Plusieurs associations d’aide aux migrants critiquent les mesures sur l’immigration annoncées par Edouard Philippe, ce 6 novembre.
Le Premier ministre Edouard Philippe a annoncé, mercredi 6 novembre, une série de vingt mesures sur l’immigration. La veille, plusieurs associations d’aide aux migrants étaient reçues à Matignon par le cabinet du Premier ministre. Parmi elles, la Fédération des acteurs de la solidarité dont le président Florent Gueguen se dit “surpris par la méthode. Il n’y a eu aucun travail en amont, les associations n’ont pas été concertées”.
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La plupart félicitent cependant la décision de l’exécutif de ne pas toucher à l’aide médicale d’Etat (AME), qui permet aux étrangers de bénéficier d’un accès aux soins et que le président avait annoncé vouloir réformer. “Nous sommes, certes, heureux qu’il n’y ait finalement pas la réforme structurelle de l’AME que nous redoutions. Mais toutes ces mesures durcissent l’accès aux soins et à la couverture santé des étrangers. C’est la version hard qui a été choisie par le gouvernement. Les conséquences seront désastreuses”, prévient Florent Gueguen.
Avec ce plan #immigration, je crois que nous avons trouvé le juste équilibre entre les droits et les devoirs, entre la volonté de rassurer nos concitoyens et le courage de ne rien céder au populisme, entre la fidélité à nos valeurs et le réalisme face aux changements du monde. https://t.co/LmFIs7oyKd
— Edouard Philippe (@EPhilippe_LH) November 6, 2019
Un risque de santé publique
Pour les associations, contactées par Les Inrocks, la mesure la plus “dangereuse” présentée par le gouvernement est l’instauration d’un délai de carence de trois mois avant que les demandeurs d’asile ne puissent accéder à la Protection universelle maladie.
Pour Florent Gueguen, “ces étrangers ont besoin d’un accès immédiat aux soins. Pour la plupart, ils sont atteints par des maladies liées à leur errance : la tuberculose, la gale mais aussi des maladies cardiovasculaires, de la peau et des troubles psychiatriques”.
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“Ce qui n’est pas une urgence aujourd’hui le sera demain, constate une porte-parole de Médecins sans frontières. Si on ne prend pas en charge les personnes malades, on prend le risque d’en faire un problème sanitaire. Les maladies peuvent se propager”.
Aux yeux de Pierre Henry, le directeur général de France-Terre d’Asile, ces mesures constituent un “contresens absolu. Les microbes et les virus vous ne leur demandez pas leurs papiers à la frontière. Ces soins s’inscrivent dans un dispositif de santé publique indispensable”.
“Sur le terrain, explique une autre association, nous allons être obligés d’orienter ces migrants vers les urgences à défaut d’autre chose. Or, plus on tarde à soigner, plus les soins coûtent cher. Les économies réalisées par ces mesures vont se répercuter sur les dépenses hospitalières.”
Rogner sur un système de soins que beaucoup d’associations considèrent comme “déjà imparfait” représente un risque pour les migrants les plus vulnérables. “L’Etat ne remplit déjà pas ses obligations. La moitié des demandeurs d’asile n’est pas hébergée aujourd’hui”, souligne Florent Gueguen.
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Le gouvernement “joue avec le feu”
Le gouvernement dit cibler les migrants originaires de Géorgie et d’Albanie, deux pays « sûrs » qui sont le plus souvent déboutés du droit d’asile. Ces demandeurs d’asile profiteraient de leur séjour en France pour faire du “tourisme médical”, d’après les mots d’Emmanuel Macron.
“Au nom de quelques milliers de personnes on va mettre en danger les Syriens, les Afghans ou encore les Somaliens”, réagit Malik Salemkour, le président de la Ligue des droits de l’homme.
Autre point de crispation du côté des associations : la mise en place de quotas pour l’immigration économique prévue par le gouvernement pour pallier les problèmes de recrutement de certains secteurs. “Nicolas Sarkozy avait voulu mettre en place des quotas et lui-même avait reconnu que c’était infaisable et inefficace”, tranche Malik Salemkour. “Agiter l’immigration à quatre mois des élections municipales, c’est jouer avec le feu”. Pire, “le gouvernement le fait avec les arguments nauséabonds de l’extrême droite”, conclut-il.
Tout rapprochement avec les élections municipales 2020 à Paris serait purement fortuit… #Immigration https://t.co/dFzx7yN6C6
— eric hacquemand (@erichacquemand) November 6, 2019
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