Le créateur de l’application de rencontres Once a un but : remettre au centre du dating l’amour, plutôt que les plans cul.
A s’y méprendre, au début de l’histoire on croirait se retrouver dans The Social Network. Même campus feutrés estampillés Ivy League, même binôme où l’un s’occupe du business, l’autre du code informatique, même croissance étape par étape, université par université. Comme si pour être vraiment sûr de réussir, il fallait calquer sa trajectoire sur celle décrite dans le script d’Aaron Sorkin. Sauf que si l’expérience Date My School vaudra à son créateur Jean Meyer le sobriquet de « French Zuckerberg », elle se terminera avec moins de drama – ni procès ni guerre fratricide, une simple démission.
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150 messages par jour contre un seul
De sa première expérience dans le dating, Jean Meyer garde un enseignement : qu’on recherche le grand amour ou un plan d’un soir on n’a pas envie de tomber sur des gens que l’on connaît. « Ce qu’il y a de plus embarrassant sur Tinder, par exemple, c’est de l’utiliser au bureau et de tomber sur des collègues », explique l’entrepreneur français. A la fin de l’été, il a lancé l’application Once. Son pari : proposer tous les jours aux utilisateurs un seul match, quand sonne les douze coups de midi. Avec un utilisateur toutes les 24 heures, plus difficile de retrouver les mêmes personnes qu’autour de la machine à café de l’openspace.
Le principe de son application, Jean Meyer le résume par une formule : le « slow-dating ». « Si je devais faire une métaphore, je dirais que jusque-là depuis les matchmakers new-yorkais du siècle dernier jusqu’à Tinder, le dating c’était surtout du supermarché : des pages de photos à faire défiler encore et encore. C’est une abondance assez capitaliste. » De fait, le jeune homme comprend bien qu’une des frustrations de ces sites à majorité masculine, c’est que d’un côté les jolies filles sont harcelées à hauteur de 150 messages par jour, quand de l’autre les prétendants sont noyés dans cette masse. Un problème apparemment réglé par Once.
« Ça sonne sûrement naïf mais je souhaitais qu’on puisse retrouver une certaine authenticité, regarder des films ensemble ou manger du fromage », développe presque gêné l’entrepreneur. D’autant que, continue-t-il, si les gens âgés de plus de 35 ans ont finalement l’occasion de faire ce genre de rencontres sur la Toile, les sites qui le proposent peuvent coûter cher. De fait, l’offre n’existait pas pour les jeunes étudiants fauchés.
La vie n’est pas une comédie romantique
Les étudiants : la marotte de Jean Meyer. Déjà au milieu des années 2000, il crée Bankexam. Avant l’avènement du tout communautaire, le site proposait déjà à ses utilisateurs de réaliser ensemble des annales de concours ou examens comme le bac, divers BTS ou encore les concours de la fonction public. En 2009, le site est revendu à Studyrama. L’occasion pour son créateur de tenter sa chance outre-Atlantique. Pour décrocher un visa, le jeune homme, déjà diplômé d’une école d’ingénieur, accepte de retrouver les bancs de l’Ecole. Direction Columbia, la prestigieuse université new-yorkaise. C’est là que l’idée de Date My School émerge dans le cerveau de Jean Meyer.
Au départ, une déception. Arrivé sur le campus américain, le petit Français pensait qu’il vivrait une scolarité à la American Pie. Raté : il ne rencontre pas Stifler, ne joue pas au beerpong et ne flirte pas avec de jolies étudiantes en médecine. « C’était plus champagne et réseautage, se souvient-il aujourd’hui. En fait dès 21 heures, tout le monde s’emmerde dans sa petite chambre universitaire. » Et c’est là que lui vient l’idée de créer son premier site de rencontre.
Fougères, l’autre côte ouest
Le principe de Date My School est simple. Il s’agit d’un site qui propose des rencontres à l’intérieur des campus universitaires. La particularité : les utilisateurs peuvent choisir les matières ou encore l’université dans lesquelles ils vont chercher l’âme sœur. Là encore on fait bien attention à ne pas tomber sur les profils des gens que l’on côtoie au quotidien.
Après quelques années au sein de l’entreprise, qu’il monte avec un de ses camarades de MBA, Jean Meyer quitte Date My School. « Nous n’avions plus la même vision sur la croissance, il fallait bien que l’un de nous parte. » Il démissionne non sans avoir trouvé avant un nouveau concept, celui du un match par jour. « En voyage en Corée, invité par des investisseurs de Date My School, j’ai découvert une appli qui marche très bien là-bas avec ce mode de fonctionnement. Ça m’a vraiment intéressé ». Le projet Once était lancé.
L’histoire de cette application-là est certainement moins glamour. Fini New-York, bienvenue à Fougères, petite ville coincée entre la Bretagne, la Normandie et la Mayenne. L’entrepreneur n’a alors plus beaucoup d’argent pour monter son nouveau projet. « Pour recruter des développeurs, je leur ai vendu un rêve : quitter la France ». Son pari semble avoir fonctionné puisqu’il en débauche deux. Ensemble, ils lancent Once d’abord aux Etats-Unis. Un « test » plus qu’autre chose. « Le marché là-bas est surchargé », reconnaît Jean Meyer. Alors il installe sa start-up à Londres et se recentre sur l’Europe, avant de partir à l’abordage de l’Amérique Latine. « On s’est lancé au Brésil début décembre et on est plutôt satisfait. » Après un trimestre, Once compte 500 000 utilisateurs dans le monde, dont 300 000 en France. Pas encore de quoi justifier un biopic sur grand écran, mais certainement un bon début.
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