Comme le révèle « Midi Libre », une jeune femme de 25 ans vient d’obtenir le retrait de ses vidéos pornographiques sur la plateforme « Jacquie et Michel ». Une mesure qui intervient après des années de harcèlement quotidien.
Instauré en 2014 par une décision de la Cour de justice de l’Union européenne, le « droit à l’oubli » demeure une mesure assez peu utilisée. Chloé*, 25 ans, y a eu recours récemment après des années de calvaire, comme le rapporte Midi Libre. « Je vis un cauchemar, je ne me rendais pas compte de l’impact que ça allait avoir sur ma vie… Aujourd’hui, je veux faire effacer ces vidéos, ce n’est plus possible de subir ça », confie-t-elle au quotidien.
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Merci qui ?
En 2014, Chloé réalise trois scènes pour la plateforme de porno amateur Jacquie et Michel pour des besoins financiers. « C’était une période assez noire de ma vie : j’étais fâchée avec mes parents et je me suis retrouvée à la rue. J’allais à des soirées pour rencontrer des gens qui accepteraient de m’héberger », explique la jeune femme.
Mais la désillusion va arriver dès le premier tournage. Les conditions sont « très stressantes », et viennent s’ajouter à une déconvenue majeure: alors qu’on lui avait promis 1 800 euros pour quatre scènes, le réalisateur ne lui en fait tourner que deux, pour un total de 400 euros. Mais ce n’est que le début.
Harcèlement, agression, difficultés professionnelles…
Une première vidéo est publiée sur le site fin 2014, avec le nom de la ville (de moins de 35 000 habitants) de Chloé, alors qu’on lui avait fait la promesse de ne pas l’afficher. Très vite, la jeune femme est reconnue dans la rue, harcelée, insultée. Quand elle ne reçoit pas des « nudes » indésirés, Chloé est victime d’agression physique.
« Jamais je n’aurais pensé qu’il y aurait de telles répercussions », admet-elle avec le recul. Ses relations professionnelles en pâtissent également: son contrat auprès d’une chaîne de fast-food n’a pas été reconduit, les remarques de ses collègues au cours de différents petits boulots sont incessantes. Puis, Chloé se retrouve dans une impasse: impossible de trouver du travail.
« Mon cauchemar a recommencé »
C’est alors qu’elle accepte de tourner une dernière vidéo pour la plateforme pornographique. Même si celle-ci n’a pas joui d’un succès similaire aux deux premières, le harcèlement quotidien se poursuit. La jeune femme décide alors de « changer de vie ». Elle passe un concours pour devenir fonctionnaire et déménage à 400 kilomètres de sa ville. Si l’anonymat a duré quelques semaines, Chloé est tout de même reconnue par un passant. « Mon cauchemar a recommencé. »
Usée par la situation, Chloé s’adresse alors aux réalisateurs avec qui elle a travaillé. Mais ces derniers lui rétorquent qu’il faut payer pour obtenir le retrait des vidéos où elle apparaît. « Ils évoquaient des sommes différentes à chaque fois : l’un me parlait de 2 000 euros, l’autre plutôt de 4 000 euros ».
Contacté par franceinfo, un responsable presse pour Jacquie et Michel évoque des « montants ubuesques » et se défend: « On n’a reçu aucune demande de sa part, elle aurait dû tenter de nous contacter directement. (…) C’est assez rare de recevoir ce type de demandes. C’est plutôt le cas pour des vidéos faites il y a de nombreuses années. En 2018, les gens savent ce qu’ils font. »
« Le public ne voit pas la misère humaine qu’il y a derrière »
Suite à une mise en demeure envoyée par l’avocat de Chloé, les vidéos ont été retirées gratuitement par le site. Un moyen d’échapper à une procédure en justice pour le célèbre site. Car en plus des conditions de tournage déplorables, les irrégularités sont nombreuses. « Elle n’a reçu aucune fiche de paye et n’a jamais été déclarée : à chaque fois, elle a été payée en liquide, explique son avocat. Il y a des millions de clics pour chaque vidéo, il faut imaginer ce qu’elles génèrent pour cette entreprise qui compte plus d’une dizaine de salariés. »
Une histoire que la jeune femme a tenu à partager pour qu’elle « dissuade d’autres filles paumées » de prendre part à des tournages pornographiques. « Le public ne voit pas la misère humaine qu’il y a derrière. Peut-être que mon témoignage les fera réfléchir », explique-t-elle.
*Le prénom utilisé par Midi Libre
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