Le réseau social réfléchit à permettre à ses utilisateurs de tweeter des messages qui pourront aller jusqu’à 10000 caractères. Contrairement aux apparences, cela ne risque pas de changer profondément la manière dont les internautes l’utilisent.
« Bienvenue dans l’enfer sur Twitter : imaginez vous faire troller par Donald Trump, un tweet de 10 000 caractères à chaque fois ». Voilà comment le site américain Salon, non sans un certain talent pour la dramaturgie, a présenté la nouvelle. Le réseau social Twitter, sur lequel on peut publier des messages de 140 caractères, projette de repousser cette limite à 10 000 caractères, soit 71 fois plus. C’est le site Re/code qui a publié l’information, le 5 janvier 2016, citant plusieurs sources au sein de la multinationale. D’après elles, Twitter va commencer à discuter de cette nouvelle fonctionnalité avec ses partenaires dès ce mois-ci.
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Quelques heures après la sortie de l’article de Re/code, le fondateur et PDG de Twitter Jack Dorsey a publié un tweet avec une capture d’écran d’un long texte, comme un acte prémonitoire mais aussi pour faire comprendre à ses détracteurs que les utilisateurs ont toujours trouvé un moyen de faire des longs tweets:
« On a passé beaucoup de temps à observer ce que les gens font sur Twitter, et on les voit prendre des captures de texte et les tweeter. Et si à la place… le texte était du vrai texte? Du texte qui pourrai être surligné, dans lequel on pourrait faire des recherches avec des mots-clés ? Cela signifierait plus d’utilité et plus de pouvoir. »
— Jack (@jack) 5 Janvier 2016
Cette explosion de la limite de signes sur Twitter fait écho à la décision qu’avait déjà prise la multinationale en juin 2015 d’ouvrir à 10 000 caractères les messages privés (dits « DM »), qui a été mise en place en août.
Les pour et les contre
Certains, comme le magazine Salon, craignent qu’une partie de l’intérêt de Twitter, qui « repose sur la brièveté » des messages, soit ainsi sacrifiée :
« C’est rapide et pratique, surtout avec nos vies bien chargées. Cela nous permet aussi d’obtenir des informations sous forme de titre. Ça limite également les grandes déclarations trop travaillées qui peuvent rapidement devenir pénibles — et, admettons-le, ennuyeuses — à lire dans nos fils d’actu. »
Aussi, le magazine considère que donner la possibilité de publier de longs messages sur Twitter à des gens agaçants comme le candidat à l’élection présidentielle américaine Donald Trump « pourrait pousser quelqu’un à arrêter de le suivre, voire de quitter Twitter complètement ». Selon la journaliste, cela pourrait même encourager le harcèlement en donnant trop de place aux « trolls » pour s’exprimer.
Pourtant, et comme l’a souligné le journaliste Will Oremus sur Slate.com, cette nouvelle fonctionnalité ne devrait pas avoir un très grand impact sur la présentation de la plateforme. Le réseau social devrait garder la limite de 140 signes pour la partie « apparente » d’un tweet, et il faudra cliquer dessus pour faire dérouler le reste du texte.
« En fait, les gens postent déjà des histoires de 10 000 caractères sur Twitter », écrit-il. « Is le font en composant un tweet de 140 caractères qui contient un lien URL qui mène à l’histoire complète, hébergée sur un autre site. »
Des outils comme TwitLonger permettent par exemple déjà aux Twittos de poster un long message dont seul le début s’affiche sur Twitter, et dont le contenu s’affiche en entier lorsque l’on clique sur le lien posté.
Vers des « Instant Articles » sur Twitter ?
On pourrait également avancer l’argument inverse de celui de Salon : il est particulièrement difficile d’avoir une conversation argumentée avec un autre internaute en 140 caractères. Il faut soit multiplier les gazouillis, soit limiter sa réflexion au risque de manquer de nuance, ce qui peut engendrer de nombreux quiproquos. La possibilité de s’exprimer en plus de signes permettrait de palier ce souci, le seul risque étant que les internautes, débordés d’informations, prennent peur devant un grand texte et n’aient pas le temps ou l’envie de le lire en entier.
La limite à 10 000 caractères encouragera-t-elle les médias à publier des longs papiers directement dans la plateforme, à l’image des Instant Articles de Facebook ? Pour l’instant, la comparaison ne tient pas : Facebook a passé des partenariats avec les sites d’information et a déjà réfléchi à des manières de partager les revenus publicitaires avec eux. Twitter, qui cherche encore son modèle économique (et qui a perdu 2,6% à la bourse de Wall Street à l’annonce de la fin des 140 caractères), n’a pas les mêmes moyens ni la même force de frappe. Mais il ne fait nul doute que les médias s’intéresseront de près à ces évolutions.
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