“Tu sors des toilettes, tu croises un type formidable, il te met une main au cul et te propose de baiser sa femme, alors forcement, ça crée des liens”, explique Frank, 32 ans, vêtu d’un harnais et d’un slip en vinyle. Barman le jour, il a pour habitude fréquenter les Nuits Elastiques, le rendez-vous mensuel […]
“Tu sors des toilettes, tu croises un type formidable, il te met une main au cul et te propose de baiser sa femme, alors forcement, ça crée des liens”, explique Frank, 32 ans, vêtu d’un harnais et d’un slip en vinyle. Barman le jour, il a pour habitude fréquenter les Nuits Elastiques, le rendez-vous mensuel des fétichistes, spécialisé dans le cuir et latex.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Cette nuit-la, sur une péniche amarrée près de Bercy, 400 personnes se réunissent armées de chaines, fouets, cordes, dans des costumes allant du moulage intégral en vinyle, à des plus ludiques soubrettes, militaires en porte jarretelles et pirate des Caraïbes.
La soirée commence calmement, autour d’une bière et de quelques pas de danses, mais, une fois la salle pleine et l’ivresse grandissante, chacun se détend et sort ses jouets. Tous, dans le plus grand des respects (personne n’est contraint à quoi que ce soit), s’adonnent à des plaisirs peu connus de la culture mainstream: esclaves enfermés dans des cages, cires brûlantes, ateliers fouets, démonstration de martinet sur fesses dénudées.
“Le but est de se retrouver, sans limites, dans la plus grande acceptation d’autrui” explique Francis Dedobbeleer, l’organisateur des soirées. Il lance cette nuit en 1998, à une époque où la société censure encore ces pratiques annexes. Aujourd’hui, connu sous le nom de DJ Francis Loup, il reçoit chaque mois entre 250 et 350 personnes. Une nuit devenue incontournables pour les adeptes de bondage, m’assure la clientèle.
Tous genres, âges et classes sociales se mélangent, des novices, des habituées, des étudiantes rockeuses et des sexagénaires avertis. “Il y a une mixité qu’on ne voit nulle part d’autre à Paris” assure Carine, 43 ans, chef de projet dans la publicité, curieuse de savoir si Les Inrocks Style cherchent des stagiaires. “Ma fille est en école de journalisme!” s’exclame-t-elle en me faisant admirer une robe en latex aux découpes ingénieuses dévoilant intégralement son postérieur. Plus tard, je recroiserai Carine en train de ligoter les couilles d’un monsieur qu’elle fouette en même temps, tout en criant “je vous laisse ma carte!”
Détail surprenant? L’attention portée à la mode. Oreilles de chats en cuir découpé main du créateur Ilya Fleet, robe-camisole de force haute couture, culotte en cuir et chaîne à la fabrication artisanale. Les invités ne demandent qu’à se faire prendre en photo, ravis de montrer leurs tenues. Un photocall permet même de s’immortaliser dans des poses coquines.
“C’est du sexe sans être tout à fait du cul classique, et c’est un des rares endroits ou on peut être soi-même” dit Mike, esclave fétichiste des pieds, qui déambule avec un tabouret dépliable sous le bras, lui permettant de masser quiconque, au milieu de la pièce. Il me demande si il peut me lécher les pieds. Je serais presque tentée. Il est temps d’aller se coucher.
Alice Pfeiffer
Photos : Gilles Uzan
{"type":"Banniere-Basse"}