Réunis lundi soir au Gymnase Japy à Paris pour un meeting en faveur de Syriza, les têtes d’affiche de la gauche de la gauche ont tous appelé à une alternative politique. Mais malgré les bons mots, les ténors tardent à concrétiser une alliance qui pourrait rappeler celle de leurs cousins grecs.
Que la photo de famille est belle. Au premier rang du meeting en soutien au parti grec Syriza, on retrouve la crème de la gauche de la gauche : Pierre Laurent, patron du PCF, Jean-Luc Mélenchon, député de la gauche européenne unitaire, Cécile Duflot, ex-ministre écolo, Pierre Larrouturou, chef de Nouvelle Donne, Guillaume Balas, eurodéputé socialiste, Clémentine Autain, figure d’Ensemble, Liêm Hoang Ngoc, socialiste affligé… et dans l’assistance d’autres têtes issues des rangs des socialistes frondeurs, du NPA, des syndicalistes, des altermondialistes…
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“On voit les contours d’une coalition plus large que le Front de gauche, c’est inéluctable”, s’enthousiasme Jean-Luc Mélenchon. La dernière fois qu’on a vu tout ce monde rassemblé c’était à la Fête de l’Huma, en septembre. On en a aussi vu quelques-uns à Bellerive-sur-Allier cet automne. Ou au conseil national du courant socialiste Un Monde d’Avance. Bref, depuis les succés du FN aux européennes en avril, les membres de la gauche radicale française ont pris l’habitude de se renifler. Tant et si bien que communistes, écolos, et socialistes insatisfaits voyageront même à Athènes jeudi soir, pour le dernier meeting de Syriza avant l’élection du 25 janvier.
“Effet domino”
“On va bientôt passer aux caresses”, assure Julien Bayou, porte-parole d’Europe Ecologie-Les Verts. Pourtant, qu’est-ce qui a changé depuis la claque d’avril ? Des rapprochements ont eu lieu, des mails ont été échangés, mais les meetings se ressemblent sans aboutir à rien de concret. “Je ne demande que ça !”, râle Pierre Laurent, aux avant-postes d’une union des gauches. “Ce qui change, c’est que là on se réunit non pas contre quelque chose – la politique de François Hollande – mais pour défendre ensemble une même cause”, complète Julien Bayou.
La cause en question donc, c’est la victoire du parti Syriza, dont chacun espère qu’elle entraînera dans son sillage le triomphe d’une alliance encore à définir en France. “Si Syriza gagne en Grèce, puis Podemos en Espagne, nous aurons du vent dans les voiles pour porter la transformation sociale”, sourit déjà Clémentine Autain. Mélenchon espère un “effet domino”. Il plaisante à moitié : “Alexis Tsipras sera le premier à gouverner, j’aurais préféré que ce soit moi. Il faut savoir être patient.”
“Le sentiment d’être à ma place”
Le meeting, instigué par l’antenne parisienne de Syriza pour contrecarrer l’image anti-UE qui colle à la peau du mouvement, n’a pas tant été l’occasion de relayer la parole grecque que de revivifier l’espoir d’une gauche forte. Ainsi du story-telling de Cécile Duflot et de l’eurodéputé Guillaume Balas, bien obligés de justifier leur présence – l’une au sein du gouvernement, l’autre au sein de la majorité présidentielle – dans un raout plutôt étiqueté Front de gauche.
“Peut-être que cela vous surprendra mais ici j’ai le sentiment d’être à ma place”, lâche ainsi Cécile Duflot, bien décidée à repositionner EELV à gauche de la gauche alors que dans son camp, certains souhaiteraient renouer avec le PS en vue des régionales. “Nous en avons eu assez de prendre des leçons de responsabilité de la part d’irresponsables politiques”, assure t-elle. “Nous voulons une autre politique en Europe comme nous voulons une autre politique en France”, dit-elle, convaincue que c’est grâce à la victoire de Syriza que l’Europe explosera “la digue contre l’égoïsme libéral”.
“Faire bouger les lignes de la vieille gauche”
Balas joue une partition plus ténue lorsqu’il assure s’être fait élire sur le slogan “l’austérité n’est pas la solution”, avant qu’“on” lui assène que la gauche est minoritaire en Europe. Derrière lui, quelques frondeurs opinent du chef (Pouria Amirshahi, Pascal Cherki, Fanélie Carrey-Conte). Bien sûr, on se prend à rêver d’un “réveil de la gauche française”, comme Pierre Larrouturou. “Syriza, Podemos, Grenoble [où une alliance EELV-FdG a permis l’élection du maire écolo Eric Piolle – ndr]… Tout n’est pas duplicable. Il y a encore beaucoup à apprendre, on a besoin de travailler le fond, affirme Julien Bayou. Et puis, il y a la question des personnalités qui freine encore les rapprochements”. “La vraie question n’est pas celle de la coalition mais celle du projet, insiste, en écho, Cécile Duflot. Il y aura sûrement des débats mais, au bout du chemin, un projet nouveau va advenir. On va bouger les lignes de la vieille gauche.”
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