Barack Obama a gagné son pari : par 219 voix contre 212, la Chambre des représentants a enfin approuvé la réforme de la santé aux Etats-Unis, sur laquelle le Président avait investi toute son énergie. Obama s’est félicité de sa ténacité : il n’a pas abandonné ce chantier malgré la crise et l’opposition de puissants lobbies. Par les clivages qu’il a créés, le débat, très difficile, marquera pour longtemps la vie politique américaine. En partenariat avec Rue89.
[attachment id=298]Barack Obama a gagné son pari : par 219 voix contre 212, la Chambre des représentants a enfin approuvé la réforme de la santé aux Etats-Unis, sur laquelle le Président avait investi toute son énergie. Obama s’est félicité de sa ténacité : il n’a pas abandonné ce chantier malgré la crise et l’opposition de puissants lobbies. La plupart des Américains seront couverts, d’ici à quatre ans, contre la maladie. Par les clivages qu’il a créés, le débat, très difficile, marquera pour longtemps la vie politique américaine.
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(De nos archives) En moyenne, les Américains dépensent énormément d’argent pour leur santé (18% du PIB contre 11,5% en France). Mais ces dépenses sont inégalement réparties. Pour ceux qui ne sont pas couverts par une assurance (plus de 46 millions d’Amércains, 16% de la population), le risque d’être mal soigné, ou d’être ruiné par un problème de santé, est grand.
Barack Obama s’est engagé à réformer ce système injuste, mais son projet, plutôt minimaliste comparé aux systèmes européens, est qualifié de « socialiste » par les Républicains, qui ont faili le faire dérailler.
[attachment id=298]Comment sont actuellement couverts les Américains ?
En France, chacun cotise à l’assurance maladie, organisme géré par le patronat, les syndicats et l’Etat. Cet organisme rembourse les dépenses des assurés sociaux.
Rien de tel aux Etats-Unis. La population se divise en plusieurs groupes. Le total fait plus de 100% parce que certains Américains sont couverts de plusieurs façon (ex : medicare et assurance).
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Ceux qui sont couverts par la puissance publique (25% de la population) :
Deux programmes, qui coutent plus de 4% de point de PIB, sont en place :
1) Medicare pour les plus de 65 ans et les invalides, sans condition de ressource. Son coût est de plus de 200 milliards de dollars.
2) Medicaid pour les pauvres. Medicaid coiffe une cinquantaine de systèmes, un par Etat. L’Etat fédéral le cofinance.
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Ceux qui sont couverts par une assurance fournie par l’employeur (60%) :
C’est le cas de l’essentiel des Américains. Le système ressemble à nos mutuelles complémentaires, sauf qu’elles ne sont pas complémentaires. Lorsque l’assurance est fournie par l’employeur, elle fait partie de la rémunération du salarié : ce dernier ne paye qu’une partie (exemple : 30%) des cotisations. Le partenaire-assureur peut être un « HMO », assureur s’appuyant sur un réseau de prestataires de soins (l’assuré ne peut consulter que les praticiens du réseau).
Ce système est devenu extrêmement coûteux pour les entreprises.
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Ceux qui s’assurent directement (10%) :
S’ils ne bénéficient pas d’assurance d’entreprise, les Américains peuvent s’assurer individuellement auprès d’organismes. Mais c’est hors de prix.
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Ceux qui ne sont pas du tout couverts (plus de 16%) :
Parce qu’ils ne sont pas assez pauvres pour être couverts pour Medicaid (ou mal informés) et parce qu’ils ne pas assez riches pour s’offrir une assurance individuelle. En cas de pépin de santé, ils doivent payer les frais directement (ils se présentent comme « self payer »), ce qui peut être extrêmement coûteux. En cas de gros problème, dans certaines villes, ils peuvent être admis dans des hôpitaux publics.
[attachment id=298]Que propose le plan Obama ?
Il ne bouleverse pas le système. Il maintient l’assurance privée mais propose de mettre en place un régime alternatif (c’est-à-dire concurrent des assureurs) qui permettrait de peser sur les coûts, et ainsi d’améliorer la couverture des Américains tout en facilitant la maîtrise des dépenses.
