En meeting à Aubervilliers (93) ce 19 avril, Philippe Poutou a chargé François Fillon, qui l’avait menacé d’un procès le 4 avril lors du grand débat de la présidentielle.
On savait Philippe Poutou fâché avec tout le monde – ou presque. Le 4 avril dernier, il a même refusé de poser pour la « photo de famille » avec les dix autres candidats, au début du grand débat de la présidentielle sur BFM-TV et CNews. Ce 19 avril, lors de son dernier grand meeting avant l’élection, aux Docks d’Aubervilliers (93), face à une salle à moitié pleine seulement (environ 1500 personnes), le candidat du NPA s’en est expliqué :
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« Je n’ai pas voulu la faire, car d’abord, on n’est pas de la même famille, et je voulais exprimer qu’on n’est pas non plus du même monde ».
Mais il y a deux candidats avec lesquels il est particulièrement en mauvais termes : Marine Le Pen et François Fillon. Sa sortie sur leurs affaires judiciaires respectives lors du grand débat est devenue culte. Elle est même ce soir-là diffusée sur grand écran pour chauffer la salle nimbée d’une lumière rouge.
« François Fillon, plus on fouille plus on sent la corruption, la triche, ce sont des bonshommes qui nous expliquent qu’il faut la rigueur, l’austérité alors qu’ils piquent dans les caisses », avait lancé l’ouvrier à l’usine Ford de Blanquefort (Gironde), ajoutant qu’il se servait « dans les caisses publiques quand il paye sa famille ». Le candidat LR avait alors marmonné sur un ton menaçant : « Je vais vous foutre un procès vous ».
« Ce soir je le répète, il a volé dans les caisses de l’Etat »
Philippe Poutou s’étonnait de ne pas avoir de nouvelles, jusqu’à ce 18 avril où François Fillon a déclaré dans La Voix du Nord qu’il ne le poursuivrait pas, sauf s’il récidive. C’était tendre une perche au candidat anticapitaliste, qui l’a de nouveau défié à Aubervilliers devant ses soutiens :
« Fillon m’avait menacé d’un procès si je récidivais. Ce soir je le répète, il a volé dans les caisses de l’Etat. »
L’assistance a applaudi cette charge, avant d’entonner à l’unisson le slogan devenu classique chez les opposants au candidat LR : « Rends l’argent! ». Pour ses soutiens, le franc-parler du candidat est sa meilleure arme dans la campagne. Pourtant, les sondages le placent toujours à 1,5% d’intentions de votes (il avait obtenu 1,15% des suffrages en 2012).
« Nous ne sommes pas crédibles électoralement »
Dans la salle des Docks d’Aubervilliers, le fondateur historique de la LCR Alain Krivine, premier candidat d’extrême gauche à la présidentielle en 1969, s’est fait une raison :
« Je suis content qu’on l’ait présenté, c’est le seul qui est normal. Mais il y a une poussée de Jean-Luc Mélenchon à gauche. Philippe a une popularité importante, mais nous ne sommes pas crédibles électoralement ».
Ce soir-là, entre les slogans anticapitalistes et L’Internationale entonnée a cappella, Olivier Besancenot (candidat de la LCR puis du NPA en 2002 et 2007) n’est pas intervenu à la tribune. Il était pourtant présent en coulisses, et défend lui aussi le caractère « non professionnel de la politique » de Philippe Poutou :
« Certains le considèrent comme un Ovni alors que c’est le contraire : les vrais extraterrestres ce sont les autres. C’est pourquoi c’était le seul à pouvoir attaquer Le Pen et Fillon frontalement, et il l’a fait. C’est notre marque de fabrique ».
« Je fais des punchlines sans vouloir en faire »
Philippe Poutou parviendra-t-il pourtant à décoller dans les urnes ? Entre avoir de l’empathie pour le personnage et épouser ses idées, les militants du NPA constatent sur le terrain qu’il y a encore un grand pas. Son intervention ce 20 avril lors de l’émission politique avec les onze candidats à la présidentielle pourrait être une nouvelle occasion de marquer les esprits. A-t-il encore des phrases choc en réserve ? « Je fais des punchlines sans vouloir en faire », élude-t-il en souriant.
Le meeting s’est conclu sur un concert du collectif Motivés!, formé en 1997 autour de Mouss et Hakim (de Zebda) avec la LCR. Ils ont notamment interprété Bella Ciao et Hasta Siempre, entre autres chants révolutionnaires, comme il se doit.
Toutes les photos sont de Vincent Gerbet.
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