Echaudé par les violences de Poitiers, Brice Hortefeux décrète la création de deux nouveaux fichiers, censés aider la police à faire face aux « mouvances anarchistes potentiellement violentes ».
C’est une manie française : un fait divers retentissant, une visite de ministre auprès des victimes, on légifère un truc vite fait qui répondra de suite à tous les problèmes. Le 10 octobre à Poitiers, une manifestation « festive » contre l’ouverture d’une nouvelle prison à Vivonne, en bordure de la ville, dégénère en violences « organisées », laissant les habitants en état de choc et plusieurs vitrines de magasins en sale état. Le ministre de l’Intérieur, Brice Hortefeux, est donc très vite sur place, promet d’être intraitable avec les « casseurs » (trois peines de prison ferme sur 8 comparutions immédiates), et annonce le 13 octobre la mise en place imminente de deux nouveaux fichiers d’information à usage policier.
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Deux décrets, actuellement examinés par le Conseil d’Etat, mettraient ainsi en place, par le biais des préfets, un fichier qui répertorie les « lieux de vie communautaire » où se regroupent les anarchistes « potentiellement violents », et un autre qui identifie « précisément » « le ou les groupuscules responsables » des violences. Or, comme le rappellent Jean-Marc Manach, sur son blog Bug Brother, et le site Aporismes.com, ces fichiers ne font que réitérer une stigmatisation déjà ancienne des groupes anarcho-autonomes. Les nouveaux fichiers Hortefeux sont ainsi clairement une annonce politique plus qu’un dispositif concret, d’autant que, pour l’instant, dans l’attente d’un système de fichage centralisé, les services de renseignement sont obligés de composer avec des méthodes trop archaïques pour être efficaces.
Cette situation laisse planer, pour le Nouvel Obs, l’ombre d’une résurgence d’un fichier de type Edvige, cette terrifiante collecte de données personnelles qui avait heureusement été abandonnée fin 2008. Il avait effectivement été évoqué, dès septembre 2008, la création d’une « version édulcorée » d’Edvige, baptisée Edvirsp (Exploitation documentaire et de la valorisation de l’information relative à la sécurité publique), et qui ne comporterait plus de données personnelles non directement liées à la sécurité publique (comme l’orientation sexuelle de la personne concernée…). Le désir de Brice Hortefeux de marquer son mandat en modernisant les services de renseignement intérieurs pourrait ainsi bien aboutir à la réactivation de ce projet, dont on n’avait plus de nouvelles depuis un an.
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