David et Albert Maysles sont des génies du cinéma direct. Cinécinéma leur rend hommage.
Le documentaire Meeting Albert de Karim Zeriahen, produit par Pierre-Paul Puljiz, qui accompagne l’hommage aux frères Maysles, grandes figures du cinéma direct américain, permet d’expliquer la démarche assez particulière d’Albert Maysles, 83 ans, que l’on découvre dans sa maison/ centre culturel de Harlem.
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Si Maysles prône un type de documentaire où le cinéaste découvre un sujet tout en le filmant, le contenu et la construction de ses films coréalisés avec son frère David, flirtent avec la fiction. Maysles déclare qu’il a été influencé par Truman Capote, dont il avait tiré le portrait lors de la parution du retentissant De sang-froid. L’auteur parlait alors de roman documentaire.
Les Maysles, eux, partent d’un matériau réel, mais le montent à leur guise, envoyant balader la chronologie, les raccords, au profit de l’émotion et de la construction des personnages. Le tandem est essentiellement connu pour son film sur les Rolling Stones, Gimme Shelter, oeuvre charnière sur la fin du rêve hippie, mais ce n’est finalement pas le plus représentatif.
La particularité de leur travail, en tout cas à la vision des exemples diffusés sur Cinécinéma ou découverts au dernier festival Cinéma du réel, c’est leur immersion dans le domaine de l’intime. Le grand film des Maysles est Grey Gardens : la vie de deux femmes de la haute société américaine, Edith Beale, dite Big Edie, 78 ans, et sa fille, Little Edie, 56 ans, tante et cousine de Jackie Kennedy, dans leur riche demeure de Long Island devenue un taudis.
Une tragicomédie documentaire qui a inspiré une comédie musicale et pourrait être la matrice de la téléréalité. La vedette en est Little Edie, ex-pauvre petite fille riche, chanteuse et danseuse de music-hall frustrée, qui joue un jeu de séduction permanent avec les Maysles (Albert à la caméra et David au micro).
Dans presque tous leurs films, on trouve un antihéros. Dans Salesman, sur de surréalistes vendeurs de bibles sapés comme les personnages de Reservoir Dogs, l’accent est mis sur Paul Brennan, un vétéran qui a perdu la foi dans le business et peine à fourguer ses gros bouquins aux pigeons…
Dans What’s happening! The Beatles in the U.S.A. (non programmé), sur les coulisses de la tournée des Fab Four aux Etats- Unis en 1964, la star c’est Ringo, qui interagit constamment avec la caméra.
Non content d’explorer la musique de leur temps, les Maysles ont abordé d’autres secteurs artistiques (et sociaux). Ils ont beaucoup suivi Christo, notamment dans Running Fence, où l’on assiste à l’installation d’un paravent de nylon blanc sur une quarantaine de kilomètres en Californie. Une sorte de Woodstock sans concert qui révèle le caractère pharaonique du travail de Christo.
Après la disparition de son frère David en 1987, Albert Maysles – dont Godard disait qu’il était le meilleur caméraman américain –, a continué avec ses enfants. Il préparerait un portrait de l’acteur Russell Brand, produit par Oliver Stone. Curieuse idée, mais Albert Maysles est curieux. Au double sens du terme.
Photo : David et Albert Maysles en 1975
Vision(s) d’Amérique : Hommage à Albert et David Maysles sur Cinécinéma Club. Vendredi 30 avril : Salesman à 22 h 40, suivi de Meeting Albert et Running Fence. Vendredi 7 mai : Grey Gardens à 21 h 00, suivi de The Beales of Grey Gardens.
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