Le contre-défilé du 14 Juillet organisé par la Brigade activiste des clowns (BAC) a subi les assauts de la pluie et les facéties de la police.
Au commencement, il y avait la pluie. Battante, elle a inondé le parvis du Louvre en quelques minutes, alors que des centaines de touristes en tongs s’enfuyaient en piaillant.
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Les clowns de la BAC (Brigade activiste des clowns) s’étaient donné rendez-vous à 14 heures place du Carrousel, face au jardin des Tuileries, pour leur traditionnelle contre-manif du 14 juillet. Cette année, ils avaient opté pour un “défilé néo-clownonial” de circonstance.
A l’heure dite, une trentaine de clowns (encore en civil) se replient dans les sous-sols du Carrousel du Louvre, enfilent leurs costumes, maquillent leur visage. On attend la fin du déluge au chaud.
C’était sans compter sur l’humour de la police nationale. L’an dernier, pour tout dire, ça ne s’était pas très bien passé. Les forces de l’ordre avaient embarqué toute la troupe, qui avait foutu le boxon dans les commissariats; un photographe avait été arrêté, une situation risible. Alors cette année, le mot d’ordre était : ne pas s’énerver, ne pas rire, faire traîner.
Les policiers (grands et forts) commencent donc par bloquer les portes qui permettent de quitter le souterrain, et virent les touristes agglutinés autour des clowns. Ils demandent “qui est le responsable”, ce qui fait marrer tout le monde.
Un policier cherche du matériel suspect. Puis ils encerclent les manifestants dans un petit périmètre, sans doute la version ministère de l’Intérieur de la balle au prisonnier. Ça dure longtemps, mais la fête continue.
De jolies clownettes, la figure tartinée de blanc et de rouge à lèvres, essaient d’attendrir les policiers en leur soufflant des confettis sur l’uniforme. Peine perdue, ils restent aussi stoïques que Bruce Willis dans Piège de cristal. Certains répriment tout de même un sourire en coin, signe discret de leur jeunesse.
Les tambours tambourinent, sa majesté Sarko enfile son masque et s’assied dans une chaise à porteurs, impérialement soulevée. “Le plafond est trop bas!” geignent les porteurs, obligés de se recourber pour ne pas heurter l’altesse. Une jeune femme-clown se désole:
“On voulait juuuuste aller se balader… Je suis triste… On dirait qu’ils ne comprennent pas, on veut sortiiiir, je vais leur demander en slovaque.”
Un policier intime à un clown un peu nerveux l’ordre de “rester dans la bonne humeur, toujours”. Avec sa canne blanche et ses lunettes d’aveugle, “l’observateur français des élections truquées” déambule au milieu des chants, des danses et des bulles de savon.
Quelques clowns ont l’autorisation de sortir, trois par trois. Bêtement, les quelques journalistes pressentant une échappée demandent à les suivre pour attendre dehors le gros des manifestants. Autorisation accordée. Et aussitôt regrettée : “On s’est fait avoir, non?” s’interroge-t-on à l’extérieur.
Les clowns sont toujours retenus et la presse est dehors. S’ensuit une deuxième heure d’attente, entourés de policiers causants comme des portes de pénitencier. “On était venus pour voir les manifestants, on peut re-rentrer?” Non de la tête, regard furax. A travers les portes vitrées, les clowns jouent aux prisonniers politiques et nous font coucou.
Vers 16 heures et après moult contrôles d’identité, la première moitié du cortège a le droit de sortir.
“C’est trèèès bien organisé, merci, l’accueil était très sympathique”, rigolent les clowns. “Surtout les chatouilles, c’était vraiment bien sous la côte flottante”.
En tête, Miss Françafrique. ses camarades lui chantent bon anniversaire. Sarko, “super incorruptator”, est soulevé à nouveau, cette fois-ci il peut déployer sa hauteur à sa guise. Il est transporté sous le Carrousel rebaptisé “Arc de Triomphe”. Chacun vaque à ses petits sketches (voir la vidéo).
La deuxième partie de la manif ne sera libre d’aller et venir qu’une heure plus tard. C’est plus prudent: derrière chaque clown peut se cacher un ennemi de la Nation.
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