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Aux Américains sans couverture maladie, de nouvelles assurances santé seraient proposées à des prix abordables. Cela passerait par un organisme servant d’intermédiaire entre assureurs et assurés.
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Les employeurs auraient le choix entre contracter une assurance privée comme aujourd’hui, ou alors payer une cotisation à un nouveau système.
[attachment id=298]Qui pilotera le nouveau système ?
C’est une des questions au cœur de la polémique. L’idée de départ, reprise par les commissions de la Chambre des représentants, était de confier la gestion à un organisme public. Les opposants au projet, ont accusé les démocrates de vouloir subrepticement imposer un « payeur unique » public comme dans certains pays d’Europe ou au Canada.
Pour calmer ces critiques, des sénateurs ont proposé de mettre en place une organisation coopérative à but non lucratif, chargée d’une mission d’intérêt général : une sorte de grosse mutuelle. L’administration Obama n’y est pas hostile.
[attachment id=298]Qui s’oppose à la réforme, qui la soutient ?
La ligne de front n’est pas tout à fait la même qu’en 1994, lors de la première grande tentative (avortée) de réforme.
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Le front des opposants :
-Les idéologues conservateurs : ils considèrent généralement que la redistribution est contraire à l’idéal américain de « responsabilité » : l’argent que l’on gagne par son travail ne doit pas être dépensé pour d’autres.
A la pointe du combat contre « l’Obamacare », diverses organisations comme Americans for Prosperity (et sa succursale Patients United Now), Freedom Works, ou encore Independance Institute au Colorado… (Voir leurs vidéos)
-Une partie des assureurs privés, qui craignent la concurrence d’un organisme public.
-Une partie des médecins et autres professionnels de la santé (qui avaient déjà contribué à torpiller la réforme Clinton, il y a quinze ans).
-Evidemment les Républicains, qui ont trouvé dans l’affaire un bon angle de tir contre Obama : cela peut-être « son Waterloo », se disent-ils. Leur message martellé aux Américains : la réforme, coûteuse (1000 milliards sur dix ans), va entraîner une hausse massive des impôts et un rationnement des soins.
La lutte contre cette réforme « socialiste » permet de ressouder la droite, divisée après la défaite de John McCain. L’ex-candidate à la vice-présidence Sarah Palin, dénonce le « mal absolu » et met en garde contre la mise en place de « commissions de la mort » (« death panels ») peuplées de bureaucrates choisissant qui pourrait être soigné et qui devrait être sacrifié…
Ceux qui soutiennent :
–La grande majorité des démocrates, même si ceux-si sont divisés entre la gauche du parti, qui est pour une réforme musclée, et son aile conservatrice, (les « blue dogs ») qui rêve d’édulcore le projet à coup d’amendements.
–Les grands groupes industriels (automobile, aviation…) qui espèrent que cela les déchargera le poids de la couverture maladie.
–L’American Medical Association (association de médecins) et certains groupes hospitaliers
-Une partie de l’industrie pharmaceutique. C’est le cas du Pharmaceutical industry trade group and Families USA et du Pharmaceutical Research and Manufacturers of America. qui ont ressuscité et détourné « Harry et Louise » (un spot de pub dirigé contre la réforme Clinton en 1994)
► Mise à jour le 14/08/09 : ajout de la liste des soutiens.
Article initialement publié le 23 août 2003.
Photo : Anne-Lyne Bancalin pour Amphisdailleurs.com sur Flickr
- ► Le projet du candidat Obama
- ► La politique de la santé (site de la Maison Blanche)
- ► L’avancement de la réforme résumé par Wikipédia (en anglais)
- ► Etats-Unis : une réforme de la santé qui passe mal (Le Monde)
- ► Pourquoi Obama doit faire des concessions sur sa réforme santé (l’Expansion)
- ► Une étude très claire sur le système américain (DREES, 2001)
- ► Santé : Obama victime de sa propre stratégie ( par le Professeur Charles Noble dans Libération)
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