C’est l’ouvrage de la semaine. Au cœur de la polémique. Brandi par les uns et par les autres, tantôt pour défendre ou accuser. Bienvenue Place Beauvau, le livre de deux journalistes du Canard enchaîné et d’une journaliste indépendante, est au centre du scandale depuis que Valeurs Actuelles en a sorti les bonnes feuilles mercredi 22 mars.
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>> Un livre accuse François Hollande de basses manœuvres pour détruire ses adversaires politiques
Y est décrit « un vaste système de surveillance de ses adversaires mis en place par François Hollande depuis son arrivée à l’Élysée. Ce ‘cabinet noir’ aurait eu pour objectif de discréditer les concurrents du président à l’élection présidentielle, en particulier Nicolas Sarkozy et Manuel Valls, son propre Premier ministre ».
L’affaire aurait pu en rester là si François Fillon ne l’avait pas brandi lors de son passage à L’Emission politique du lendemain soir, accusant nommément la présidence de la République et exigeant que la justice diligente une enquête.
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Le livre « Place Beauvau » ou la défaite du journalisme pour L’Obs
Passé cet épisode – et alors que personne n’avait encore vraiment lu le livre, sorti le 23 mars – plusieurs médias mettent aujourd’hui en doute le fond et la forme du récit contenu dans Bienvenue Place Beauvau. Dans un article intitulé : Le livre “Place Beauvau » ou la défaite du journalisme, paru le 25 mars, deux journalistes de L’Obs affirment que le livre mêle « insinuations, sous-entendus et témoignages anonymes ».
Ils citent plusieurs épisodes détaillés et en particulier un enquête de l’Obs dans laquelle les journalistes auraient « été manipulés, ou [aurait] agi sur ordre de l’Elysée, dans le but d’affaiblir Manuel Valls », via le désormais fameux « cabinet noir ». Leur réquisitoire est sans appel :
« Notre enquête mettait en évidence l’étrange nébuleuse entourant Anne Gravoin, l’épouse de Manuel Valls, premier violon et directrice artistique de l’Alma Chamber Orchestra : un marchand d’armes sud-africain, un pilier de la Françafrique, un mystérieux homme d’affaires franco-algérien. (…) Quelques jours après sa publication, Anne Gravoin démissionnait cependant de la direction de l’orchestre.
Lisons maintenant ce qu’écrivent les auteurs du livre : « Dans les couloirs de Matignon, on fait remarquer aux curieux que cette enquête à charge a été conduite par une société d’intelligence économique proche de l’Elysée, qui travaille en sous-main avec la DGSE ». Nous aurions donc bêtement – et méchamment, cela va de soi – recopié une enquête livrée clé en main.
Tout cela est faux, bien entendu. La réalité est plus banale.(…) Oui, il y avait matière à s’interroger, à creuser.
La « lecture très orientée » pour Libé
Le quotidien Libération s’est lui aussi penché sur l’ouvrage et notamment sur les propos de l’un de ses auteurs, Didier Hassoux. Dans l’heure de la déclaration de François Fillon sur le plateau de l’Emission politique, celui-ci démentait avait évoqué l’existence du « cabinet noir ». Comme l’écrit Libé :
« Même si Fillon fait une lecture très orientée du livre, Hassoux, Recasens et Labbé suggèrent bien l’existence d’une sorte de ‘shadow cabinet’ qui ne dirait pas son nom. Dès le premier chapitre, il est fait explicitement mention d’une ‘structure clandestine’ aux ramifications complexes. ‘Pour orchestrer les affaires judiciaires, il existe une mécanique aussi efficace que redoutable, écrivent-ils. Hollande a su en tirer profit.’ Principal outil de cette stratégie, Tracfin, le service de renseignement de Bercy, piloté durant tout le quinquennat par Michel Sapin, ‘ami de quarante ans du président’, précisent les auteurs, adeptes des sous-entendus. ‘La plupart des affaires judiciaires qui ont empoisonné Sarko et les siens partent de là’, précisent-ils. De cet immeuble ultra-sécurisé où s’activent 120 fonctionnaires ‘habilités à fourrer leur nez dans les comptes en banque de n’importe qui’.
La conclusion de l’article de L’Obs résume assez bien la situation :
« Tout cela ne serait pas si grave si ce livre n’avait donné un grain à moudre inespéré aux zélateurs de l’extrême droite, qui depuis s’en donnent à cœur joie sur les réseaux sociaux. A jouer un jeu dangereux, par opportunisme, inconscience ou appât du gain, les auteurs du livre se sont pris les pieds dans le tapis. Au détriment de notre profession. »
Quant à Libération, il est précisé que « tiré à 30 000 exemplaires, Bienvenue Place Beauvau est déjà en rupture de stock. » Oui mais à quel prix ?
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