Auteur d’un tacle appuyé sur la télé d’Hanouna, Julien Cazarre dézingue le petit monde du foot français sur Canal + Sport et RMC. A force d’humour corrosif et de talent, cet ex de l’Action Discrète a gagné le pari fou de faire rire en parlant ballon rond. Mais qui est-il vraiment ? Portrait.
Pour une fois, son nom est apparu dans les médias sans qu’une de ses chroniques acides sur le monde du foot ne soient en cause. Début février, Julien Cazarre raconte au site de France Football comment Cyril Hanouna l’a approché pour faire partie du casting de sa nouvelle émission, Touche Pas à Mon Sport (D8). Le trublion de Canal + Sport et de RMC décline catégoriquement : « C’est pas du tout ma came. Gilles Verdez c’est le dîner de cons et Enora Malagré c’est la vulgarité à l’extrême. Ça ne m’intéresse pas. J’ai besoin de bosser avec des gens que j’admire un peu. «
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« Hanouna, je m’en branle »
En prenant connaissance de l’interview, le présentateur star de D8 dégoupille. Selon le Canard enchaîné, l’humoriste aurait alors « essuyé les coups de fil d’Hanouna et compagnie. Insultes, menaces de lui ‘péter la gueuleé, Cazarre a eu droit au grand jeu ». Aujourd’hui, il nous l’assure : « l’affaire est réglée. »
« J’ai reçu quinze milliards de coups de fil de journalistes pour rebondir sur l’affaire, m’exprimer. Je les laisse s’amuser. Hanouna, je m’en branle. Ca ne m’intéresse pas. En tout cas de mon coté. Du sien… (silence). En tout cas, moi, ça ne m’intéresse pas. Au bout d’un moment, quand les gens voient que ça n’a pas d’impact sur toi, ils lâchent l’affaire. »
Aux agitations vulgaires d’un PAF qu’il observe avec distance, Julien Cazarre préfère l’atmosphère des pelouses de foot. A quelques mois de l’Euro, agile et affuté, Julien Cazarre fait trembler toutes les défenses de Ligue 1. A la radio (sur RMC, tous les jours de semaine, à 16h, Super Moscato Show puis Luis Attaque) mais également dans la petite lucarne (Canal + Sport, J+1, tous les lundis à 22h50), ses chroniques mêlant foot et humour ravageur font fureur.
A peine diffusées, aussitôt commentées, celles-ci se retrouvent sur les réseaux sociaux et autres plateformes vidéos où elles enregistrent à chaque fois plusieurs centaines de milliers de vues. Pas de doute : Internet a fait de Cazarre sa coqueluche. Les fans de foot l’adorent, plusieurs faux comptes Twitter à sa gloire attestent du phénomène qui se prolonge même IRL. Dans la rue, on arrête désormais fréquemment l’humoriste pour lui dire quelques mots, partager quelques vannes ou prendre un selfie avec lui. « Pas tout le monde hein, juste les fans de foot, plutôt des jeunes », confie t-il, modeste. Lorsqu’on l’interroge sur sa récente popularité en ligne, Julien le survolté garde la tête froide. Le web et ses répercussions l’intéressent peu :
« Quand tu passes le million de followers, tu commences à avoir le carafon qui explose ! Tes followers décident malgré toi ce que tu dois faire. Moi j’ai deux heures d’antenne par jour chez Moscato, une chronique chez Luis, ma pastille à J+1… Pas besoin de Twitter en plus, des moyens d’expression, j’en ai… »
Action indiscrète
A écouter l’air du temps, on aurait presque l’impression que Cazarre, 41 ans (l’âge où les footballeurs deviennent coach), est un phénomène récent. Il possède pourtant une solide réputation d’amuseur, un CV construit à grands coups de sketchs parfois très politiques avec la bande de l’Action Discrète. Malgré quinze années de télé, le public connaît peu le personnage longtemps dissimulé derrière sa cagoule de vanneur. « Ma page Wikipedia est truffée d’erreurs… mais je ne fais rien pour la modifier, je m’en fous complètement ! ».
Alors nous avons fouillé dans son passé. Pour ce faire, rendez-vous est pris un après-midi de mars, dans les locaux de RMC. A notre arrivée, Brigitte Lahaie, toute de rose vêtue, émoustille l’antenne de la radio qui parle cash. Notre entrevue avec le trublion du « football circus » se déroule dans un studio vide, à l’écart de l’agitation. Julien Cazarre nous raconte alors son enfance à Paris, une mère d’origine arménienne, un poster « Génération Mitterrand » accroché au mur de sa chambre d’ado et l’école, qui lui donne du fil à retordre. « J’ai eu mon bac à 21 ans. Je l’ai passé quatre fois, j’adorais le rater. J’étais fan des Sous-Doués… «
Pas vraiment fait pour les études, il opte pour les planches puis la télé :
« Vers 1996, j’ai fait de l’impro et du théâtre avec la troupe de Meudon, il y avait déjà Pierre Samuel et Thomas Sérafine (futurs membres de l’Action Discrète, ndlr), lui, c’était le plus brillant de la bande. Il s’est fait pote avec Albert Algoud et Karl Zéro et nous a fait entrer à la télé. Sans Thomas, je serais simplement resté le mec le plus drôle du Franprix ! »
https://www.youtube.com/watch?v=LjWagMUsVGQ
Sniper permanent
Lové au sein de la troupe de l’Action Discrète, Julien Cazarre va apprendre les codes de la télé et perfectionner un humour insolent et corrosif qui prend souvent appui sur l’actualité. Au tournant de la décennie 2010, alors que la joyeuse bande va se séparer, l’humoriste va choisir un domaine jusqu’alors délaissé par sa profession : le ballon rond. De M6 (100% Foot) à BeInSport (Objectif Ligue 1), les expériences vont s’enchaîner, mais c’est surtout sur RMC qu’il va refaire parler de lui. Un soir d’enregistrement de l’After Foot (programme phare de la station, ndlr), l’amuseur débarque, bien déterminé à faire son petit show. François Pesenti, aujourd’hui directeur général de RMC sport, raconte :
« La première fois que je l’ai vu, c’était à l’occasion d’un tournoi de foot à 5. Nous étions avec Bribois, Riolo et toute la bande de l’émission. Un type qui gesticulait partout s’était faufilé parmi les auditeurs, il est passé à l’antenne, a commencé à faire un show énorme, hyper provoc. Les mecs autour de lui applaudissaient ! On a compris plus tard qu’il s’agissait de Julien Cazarre, de l’Action Discrète. On lui a dit « reviens quand tu veux ».
La suite, on la connaît. Cazarre est revenu et a fini par gagner sa place. De parodies acides en billets moqueurs, sa mue en « sniper permanent » lui ouvre grand les portes de J+1, l’émission du Groupe Canal qui « éditorialise » la Ligue 1. Stéphane Guy, son présentateur, nous confie :
« Je suis absolument fan de Julien ! Grâce à sa connaissance du foot et à son talent comique, sa chronique sans langue de bois est sans aucun doute le moment fort de l’émission. Il connaît parfaitement les codes du milieu, parle le même langage que les joueurs ».
Résultat : dans les vestiaires des clubs de Ligue 1, Cazarre est une star. A la face de joueurs propulsés au rang d’icônes, le chroniqueur s’est fait une spécialité de débiter les griefs du supporter « normal ». Actions ratées, coiffures ridicules, bourdes de langage et écarts de conduite : tout y passe ! Cazarre l’insolent n’en a pas fini de secouer le monde aseptisé de la chronique sportive à la télé…
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