Loup Bureau, journaliste français de 27 ans, a été placé en détention mardi dernier par les autorités turques, qui le soupçonnent d’activités « terroristes » pour ses reportages dans les territoires kurdes.
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Disparu à la frontière turque
Le 25 juillet, Loup Bureau disparaît. Son père, Loïc, suivait son itinéraire via Facebook et les mouvements de son compte bancaire. Sans nouvelles, il décide alors de remonter sa piste en contactant les personnes qu’il avait rencontrées pour son reportage au Kurdistan irakien. Il en déduit que son fils a disparu après avoir quitté Erbil, capitale du territoire autonome, alors qu’il approchait de la frontière turque. Peu après, il contacte la cellule de crise du Quai d’Orsay qui lui apporte rapidement des réponses.
Il a été interpellé au poste-frontière d’Habur lors d’un contrôle de routine et placé en garde à vue pendant 24 heures avec d’autres étrangers. Le ministère des affaires étrangères a pu déterminer qu’il avait été transféré le 26 juillet à la prison de Sirnak en Turquie.
La cause de son arrestation ? Son appartenance supposée à un « groupe terroriste », en l’occurrence, ce sont ses liens avec les organisations kurdes qui lui sont reprochés. Le principal élément du dossier est un reportage retrouvé sur son ordinateur qu’avait réalisé Loup Bureau en 2013 pour TV5 Monde, auprès des combattants kurdes en Syrie (YPG) assimilés par Ankara au PKK qui lutte pour l’indépendance du Kurdistan turc et qui fait l’objet d’une sévère répression.
Loïc Bureau n’a pu avoir son fils au téléphone que 2 minutes, le temps seulement de récolter les informations les plus essentielles à sa défense. Il s’adresse à l’avocat Martin Pradel qui avait déjà défendu Mathias Depardon, journaliste franco-belge qui avait été détenu lui aussi pendant un mois dans les prisons turques cette année. Un avocat turc a également été mandaté sur place.
« La seule raison pour laquelle Loup Bureau a été interpellé, c’est parce qu’il est journaliste«
Etudiant à Nantes et passionné par le reportage de guerre, Loup Bureau a effectué plusieurs reportages comme free lance ces dernières années. Dans son communiqué demandant la libération immédiate du journaliste, Reporters Sans Frontières (RSF) précise :
« Âgé de 27 ans, Loup Bureau termine ses études en journalisme : il doit soutenir son mémoire en septembre. Mais il a déjà multiplié les reportages sur différents points chauds de la planète : l’Égypte où il est resté un an après la révolution de 2011, l’Ukraine où il a coréalisé un reportage primé sur Maïdan et assisté à l’annexion russe de la Crimée en 2014, les zones tribales pakistanaises… »
Les syndicats de journalistes (SNJ, SNJ-CGT, CFDT-Journalistes, IFJ, EFJ) ont fait part de leurs inquiétudes et demandé la libération du jeune homme. En parallèle de ces déclarations de solidarité, un comité de soutien regroupant sa famille, ses amis et ses collègues s’est formé et communique sur Facebook et Twitter via une page et un hashtag #FreeLoupTurkey qu’ils appellent à utiliser largement afin de faire connaître son cas. Une pétition a été mise en ligne, elle regroupe déjà 5000 signataires.
Cette mobilisation qui vient appuyer l’action du ministère des Affaires Etrangères, a, comme son père le déclarait à Mediapart, permis d’améliorer les conditions de détention du journaliste :
« Les démarches diplomatiques et le soutien de la presse en France font que, compte tenu du contexte, il a un traitement plutôt privilégié par rapport à un simple détenu de droit commun. Il bénéficie d’une cellule individuelle, a accès à une télévision. La prison a pris la précaution de mettre un gardien anglophone dans le couloir afin d’éviter un isolement linguistique total. »
Selon son avocat : « la seule raison pour laquelle Loup Bureau a été interpellé, c’est parce qu’il est journaliste ». Les autorités turques multiplient en effet les attaques contre la liberté de la presse et n’hésitent pas à emprisonner des journalistes étrangers, toujours en vertu du motif terroriste. Depuis la tentative de putsch de juillet 2016, 100 journalistes ont été emprisonnés et 150 médias fermés. En juillet, 17 journalistes d’un journal d’opposition avaient été jugés et encourent jusqu’à 43 ans de prison. La Turquie se classe en 155ème position sur 180 pays selon le classement mondial de la liberté de la presse 2017 établi par RSF.
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