Dans un documentaire fourni, Jean-Louis Pérez enquête sur les origines et les pratiques douteuses de la Fifa, pompe à fric insensée qui navigue au-dessus des lois.
Les chats de Chuck ont leur propre appartement new-yorkais, loué 6 000 dollars par mois. Une simple annexe du pied-à-terre de leur maître dans la Trump Tower, au loyer de 18 000 dollars.
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Secrétaire général de la Concacaf (Confédération de football d’Amérique du Nord, d’Amérique centrale et des Caraïbes), Chuck Blazer est un homme de poids, avoisinant le double quintal, et de chiffres. On le surnomme Mister 10 % pour les commissions qu’il touche sur tous les marchés juteux de la Concacaf.
Tombé en 2011 pour corruption et évasion fiscale, Blazer est devenu le cheval de Troie du FBI dans la Fifa zurichoise, dont plusieurs dirigeants ont été inculpés dans la foulée, en 2015. Avec, pour conséquence, la mise à pied de deux des principaux responsables de la Fédération internationale de football, son président en titre, Sepp Blatter, puis le président de l’UEFA (Union of European Football Association), Michel Platini.
L’ère Havelange
Dans cette enquête, le réalisateur Jean-Louis Pérez explore les origines et ramifications d’une organisation d’où découle un système de type quasiment mafieux. Tout commence en 1904, dans un modeste bureau de la rue Saint-Honoré, à Paris. La Fifa, alors à but non lucratif, vivote jusqu’en 1930, où son président lance la première Coupe du monde en Uruguay.
L’organisation ne fait pas de vagues jusque dans les années 1970, quand le Brésilien João Havelange, qui en a pris la tête, décide de passer à la vitesse supérieure. Il élargit l’éventail des pays qualifiés à la Coupe, utilise à plein des sponsors comme Coca-Cola – dont elle participera au succès mondial – ou Adidas, et surtout négocie au mieux les droits de télédiffusion des matches. Ce sera la grande affaire de l’ère Havelange : par le biais de sa société annexe ISL, le pdg d’Adidas, Horst Dassler, gère les droits télé du Mondial et arrose au passage la Fifa et ses dirigeants.
L’ère Blatter
Après Havelange, quasiment éjecté par son secrétaire général, Sepp Blatter, les magouilles redoublent. Blatter augmente par exemple les droits télé de façon considérable ; la manne afférente rejaillit certes sur diverses fédérations nationales – de grosses sommes seront distribuées – mais souvent elle tombera dans la cagnotte privée des dirigeants locaux. Voir l’exemple du Cameroun où, malgré des millions injectés par la Fifa, l’équipe nationale patauge dans la gadoue.
Le plus grave, au-delà du choix évidemment truqué des derniers pays organisateurs, Brésil (2014), Russie (2018) et Qatar (2022), qui a mis le feu aux poudres, est que la Fifa se place au-dessus des lois. “Aucune autre organisation, explique Guido Tognoni, ancien cadre de la Fifa, n’a les moyens de faire suspendre les bases juridiques et légales d’un pays.” La Fifa, elle, sait faire des offres qu’on ne peut pas refuser.
La Planète Fifa documentaire de Jean-Louis Pérez. Mardi 23, 20 h 55, Arte
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