Suite de notre dossier sur la « révolution mobile ». Aujourd’hui, pourquoi la télévision mobile continue à piétiner, entre les incertitudes sur le modèle économique à adopter, une technologie pas très adaptée, mais aussi une offre mal définie.
Regarder la télé sur son téléphone portable : ce qui était annoncé voici quatre ans comme un des pivots de la révolution high-tech est peut-être en train de faire un flop. Si la chose est techniquement possible depuis la mise en place de la 3G, la pratique reste encore peu répandue. Une étude, menée en Europe et aux Etats-Unis par le cabinet Forrester Research et publiée récemment, établit pour la TV sur mobile un taux de pénétration de 3% en 2008. Pire, la demande semble inexistante.
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Les premières raisons de cet échec seraient avant tout techniques. “La technologie 3G n’est pas très adaptée pour diffuser du flux, explique Gabriel Dabi-Schwebel, consultant télécom et médias. Il faut attendre presque trente secondes pour avoir une image!” D’où le projet de créer un nouveau réseau dédié à la TV mobile en France, le DVB-H, censé offrir la qualité d’image d’un vrai réseau télé.
Après un appel à candidatures lancé par le CSA, seize chaînes ont été sélectionnées. Mais le lancement du réseau n’en finit pas de patiner – les opérateurs et les éditeurs ayant du mal à se mettre d’accord sur la répartition des coûts. Gabriel Dabi-Schwebel : “Il existe des craintes sur la capacité à rémunérer le marché, d’autant qu’il va coûter cher, puisqu’il va falloir installer des antennes partout.” C’est la question d’un modèle économique viable qui se pose, et ce malgré les expériences menées à l’étranger. “La mise en place de la TV mobile au Japon et en Corée marche bien mais ne donne pas de résultats concluants. La question est la suivante : le consommateur est-il prêt à payer son abonnement plus cher pour un service virtuel ?”
A cette interrogation s’ajoute le problème du contenu : quelle offre proposer, qui soit adaptée à un usage extrêmement fragmenté ? A l’échelle de la consommation de télévision (3 heures par jour en moyenne), la consommation de TV sur mobile est minime. Chez Orange, on estime la durée moyenne de connexion à 55 minutes par mois. Elle s’élève à environ 1h30 quand le client dispose d’une offre TV illimitée. Son utilisation comme petite télé de complément semble minoritaire. “Elle s’utilise essentiellement en mode “kill time”, soit des petites successions de quelques minutes : je suis dans le métro, je veux les résultats du foot, je me connecte une ou deux minutes”, explique Philippe Blanc, vice-président chez Capgemini Consulting.
D’où la nécessité pour les chaînes de penser des formats spécifiques plutôt que les programmes habituels reformatés. Philippe Blanc : “Il y a eu des essais sur des minidécoupages de la série 24, mais ça n’a pas marché parce qu’une série se regarde de façon confortable. En revanche, un programme fait de petits extraits du off d’une émission de télé-réalité a eu un gros succès parce qu’il répondait bien à une consommation en mode snacking.”
Mais à force d’hésitations, certains ont bien le sentiment que le projet va finir par être enterré. Gabriel Dabi-Schwebel : “Les opérateurs à présent se concentrent beaucoup plus sur la 4G que sur la télé sur mobile. J’ai l’impression qu’un train est passé.”
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