèle Rosier. Photo Michèle Rosier / Editions du Regard
Selon Françoise Lebrun, actrice dans le film Mon cœur est rouge de Michèle Rosier et amie de longue date, elle fait partie des personnalités qui, au même titre qu’Agnès b ou Sonia Rykiel, ont changé l’image de la femme. En effet, plus tard, à travers ses films, elle dressera le portrait de femmes fortes, indépendantes, émancipées. « C’était une femme extrêmement libre« , poursuit Lydia Kamitsis. George qui ?, long-métrage retraçant la vie de George Sand, ou encore Ah, la libido !, son dernier film en date, chronique de quatre amies qui s’offrent les services de toy-boys, sont de bons exemples.
« Ses films ressemblent à sa mode, dans le sens où ils sont faits avec justesse et légèreté. Parce qu’elle a ce goût immense pour la vie et pour les autres, et ce don pour attraper les détails, la poésie du quotidien.«
Bien que méconnue car très discrète, Michèle Rosier a été une femme aux talents multiples, qui avait tout compris des femmes et de son temps. Avant-gardistes, ses créations conservent écho et éclat dans la mode d’aujourd’hui.
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