Profitant du succès d’Avatar et de la Coupe du monde de football, les industriels vantent les mérites du relief sur petit écran. Faut-il pour autant changer d’urgence de téléviseur ?
Samsung, Panasonic, Toshiba, Sony, LG… Tous les géants de l’électronique tentent d’en mettre plein la vue avec leurs écrans compatibles 3D. “Regardez les images de notre nouveau téléviseur. Impressionnant, non ?”, clament les services de com et de marketing… On avait déjà eu droit à ce discours avec la TVHD et la précédente Coupe du monde de foot. Cette fois, c’est la 3D. Mais le parallèle s’arrête là : la vidéo en relief s’avère plus exigeante que la HD.
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Pour ces images “impressionnantes”, les industriels ont d’abord étudié la notion de relief. Celle-ci s’appuie sur un élément-clé : la position de nos yeux. Ecartés d’environ 65 mm, ils perçoivent les images avec une légère différence. Chaque oeil transmet au cerveau ce qu’il reçoit et celui-ci les assemble pour reproduire le relief. La paire de lunettes divise les 120 Hz en deux signaux de 60 Hz – un pour chaque oeil – afin de créer l’effet relief.
La paire de lunettes est dite active : elle se compose de deux petits écrans LCD qui s’ouvrent et se ferment à la même cadence que la fréquence de l’écran. Rien à voir avec la paire de lunettes dite passive : constituée d’un filtre rouge et d’un autre bleu-vert, celle-ci ne peut pas reproduire correctement la sensation de relief. Ces lunettes donnent parfois une mauvaise séparation des deux images superposées par le cerveau et chaque oeil voit un peu de l’image de l’autre. Apparaissent alors des images fantômes, ce qui fatigue les yeux.
Tout n’est pas encore parfait. “Dans la réalité, nous sommes habitués à la profondeur de champ et donc à voir des éléments flous. Quand on regarde une vidéo en 3D, les éléments ou les personnages légèrement flous qui se déplacent, c’est un peu dérangeant. Comme la couleur et plus récemment la HD, la 3D impose de tourner différemment”, explique Luc Saint-Elie, responsable formation et communication nouvelles technologies division grand public de Panasonic.
Autre limite au développement de la 3D : une offre de contenus encore très limitée. Comme pour la haute définition à ses débuts, les programmes en relief ne vont pas envahir les écrans de télévision du jour au lendemain. En Grande-Bretagne, le réseau satellitaire BSkyB a commencé en avril la diffusion de Sky 3D. Equipés d’un écran plat compatible 3D, les abonnés anglais peuvent ainsi regarder quelques programmes en relief, dont des matchs de rugby et de football.
La prochaine Coupe du monde de football servira d’ailleurs d’argument pour vanter les atouts de la 3D, avec vingt-cinq des soixante-quatre rencontres filmées en 3D. Pour les apprécier, il vaudra mieux aller dans des cinémas ou des pubs anglais. En revanche, aux Etats-Unis, ces matchs en 3D seront diffusés dans chaque foyer par la chaîne ESPN.
En France, la chaîne Orange Sport proposera quelques rencontres du tournoi de tennis de Roland-Garros en 3D. Canal+, l’une des chaînes préférées des sportifs, n’en est qu’au stade de la réflexion et de l’expérimentation avec des essais sur des matchs de boxe et de foot. La chaîne a néanmoins annoncé le lancement de son premier documentaire de 90 minutes en 3D Relief, coproduit avec G3D, une filiale de Gédéon. Les Aventuriers du monde perdu sera tourné l’hiver prochain dans une partie pratiquement inexplorée de la côte sud de Madagascar, et devrait être diffusé fin 2011. De son côté, France Télévisions travaille au développement d’une série en 3D autour du personnage de Peter Pan. Cette adaptation, baptisée Les Nouvelles Aventures de Peter Pan, comptera 26 épisodes de 22 minutes chacun.
Pour compenser la rareté de contenus en relief, quelques industriels mettent en avant une astuce pas très convaincante : la conversion de programmes 2D en 3D. Après Philips et son procédé WOW vx (uniquement disponible sur un modèle destiné aux professionnels), Samsung a inséré cette fonction sur ses téléviseurs compatibles 3D. Il suffit d’appuyer sur la touche 3D de la télécommande pour transformer n’importe quel programme (émission, film à la télévision ou sur DVD) en relief. Ensuite, il ne reste plus qu’à chausser la paire de lunettes ad hoc : le tour est joué.
Enfin presque ! La fonction ne fait qu’ajouter un peu de profondeur. Ce n’est donc pas de la véritable 3D. Pour bénéficier d’une offre conséquente, il faudra peut-être se tourner vers le Blu-ray. Ce format DVD apporte une occasion unique de convaincre le grand public d’investir dans une platine. Grâce à son importante capacité (environ 50 Go), le Blu-ray est capable de stocker deux versions distinctes d’un même film (en HD avec une résolution de 1 920 x 1 080 pixels) : une pour chaque oeil. Mais là aussi, il faut un écran plat, un lecteur Blu-ray compatible (la PS3 le sera via une mise à jour) et une paire de lunettes actives. Impossible de se passer de cet équipement pour l’instant. La 3D sur écran plat sans lunettes ne sera en effet accessible au grand public que dans cinq ou six ans.
La reproduction du relief s’appuie sur un réseau lenticulaire placé sur l’écran du genre de celui qu’on utilise pour des cartes postales animées ou des cartes de conversion franc-euro. Ce procédé est une spécialité de la société française Alioscopy qui a lancé il y a quelques mois une gamme d’écrans en trois formats (24, 40 et 42 pouces) et vendus entre 3 500 et 8 000 euros. A la différence de la solution retenue par les fabricants de téléviseurs, le procédé français consiste à mélanger non plus deux mais huit images. Résultat, le réseau lenticulaire fonctionne comme une loupe qui agrandit l’un des huit points de vue de l’image, différent selon l’angle sous lequel on se place.
Sharp a retenu cette solution en présentant début avril un écran de 3,4 pouces (8,63 cm de diagonale). Dans un premier temps, ce genre d’écran pourrait se retrouver sur des smartphones ou des consoles de jeu vidéo, comme la Nintendo 3DS commercialisée en fin d’année 2010. Cette solution est intéressante – elle dispense des lunettes spéciales – mais n’est pas parfaite : on ne perçoit le relief qu’en se plaçant bien en face de l’écran.
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